1 septembre 2016 - 00:00
Le 3 septembre 1876 : Le Courrier brûlait…
Par: Le Courrier
Cet article reprend des extraits du texte paru dans Le Courrier de Saint-Hyacinthe du 5 septembre 1876.

Ceux qui ont appris l’effroyable malheur qui vient de fondre sur Saint-Hyacinthe et dont Le Courrier a été une des nombreuses victimes ne s’étonneront point de ne recevoir aujourd’hui qu’un « extra ». Dans l’incendie du dimanche 3 septembre tout notre matériel a brûlé, de même que nos presses, les fiches du Journal d’Agriculture et du Farmer’s Journal et nous n’avons pu sauver que nos livres de compte, quelques volumes du Courrier, quelques cases, et une faible partie des livres de notre bibliothèque.

Ayant à acheter des presses et tout un matériel nouveau, de plus trouver à nous loger chose très difficile, il s’écoulera quelques semaines ; avant que nous puissions reprendre le cours régulier de notre publication et nous comptons beaucoup sur la sympathie de nos abonnés pour les prier de consentir à ne recevoir d’ici à quelque temps que des « extras ». Nous ferons tous nos efforts, pour que ce laps de temps soit aussi court que possible.

Nous devons à l’obligeance de notre confrère L’Union de pouvoir offrir à nos abonnés le triste récit de l’effroyable conflagration de dimanche et qu’il veuille bien accepter nos remerciements.

C’est accablé par la fatigue et la douleur dans l’âme que nous traçons ces lignes.

Hélas, notre charmante petite ville de Saint-Hyacinthe vient d’essuyer un de ces effroyables malheurs, que la divine Providence répand sur toute une population au moment le moins attendu. L’incendie dont nous avons été victimes est le plus désastreux jamais vu dans l’histoire du pays, eu égard à la population et à l’étendue de Saint-Hyacinthe.

Le feu dans son activité dévorante a balayé tout sur son passage et nous n’exagérons rien en disant que les neuf dixièmes de notre ville ne sont plus qu’un monceau de cendres. Le feu s’est, déclaré dimanche à deux heures de l’après-midi, dans un bâtiment loué par Magloire Blanchette, sur la rue Des Cascades, en arrière de l’imprimerie du Courrier de Saint-Hyacinthe.

Le temps était beau et une brise légère contribua à répandre les flammes davantage. Au moment de l’incendie, l’eau de l’aqueduc fit défaut, car dès le matin, on avait fermé les conduits, afin d’opérer certaines opérations. Le bâtiment où le feu prit origine étant en bois, les flammes se communiquèrent aussitôt à l’imprimerie du Courrier qui en un instant fut réduite en cendres.

Comme toutes les maisons environnantes étaient en bois, que l’eau faisait défaut et que notre organisation du feu était bien incomplète, il devint impossible de se rendre maître de l’incendie et lorsque l’aqueduc put fonctionner le théâtre de la dévastation était trop agrandi pour pouvoir le circonscrire. On peut dire qu’alors ce fût un sauve-qui-peut général. Le vent qui s’étant élevé portait les flammèches, à une grande distance.

Tous les magasins autour du marché, le marché lui-même disparurent dans un tourbillon de fumée. Le gros de l’incendie se porta sur la partie inférieure de la ville, après avoir ravagé toutes les maisons de commerce.

Les ravages du feu se sont étendus depuis le côté est de la rue Saint-Joseph, vis-à-vis l’évêché, jusqu’à l’extrémité de la ville, en bas.

Les rues sur la côte ont été épargnées, à l’exception de la rue Girouard sur le côté sud-est, ainsi que deux blocs de maisons du côté ouest, entre les rues Saint-Joseph et Bourdages. Les rues où le feu a passé sont les rues Saint-Joseph, Saint-Hyacinthe, Sainte-Anne, Saint-Denis, Mondor, Piété, Sainte-Marie, Concorde, Saint-Paschal, Williams, Cascades, Saint-Antoine, Sainte-Marguerite, du Bord-de-l’eau, Saint-François, Saint-Simon, Saint-Louis, Saint-Michel et Saint-Casimir. Le feu s’est arrêté à l’avenue Yamaska, près de la rivière, faute de maisons pour l’alimenter.

En tout, de 600 à 800 bâtiments ont brûlé, jetant environ 4 000 personnes à la rue. Beaucoup de demeures et de ménages étaient assurés, mais nous ne pouvons en préciser le montant. Il est bien difficile de donner le montant des pertes. Quelques-uns les estiment à un million et demi de piastres.

Vers quatre heures, une pompe à vapeur arrivait par convoi spécial de Montréal et les braves pompiers montréalais rendirent les plus grands services.

Nous nous trouvons qu’avec trois magasins et sans ressources pour nourrir toute cette population qui est là dans la rue, sans abri et sans pain. Un convoi a été expédié hier matin de Montréal avec du pain et autres provisions pour la population en souffrance.

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