2 juin 2022 - 07:01
Exceldor et la CPTAQ
Texte 1080
Par: Le Courrier
Martin Bourrassa

Martin Bourrassa


uand mon plus jeune a appris à compter, le chiffre 1080 représentait presque l’infini, le nombre le plus élevé qui soit. Un chiffre au-delà duquel il ne servait plus à rien de compter. Alors, sachez que j’ai arrêté de compter le nombre d’articles d’opinion et d’articles tout court que j’ai écrit ou que les journalistes du COURRIER ont produit sur ce qui est devenu la saga Exceldor devant la Commission de protection du territoire agricole du Québec. En voici un de plus.

Pourquoi en ajouter si tout a été dit? Pour deux raisons. La première, c’est que contrairement à la croyance populaire, tout n’a pas encore été dit. La seconde raison, essentielle et capitale : l’importance de l’enjeu pour la Ville de Saint-Hyacinthe et la grande région maskoutaine. Faut-il le rappeler une fois de plus? Et pourquoi pas.

Grosso modo – les chiffres n’ont pas été mis à jour depuis un bout de temps –, il est question de déménager à Saint- Hyacinthe l’abattoir Exceldor de Saint-Damase. À court terme, ce transfert laisse entrevoir un investissement minimal de 200 M$ et la création et la consolidation de quelque 600 emplois. La phase 2, dans un horizon de 10 ans, laissait envisager le double de tous les chiffres avancés.

Mais pour que tout cela arrive, il aurait fallu que la CPTAQ autorise Exceldor à s’implanter sur une terre d’une quinzaine d’hectares située en zone agricole à Saint-Hyacinthe. Or, le chien de garde de la Loi sur la protection du territoire et des activités agricoles n’a concédé que 10 hectares à la coopérative au terme d’un long débat animé. Cette confrontation en deux temps a opposé la Ville de Saint-Hyacinthe à l’Union des producteurs agricoles (UPA) de la Montérégie d’abord, puis la MRC des Maskoutains et l’UPA. Il s’agit d’un débat à finir puisque la conclusion se fait attendre.

Le 11 mai, j’ai cependant eu la chance d’assister à distance à ce qui pourrait être l’acte final dans ce dossier devant le Tribunal administratif du Québec (TAQ).

Cette contestation était, pour l’UPA, la démarche de la dernière chance afin de retarder, voire de bloquer Exceldor.

À cette occasion, l’UPA devait démontrer qu’une erreur de droit ou une erreur de fait déterminante avait été commise par la CPTAQ dans son analyse du dossier. L’UPA ne pouvait pas se contenter de manifester son désaccord sur la décision rendue par la CPTAQ. Il fallait pointer des erreurs graves.

L’UPA a-t-elle été convaincante? En ce qui me concerne, la réponse est non.

Je n’ai rien entendu de vraiment nouveau et encore moins de déterminant au niveau des erreurs de droit ou de fait qui auraient pu être commises par les commissaires de la CPTAQ dans leur appréciation du dossier. Certes, sa volte-face est inusitée. L’UPA n’a d’ailleurs pas manqué de le faire ressortir en soulignant l’incohérence décisionnelle de la CPTAQ, qui, dans deux dossiers similaires, a rendu des décisions diamétralement opposées.

Elle avait d’abord rabroué deux fois plutôt qu’une la Ville de Saint-Hyacinthe avec sa demande initiale d’exclusion de 24 hectares. Puis, quand la MRC des Maskoutains est revenue à la charge avec la même demande, la CPTAQ avait également produit une orientation préliminaire défavorable à tout changement de zonage. Ce n’est qu’avant de confirmer cette orientation qu’elle s’est rendue aux arguments de la MRC et d’Exceldor en autorisant l’exclusion d’une parcelle de 10 hectares sur les 24 demandés, spécifiquement pour les besoins d’Exceldor.

L’UPA a beau prétendre que les dossiers étaient identiques, force est d’admettre qu’ils ont été portés, défendus et expliqués avec beaucoup plus de sérieux et de conviction à la seconde occasion par la MRC, avec le support des procureurs d’Exceldor.

L’UPA n’a rien ménagé pour défendre ses positions, présenter des solutions de rechange et défendre l’intégrité de la zone agricole. Rien, et c’est tout à son honneur.

Mais au final, les commissaires se sont rendus aux arguments de la MRC et d’Exceldor, en y allant avec un compromis qui a déplu à toutes les parties, comme c’est souvent le propre des meilleurs compromis. C’est ce que doit maintenant reconnaître le TAQ et accepter l’UPA. Cet acharnement est aussi incompréhensible que totalement démesuré et néfaste pour tout le monde.

Il est temps de passer à autre chose.

image