8 septembre 2022 - 07:00
Dossier Exceldor
L’UPA reconnaît sa défaite
Par: Sarah-Eve Charland
Exceldor pourra construire sur 10 hectares en zone agricole à Saint-Hyacinthe. Photothèque | Le Courrier ©

Exceldor pourra construire sur 10 hectares en zone agricole à Saint-Hyacinthe. Photothèque | Le Courrier ©

Voyant ses chances de succès très faibles, la Fédération de l’Union des producteurs agricoles (UPA) de la Montérégie a choisi de ne pas contester la décision du Tribunal administratif du Québec (TAQ) qui maintient l’autorisation de construire un abattoir Exceldor sur des terres agricoles à Saint-Hyacinthe.

« Ce n’est pas qu’on est d’accord avec la décision, mais les chances de succès sont à peu près nulles. Au niveau du TAQ, c’était assez clair que [les juges ne considéraient] pas nos arguments. Il faut l’accepter », affirme le président de l’UPA de la Montérégie, Jérémie Letellier.

L’UPA avait 30 jours pour demander une révision ou une révocation de la décision du TAQ. Les juges avaient décidé de maintenir la décision de la Commission de protection du territoire agricole du Québec (CPTAQ) en rejetant tous les arguments de l’UPA. En septembre 2021, la CPTAQ a accordé un usage non agricole sur une terre de 10 hectares à Saint- Hyacinthe, à l’usage exclusif d’Exceldor.

« Je demeure convaincu que la démonstration n’a pas été faite que l’abattoir ne pouvait pas se construire ailleurs. […] Ce qui me préoccupe, ce sont les conséquences de la décision. Il y a des précédents qui ont été créés. Il y a eu un revirement complet de la décision de la Commission qui, à mon avis, est mal expliqué. Je pense que ça ouvre des portes. Ça affaiblit la loi », poursuit M. Letellier.

Bien qu’il soit déçu du dénouement du dossier, il constate que les enjeux de protection des terres agricoles et de l’étalement urbain sont de plus en plus discutés. Il assure que l’UPA continuera de défendre les terres agricoles. « Il y a une prise de conscience dans la population. Je n’ai jamais vu ces enjeux aussi présents dans les médias. En même temps, il n’y a jamais eu autant de pression sur les terres agricoles, surtout en Montérégie. On ne peut pas juste être pour la protection des terres agricoles quand ça ne touche pas à nos affaires. Un moment donné, ça prend une prise de conscience collective. »

Des heureux

Le maire de Saint-Hyacinthe, André Beauregard, s’est dit plus qu’heureux d’apprendre la fin des procédures juridiques. « C’est une bonne nouvelle. On va procéder, avec Exceldor, aux dernières choses qu’on doit faire avant de commencer la construction, comme les changements réglementaires. Après trois ans, cette saga est maintenant terminée », mentionne-t-il.

À la séance du conseil de la MRC des Maskoutains du 17 août, les élus ont déposé un avis de motion afin de permettre les entreprises de type abattoir sur le lot concerné. Le processus réglementaire peut prendre jusqu’à six mois avant qu’Exceldor puisse faire la première pelletée de terre.

Rappelons que la première demande pour exclure 24 hectares de la zone agricole auprès de la CPTAQ, par la Ville de Saint-Hyacinthe, remonte à 2019. Cette demande a toutefois fait l’objet d’un refus de la Commission. La MRC a, par la suite, déposé une nouvelle demande qui s’est traduite par une autorisation d’un usage non agricole sur 10 hectares en 2021.

Les 10 hectares dont il est question dans la décision font partie d’un ensemble de terres achetées des mains de la famille Overbeek par la Ville de Saint-Hyacinthe en 2009. « Ce qui est dommage, c’est que le ministère des Affaires municipales nous a donné l’autorisation pour acquérir ces terres-là en 2009, mais quand on demande de les dézoner pour les développer, ça devient compliqué. On est heureux que ce soit terminé. On ne sait même pas si on va être capable de dézoner les 14 hectares restants. On n’a presque plus de terrains industriels à Saint-Hyacinthe. Avec la réponse de la CPTAQ, il ne faut pas trop y compter », ajoute M. Beauregard.

« Exceldor accueille avec sérénité la décision de l’UPA de la Montérégie de ne pas faire appel », a indiqué le responsable des relations publiques et gouvernementales chez Exceldor, Denis Paquet.

Les différents délais au niveau de la CPTAQ et du TAQ ont poussé l’entreprise à réviser son projet, ajoute M. Paquet. L’entreprise doit faire face à une forte inflation, à des difficultés dans les chaînes d’approvisionnement, à des hausses du coût des matériaux et à une pénurie de main-d’œuvre, énumère-t-il.

« Les coûts estimés du projet doivent donc être révisés à la hausse pour tenir compte de ce contexte. D’ailleurs, plusieurs entreprises québécoises, de même que beaucoup d’administrations municipales, mettent sur pause ou réévaluent leurs grands projets d’investissements. La coopérative doit mettre à jour ses demandes auprès des gouvernements du Québec et du Canada afin d’obtenir le soutien financier justifié par les retombées économiques liées à un investissement aussi majeur », termine M. Paquet.

Le projet consiste à construire un abattoir à Saint-Hyacinthe afin d’y déménager les activités de l’usine de Saint-Damase. Le projet initial représentait un investissement variant entre 200 M$ et 250 M$. L’entreprise prévoit de déménager les quelque 300 emplois de ses installations de Saint-Damase en plus d’en créer 300 autres au cours de la première phase du projet.

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