26 janvier 2023 - 07:00
Faut-il libérer les personnes souffrant d’Alzheimer?
Par: Le Courrier
Depuis quelque temps, il est grandement question des conditions de logement et de vie de nos aîné(e)s, nommé(e)s « sages ». Il a fallu un virus invisible venimeux, mais actif, pour que les questions soient correctement dévoilées et affichées.

Il y a longtemps que des gens, dont j’en suis, ont dénoncé et dénoncent l’exploitation dont nos aîné(e)s subissent les contrecoups. Mais trop de gens, tant qu’ils ne sont pas concernés par un des leurs, choisissent de mettre de côté ce problème criant, se disant pour se disculper : des personnes s’en occuperont. Voilà où ces attitudes ont amené la société. Une société débridée qui se préoccupe avant tout de consommation ultra et d’utilisation de gadgets techniques et numériques engendrant un individualisme étouffant qui la plonge dans des problèmes de déception, de suicides, d’hypnoses mentales.

Voici ce qu’en disait Einstein (1955) : « Le jour où la technologie remplacera les interactions humaines, nous aurons alors créé une génération d’idiots. » Juste prémonition de l’actualité de la part d’Einstein. L’économiste D. Acemoglu, du MIT, affirme : « L’histoire abonde également en catastrophes provoquées par la puissance de la science et de sa volonté zélée d’améliorer la condition humaine. Les efforts visant à connecter le monde aux technologies ont engendré un marasme de propagande, de désinformation, aussi d’intimidation. »

Quelle catastrophe vivons-nous actuellement? Un commentateur avisé, Luc Boulanger, a écrit : « En facilitant le quotidien, la technique donne l’impression d’améliorer notre qualité de vie. Pour mieux nous rendre dépendants à son utilisation. » Piège bien déguisé pour greffer la jeunesse.

Les situations malheureuses et négatives dans les CHSLD et résidences diverses nous lancent en plein visage une lumière aveuglante! Les efforts essoufflés et peu efficaces ne peuvent tenir cachés des comportements, voire des choix, et demeureront inefficaces après la violence du coronavirus. Les gens reviendront en hâte à leurs intérêts, souvent mesquins et profiteurs. Cet égoïsme sociétal, souligné ci-dessus, subit en victime le retour violent d’un boomerang mal lancé.

La grande partie de la solution relève de la disponibilité de préposé(e)s vraiment reconnu(e)s et correctement rémunéré(e)s. Cette question accuse un retard inexcusable des partis politiques. Le nombre de personnes âgées ira en croissant et nous avons peur et crainte d’accepter d’envisager la réalité de la vie.

Les préposé(e)s et infirmiers(ères) ont trop de surcharge avec les personnes souffrant de la maladie d’Alzheimer. Ces personnes n’ont plus de qualité de vie ni de dignité humaine. Sans les mépriser, il faut en arriver à admettre qu’elles ne vivent plus. Envisager de les aider à mourir par des soins adaptés médicalement, ce n’est pas les tuer, au contraire, c’est de les soustraire à cette vie violente et indigne baignée dans l’urine et le caca. L’énergie humaine est perdue à laisser vivoter indignement ces personnes qui n’accepteraient pas cet état.

Admettons la réalité : quand une personne n’a plus l’usage de son cerveau, elle n’est plus un humain. Il est temps que le bon sens trouve sa place et ne soit plus esclave du relent religieux moraliste. Aucune personne, vous et moi inclus, ne veut vivre cette démence. De plus, plusieurs demandent de mourir avant d’arriver à un tel état indigne parce qu’inhumain. Beaucoup de personnes demandent à mourir au lieu d’être placées dans ces maisons à but économique.

Comme l’a écrit le philosophe André Comte-Sponville : « Laissez-nous mourir comme nous le voulons. » Que les comités osent donner priorité à leur objection de conscience, aux dépens de la conscience du malade à qui doit appartenir la décision, et cessent leur boiteuse domination. Ça regarde la personne malade et le médecin.

Georges L’Espérance, neurochirurgien, nous partage ceci : « L’autonomie des individus et particulièrement des patients est un principe fondamental de même que le respect qu’on leur doit sans paternalisme médical, légal et encore moins religieux. La médecine se doit d’être accompagnatrice jusqu’à la fin : la mort n’est pas un échec, mais un aboutissement inéluctable et universel qu’il nous appartient de rendre confortable, que ce soit par des soins palliatifs, en particulier à domicile, ou en recourant à l’aide médicale à mourir si tel est le désir de la personne. »

La fréquence des virus va augmenter si on ne change pas notre rapport à la nature, si on n’améliore pas la façon dont on prend soin des populations les plus vulnérables et la façon dont on vit en société, société débridée dont je parle ci-dessus.

La nature ne se laisse pas dominer par les humains. Les pandémies qui viennent périodiquement font en sorte qu’elles limitent l’expansion du nombre d’humains. C’est comme un autre signe qui permettra la libération des personnes souffrant de la maladie d’Alzheimer condamnées à vivre dans l’indignité.

L’abbé Raymond Ethier, Saint-Hyacinthe

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