Après avoir visionné le film, on peut être en accord avec ces critiques, en partie. Effectivement, Gerry met de l’avant en images une énumération simple et sans flafla de la vie de Gerry Boulet. De sa jeunesse à sa carrière solo parsemée de son cancer, en passant par les années fastes et rock d’Offenbach. On pourrait en rester là et penser que nous sommes passer à côté de quelque chose avec Gerry, que le film n’a pas atteint son objectif.
Cependant, on ne peut rester de glace devant l’héritage musical que le film Gerry met en lumière, et non pas seulement celui d’Offenbach ou de Gerry. Gerry, c’est Les Gants Blancs et la fin des années yéyé, les débuts du rock en français, l’émergence de talent prolifique comme celui de Pierre Harel ou de Marjo, les débuts de Corbeau, des spectacles mythiques comme la messe de l’Oratoire en 1972 et le dernier concert d’Offenbach en 1985, au Forum. Pour les plus jeunes, comme moi, c’est surtout l’occasion de connaître tout un pan de notre histoire musicale québécoise, car très peu de films ont traité du rock d’ici. En ce sens, Gerry remporte haut la main son pari.
Loin de la personnification
Un film biographique, surtout lorsque plusieurs des individus sont toujours vivants, comporte son lot de défis à relever, dont les costumes et les coiffures. Au-delà de la simple personnification, qui peu parfois frôler la caricature pure et simple, ce genre de film doit savoir nous transporter et nous faire oublier que nous avons devant nous Mario St-Amant (Gerry Boulet) ou Jonas (John McGale).
Gerry a su, en ce sens, choisir les bons acteurs – même si certains sont beaucoup moins connus – et construire une direction artistique cohérente et réaliste. Capucine Delaby campe une Françoise sublime et charmante et Mario St-Amant donne toute une âme à Gerry qui semble complètement l’habiter.Gerry reste tout de même un film très simple qui aurait peut-être eu avantage à creuser un peu plus la psychologie de ses personnages. On aurait voulu en savoir plus sur les tensions au sein du groupe, sur les problèmes d’alcool de Gerry ou sur ses rapports avec ses parents. Mais peut-être n’était-ce tout simplement pas le mandat que la scénariste Nathalie Petrowski s’était donné en s’attaquant à ce géant de la musique québécoise. Dans Le Nouvelliste du 6 juin, Breen Leboeuf semble en effet avoir la réponse à cette question : « Finalement, ils n’ont pas écorché de gens inutilement. Ça ne donne rien d’insister sur les facettes sombres de la personnalité de Gerry. Ce qui compte, je crois, c’est de donner un feeling du gars, de nous montrer ce qui faisait qu’il avait tellement de charisme et qu’il plaisait à tant de monde malgré ses maudites attitudes et ses faiblesses. ». On comprend alors très bien l’esprit du film Gerry et c’est dans cet esprit qu’il faut s’y rendre sans tarder.