30 juin 2022 - 07:00
Vous souvenez-vous?
Par: Le Courrier

Vous m’excuserez d’avoir éclaté de rire en découvrant les manchettes au lendemain de l’allocution de François Legault à Drummondville. La CAQ a-t-elle si peu d’inspiration pour bâtir son programme électoral qu’elle doit copier sur sa voisine française Marine Lepen? Pourtant, en 2022, ce ne sont ni les enjeux ni les causes à défendre qui manquent; suffit de voir plus loin que le bout de sa fleur de lys…

Le nationalisme, c’est vital pour unir un pays autour d’un projet de société. Le nationalisme, c’est la fierté de sa langue, de sa culture, de son peuple – d’ici, d’ailleurs, de ville ou de région. Le nationalisme, c’est se souvenir. C’est connaître son histoire, se réjouir des fois où l’on a résisté, oui! Mais c’est aussi apprendre des fois où l’on a opprimé, menti, promis de l’argent en échange de votes, cadenassé la presse, pointé du doigt des boucs émissaires – les communistes, les juifs… les immigrants – pour canaliser la colère du peuple, pour le distraire, lui faire oublier qu’il ne peut pas se loger, qu’on ne peut ni le soigner aux urgences ni lui promettre un avenir viable.

Connaître son histoire, c’est avoir honte de la fois où l’on a tué des musulmans, des Québécois, sur un sol sacré. Le nationalisme, c’est la mémoire d’un peuple. Ma nation est si amnésique, qu’elle en oublie sa devise.

Et mon cœur pompe, je m’essouffle, je hurle d’avertissements, hurle de silence, alors qu’on s’enfonce dans les chemins – oh trop battus, oh trop empruntés par l’homme – du chauvinisme, qui mènent inéluctablement une nation à la haine et, conséquemment, à la honte.

Je recommande à M. Legault de prendre une grande respiration, de s’asseoir et d’apprendre son histoire – d’apprendre de son histoire – avant d’en écrire le prochain chapitre.

Lorsqu’on emploie côte à côte les mots « immigration » et « intégration », lorsqu’on écrase la culture de l’Autre, lorsqu’on blâme à tort les immigrants pour des problèmes qui enragent la nation, on divise, forcément. On gagne des élections. On cautionne et on nourrit la haine de l’Autre. On justifie la violence sur l’Autre. Mais on ne protège pas sa langue, on ne protège pas sa nation; on lui fait honte.

Une grande noirceur, c’est ben en masse, M. Legault. Et vous aurez beau priver Saint-Hyacinthe d’électricité, privez-nous de la 5G même; au moins nous, nous vivrons dans le futur.

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