6 octobre 2022 - 07:00
Faire du drag… en région!
Par: Maxime Prévost Durand
Il y a de la place et de l’intérêt pour l’art du drag queen en région, constate le Maskoutain Jason Collins, qui personnifie la drag queen Eva Moist. Photo gracieuseté

Il y a de la place et de l’intérêt pour l’art du drag queen en région, constate le Maskoutain Jason Collins, qui personnifie la drag queen Eva Moist. Photo gracieuseté

Avec les Rita Baga et Barbada de Barbades de ce monde, la culture drag se démocratise plus que jamais au Québec. Jadis associé uniquement au quartier gai à Montréal, cet art de la scène fait de plus en plus sa place en région également. Et Saint-Hyacinthe n’y fait pas exception.

Après avoir présenté deux spectacles à guichets fermés au centre communautaire Assomption en juin, les drags queen maskoutaines Eva Moist et Miss Foutain répéteront l’expérience ce vendredi et ce samedi au même endroit avec leur spectacle Les drags débarquent (encore) en ville!

« Quand on a fait notre spectacle en juin, on était emballés, mais pas totalement convaincus que ça allait marcher. On le faisait en se disant qu’on avait trouvé une salle abordable et qu’on ne pouvait pas perdre d’argent, mais on ne savait pas si ça allait être populaire. Finalement, on a fait deux soirs sold out. En sortant de là, on s’est dit que c’était possible et qu’il y a un marché pour ça ici », raconte le Maskoutain Jason Collins, qui se glisse dans la peau d’Eva Moist.

Finaliste au plus récent concours Miss Cocktail, qui est l’un des plus importants à Montréal, le jeune trentenaire multiplie les spectacles en région. Que ce soit à Saint-Hyacinthe, à Sherbrooke, à Trois-Rivières ou dans le secteur de Drummondville, il constate l’intérêt qui se développe pour la culture drag.

« On n’aurait pas pu avoir des shows de drag en région comme ça sans une Rita Baga qui fait Big Brother et qui conquit le public à la télévision », croit-il, heureux de voir que cette visibilité a ouvert des portes qui semblaient plutôt fermées jusque-là.

À travers toute l’excentricité qui peut s’en dégager, le drag est un art en soi, estime Jason Collins.

« C’est comme quelqu’un qui fait de la peinture, sauf que je la fais sur moi au lieu d’une toile », image le natif de Drummondville, établi dans la région maskoutaine depuis trois ans.

Une dualité

Plusieurs motifs peuvent pousser une personne à se glisser dans la peau d’une drag queen. Pour certains, cela révèle une quête identitaire. Pour Jason Collins, c’est plutôt pour l’aspect divertissement qu’il s’adonne à cet art de la scène.

« Il y a un bout où je me questionnais à savoir si j’aimais ça parce que je me sens femme ou parce que j’aime faire de la scène, confie-t-il. J’ai eu besoin de m’adapter à ce que je voyais dans le miroir. Mais j’aime beaucoup la dualité entre la drag queen et moi-même parce que je ne suis pas quelqu’un de très flamboyant dans la vie en général. [En tant qu’Eva], je me sens moins réservé. En mettant un masque, je peux être plus extravagant et faire des blagues plus salaces. C’est moi, mais à l’extrême. »

Ses numéros – pour public averti – sont formés surtout de lipsync et de danse sur des remix et des medleys de chansons populaires, pour faire lever le party. Mais ils peuvent aussi avoir une portée plus sérieuse et politique par moment.

« Lors du dernier spectacle à Saint- Hyacinthe, j’ai fait un numéro sur la chanson “Comme ils disent” de Lara Fabian. Je racontais plus une histoire et j’ai adoré ça. Je voyais que ça résonnait chez les gens aussi. »

Faire sa place

Le personnage d’Eva Moist a goûté à la scène pour la première fois il y a près de quatre ans. C’était dans le cadre du concours Drag Moi du mythique Cabaret Mado. Sans expérience et avec un matériel limité, la drag queen a appris les rouages du métier à la dure, devant des critiques de surcroît.

« Au départ, c’était plus récréatif, soutient Jason Collins. Il n’y avait pas d’objectif de carrière à temps partiel [en marge de mon emploi régulier]. Mais depuis un an et demi, je le fais plus sérieusement, de façon plus professionnelle. »

Signe que les choses vont bien, Eva Moist enchaîne maintenant les spectacles presque chaque week-end. Elle monte sur les scènes de Montréal à l’occasion, comme elle l’a fait au Cabaret Mado cet été, mais c’est surtout en région qu’elle développe son public présentement.

« La scène drag est très saturée à Montréal. Le nombre de drags est beaucoup plus grand que le nombre d’ouvertures, indique Jason Collins. Pour continuer, je me suis dit que ça allait se passer ailleurs et j’ai eu des opportunités qui se sont présentées ici. J’ai rencontré Miss Foutain (Justin Fontaine) et on a commencé à planifier nos propres soirées. Après les spectacles de juin et ceux qu’on va faire à Saint-Hyacinthe bientôt, on aimerait faire une tournée en région en 2023 avec le concept d’amener le drag aux gens. »

Les billets pour le spectacle Les drags débarquent (encore) en ville! sont disponibles au www.lepointdevente.com au coût de 20 $ (plus taxes et frais de service).

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