Deux heures et quart pendant lesquelles j’entends ma radio vociférer contre les radicaux : « Bloquer des ponts, ça fait juste mettre les gens en cr… » accusant au passage les méchants écolos de ne pas comprendre la réalité des gens pognés dans l’trafic. Ah ouais, la fameuse réalité.
La réalité, c’est que ça fait au moins 50 ans que les scientifiques nous alertent sur l’urgence climatique. Trente ans qu’on parle de diminuer nos gaz à effet de serre (GES) à coup de sensibilisation et de gentilles manifestations, dont une attirant plus d’un demi-million de personnes à Montréal. On a même nommé un écolo au ministère de l’Environnement.
Résultat? Dans la réalité, nous ratons systématiquement TOUTES nos cibles de réduction de GES. Grâce à de nouveaux pipelines et à de nouveaux forages, le Canada est aujourd’hui le quatrième producteur mondial de pétrole. On désinvestit dans le transport en commun, on construit de plus en plus de routes et les ventes de véhicules à essence battent des records.
Toujours dans la réalité, mardi aprèsmidi, le pont est libéré. Je reprends la route pour être « pogné » dans le trafic 30 minutes entre la 132 et la 20. Un autre 30 minutes entre Sainte- Madeleine et Saint-Hyacinthe. Pour aucune bonne raison.
Pas de travaux, pas d’accidents et… aucun manifestant en vue. Juste des gens comme moi, seuls dans leur char, pognés dans le trafic.
La réalité, c’est qu’on n’est jamais « pognés » dans le trafic. Nous SOMMES le trafic.
La réalité, les écolos l’ont très bien comprise, c’est nous qui bloquons tout. Tous les jours.