23 mars 2023 - 07:03
Promenade Gérard-Côté
Notre tunnel
Par: Martin Bourassa
Martin Bourrassa

Martin Bourrassa

Avec la réfection de la promenade Gérard-Côté, les Maskoutains sont-ils sur le point de s’engager dans un puits sans fond semblable à celui du tunnel Louis-Hippolyte-La Fontaine à Montréal? Plus que jamais, il serait temps de se poser la question.

« Explosion des coûts », titrait le Journal de Montréal mardi matin à propos de la facture revue et corrigée de la réfection du fameux tunnel sous le fleuve Saint- Laurent. La veille, Québec avait annoncé que les travaux entrepris il y a quelques mois coûteraient beaucoup plus cher que le demi-milliard prévu en 2019, un montant qui avait été rehaussé à 1,4 G$ à l’été 2020. Le gouvernement a prévenu cette semaine que ce chantier, qui s’échelonnera jusqu’en 2026, nécessitera plutôt des déboursés de 2,5 G$.

Et il est loin d’être terminé, ce qui laisse croire qu’une mise à jour budgétaire sera peut-être de mise d’ici à sa conclusion. Et comme cesser les travaux n’est pas une option à ce stade-ci, les contribuables québécois sont condamnés à payer la note.

Ce qui nous ramène à notre fameuse promenade de 2,4 kilomètres le long de la rivière Yamaska. En 2017, nous rappelle encore la Ville de Saint-Hyacinthe sur son site Internet, de nombreuses personnes ont participé à la consultation publique visant à Rêver (en couleurs!) notre nouvelle promenade Gérard-Côté.

Grâce à ou à cause de la firme d’architectes Daoust Lestage, ce grand rêve devait prendre la forme d’un projet d’envergure de 33 M$, incluant une place des spectacles de 4 à 5 M$ près du Centre des arts, lors de sa présentation en novembre 2018.

C’était déjà beaucoup d’argent pour rénover une promenade existante, non?

Et c’était avant la pandémie et l’augmentation exponentielle des coûts de construction alimentée entre autres par la pénurie de main-d’œuvre et la hausse du coût des matériaux. Mais c’était surtout avant que la récession ne pointe le bout de son nez et avant que l’état de la dette ne devienne un sujet de préoccupation à Saint-Hyacinthe.

Élu en novembre 2021, le conseil s’est penché en début de mandat sur les coûts associés à la promenade. Il a été décidé de garder le cap sur un projet de quelque 30 M$, ce qui avait nécessité un dégraissage du concept initial et l’abandon de quelques fioritures afin de respecter cette cible dans un contexte inflationniste.

Il a été décidé de morceler le projet de réfection et d’y aller par étapes le temps qu’il faudra. Peut-être pour que l’accumulation de petites factures passe mieux et que l’on oublie de les additionner avec le temps. C’est ainsi qu’on s’est affairé à préparer et à lancer le tout premier lot de la promenade Gérard-Côté.

Lundi soir, la majorité du conseil, hormis Bernard Barré, a donné son aval au règlement autorisant les travaux d’aménagement de la place des spectacles et un emprunt… de 12,9 M$! Précisons que ces travaux ne se rendront pas aux portes de la nouvelle bibliothèque et se dérouleront aux pieds d’un projet immobilier, celui de Groupe Sélection, à l’avenir bien incertain. Aussi incertain que les montants attendus des soumissions de la place des spectacles. Il est loin d’être acquis que le montant de 12,9 M$ suffira quand on regarde ce qui se passe avec d’autres projets publics.

« Il est à propos et dans l’intérêt de la Ville et de ses contribuables de réaliser le lot 1A de la promenade Gérard-Côté, soit l’aménagement de la place des spectacles », mentionne-t-on d’entrée de jeu dans le projet de règlement. Outre le fait que la Ville de Saint-Hyacinthe a des délais à respecter pour ne pas risquer de compromettre une subvention de 5 M$ de Québec, il est à se demander s’il est réellement dans l’intérêt de la collectivité de s’engager la main dans le tordeur à ce moment-ci.

À défaut d’un tunnel, nous sommes peut-être en train de creuser nous-mêmes quelque chose qui pourrait ressembler, à terme si on s’y rend un jour, à un gouffre financier.

Des Maskoutains oseront-ils bloquer le règlement d’emprunt pour forcer la Ville à suspendre le projet avant même la première pelletée de terre?

Ce serait bien étonnant vu notre historique en semblable matière, les délais serrés et l’absence d’opposition organisée à la table du conseil, et ce, même si le grand rêve est peut-être déjà en train de virer au cauchemar.

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