30 mars 2023 - 09:06
The Whale : un Oscar qui résonne jusqu’à Saint-Hyacinthe
Par: Maxime Prévost Durand
Le Maskoutain Patrick St-Pierre, un artiste en effets spéciaux, a fait partie de l’équipe d’Adrien Morot qui a travaillé à la confection de la prothèseportée par l’acteur Brendan Fraser (sur la photo) dans le film The Whale. Photo A24�

Le Maskoutain Patrick St-Pierre, un artiste en effets spéciaux, a fait partie de l’équipe d’Adrien Morot qui a travaillé à la confection de la prothèseportée par l’acteur Brendan Fraser (sur la photo) dans le film The Whale. Photo A24

L’Oscar remporté par le Québécois Adrien Morot, pour le maquillage et la coiffure du film The Whale (La baleine), a des échos jusque dans la région maskoutaine. L’artiste en effets spéciaux Patrick St-Pierre, originaire de Saint-Hyacinthe, a fait partie de l’équipe qui a créé l’imposante prothèse que l’acteur Brendan Fraser a portée afin de se glisser dans la peau – c’est le cas de le dire – du personnage obèse morbide de Charlie.


Concrètement, Patrick St-Pierre a contribué au moulage de ladite prothèse, un travail crucial dans l’élaboration de cette fausse peau.

« C’est vraiment différent de tout ce que j’avais fait avant, autant pour la grosseur et le format des prothèses que pour les différentes tâches que j’avais à faire sur ce projet », affirme le Maskoutain, qui cumule près de 30 ans de métier, dans une longue entrevue accordée au COURRIER.

Impliqué dans des projets d’Adrien Morot depuis 2017, l’artiste en effets spéciaux affirme que l’approche utilisée pour The Whale est venue chambouler les techniques traditionnelles pour ce type de travail.

« C’est complètement innovateur ce qu’Adrien a fait », lance-t-il au bout du fil.

Habituellement, pour créer des prothèses et faire des transformations physiques, l’acteur se présente à l’atelier de production pour qu’un moulage de son corps – ou de la partie à transformer – soit réalisé. Par la suite, les artistes en effets spéciaux peuvent travailler à partir de cette reproduction exacte pour créer les pièces requises. Mais pour The Whale, le processus a été différent.

« Quand on a fait le film, c’était à la fin de 2020 et on était en pleine pandémie, donc Brendan Fraser ne pouvait pas venir à Montréal pour plein de raisons, raconte Patrick St-Pierre. Adrien a eu comme idée de le scanner. Brendan Fraser était à New York et son corps a été scanné pour qu’on ait une référence infographique de son volume corporel. Tout ça a été fait de façon digitale. Ensuite, Adrien a ajouté à l’infographie les prothèses sur l’écran, puis les pièces de son corps ont été reproduites par des imprimantes 3D. C’est là que mon travail débutait. On venait me porter les différentes pièces, puis on était deux ou trois personnes à assembler les pièces avec de la colle pour refaire le modèle. C’était un véritable casse-tête en 3D. Ensuite, je devais nettoyer les pièces et faire le moulage en coulant le silicone dans le moule. »

« En faisant le personnage de cette façon, on changeait vraiment les façons de faire dans le milieu des effets spéciaux. C’était du jamais vu », ajoute-t-il.

Les défis techniques étaient nombreux afin de rendre cette « peau » réaliste, si bien que la seule façon d’y arriver, c’était de créer la prothèse à partir de silicone. Une douzaine de personnes ont travaillé à l’élaborer et à la concevoir dans un atelier de Montréal.

« Les jambes étaient enfilées un peu comme une salopette, explique Patrick St-Pierre. Ensuite, la partie du haut était enfilée comme un chandail. Tout ça pesait près de 200 livres. En dessous de la prothèse, il y avait un système de refroidissement dans une espèce de jacket pour aider son corps à garder une température normale sous tout ce poids, sinon il aurait eu vraiment trop chaud. »

Un cadeau de fête

La consécration d’Adrien Morot et de son équipe aux Oscars est survenue le jour de l’anniversaire de Patrick St-Pierre. Un cadeau tout à fait inespéré.

« J’avais complètement oublié que c’était les Oscars ce soir-là », avoue candidement le natif de Saint-Hyacinthe en riant.

C’est en recevant des messages de ses amis, le félicitant pour sa contribution au projet, qu’il a appris qu’Adrien Morot avait remporté le prix de l’Académie pour le Meilleur maquillage et coiffure.

« Dans mon parcours, c’est un plus d’avoir pu vivre ça, dit-il avec humilité, presque gêné. Ce n’est pas une chose à laquelle je m’attendais. Je n’aurais jamais pensé ni espéré ça. Je fais seulement ce que j’aime et c’est tout. »

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