Au cours des trois dernières années, le CLD local a dépensé plus de 105 000 $ en honoraires d’avocats pour répondre à une demande d’accès à l’information du Courrier de Saint-Hyacinthe. Ce dernier souhaitait obtenir différents documents, dont des relevés de cartes de crédit, des comptes de dépenses et le contrat de travail de l’ancien directeur général Mario De Tilly.
Le dossier s’est même transporté devant la Commission d’accès à l’information du Québec (CAI), appelée à décider de ce qui devait être rendu public ou pas.
Dans un jugement rendu le 15 avril, la CAI a en quelque sorte coupé la poire en deux, en accueillant partiellement la demande de révision formulée par LE COURRIER.
Si la Commission s’est rendue aux arguments du procureur du CLD en refusant de lever le voile sur la nature des dépenses personnelles des employés du CLD portées sur les cartes de crédit corporatives de l’organisme, sous prétexte qu’elles auraient toutes été remboursées par les principaux concernés, la Commission a forcé le CLD à révéler plusieurs éléments qu’il souhaitait soustraire à la vue du COURRIER.
C’est entre autres le cas du nom des titulaires des cartes de crédit du CLD et de la nature des dépenses de formation réclamées par les employés.
Dans sa réponse à la demande initiale du COURRIER, le CLD avait caviardé des dizaines de données et transactions se trouvant sur les cartes de crédit, dont toutes les dépenses de formation qui ont permis aux cadres et aux employés de se perfectionner aux frais de leur employeur entre 2008 et 2012. L’ex-directeur général Mario De Tilly a ainsi porté sur sa carte de crédit du CLD des frais engagés à l’École Nationale d’Administration publique, tout comme Nathalie Laberge, ex-directrice générale adjointe. D’autres employés de l’organisme ont fait de même pour des cours à l’Université de Trois-Rivières, à l’Université de Sherbrooke et au Cégep de Saint-Hyacinthe.
Le CLD remboursait même les dépenses reliées à l’achat de notes de cours et de matériel didactique de ses employés.
Brésil et dépenses à la carte
Les informations reçues grâce à l’intervention de la CAI confirment également des révélations faites par LE COURRIER au printemps 2013 dans une enquête qui a mis en lumière les problèmes de reddition de comptes et de gouvernance du CLD Les Maskoutains.
Ainsi, à un certain moment, pas moins de sept cartes de crédit corporatives étaient en circulation au CLD entre 2008 et 2012. Même l’actuel maire de Saint-Hyacinthe, Claude Corbeil, en possédait une du temps où il était commissaire agricole du CLD. Outre Mario De Tilly, on constate que le responsable des communications et des projets spéciaux du CLD, Donovan St-Hilaire, n’a pas ménagé sa carte corporative durant cette période, lui qui explique avoir toujours fait ce que ses supérieurs lui disaient de faire quant à l’utilisation de cette carte.
Parmi les dépenses de M. St-Hilaire qui retiennent l’attention, on remarque de nombreux déplacements à l’étranger, particulièrement au Brésil où l’organisme a effectué plusieurs voyages et missions de prospection de 2008 à 2012.
Au cours de l’année 2008, M. St-Hilaire y a même séjourné pendant près de deux mois et demi, dans le cadre d’un échange d’employés avec une organisation brésilienne, justifie-t-il. M. St-Hilaire aurait même suivi des cours à distance auprès d’une institution privée brésilienne, mais il assure qu’il n’a jamais profité de ses voyages d’affaires au Brésil pour poursuivre sur place cette formation qu’il assure avoir défrayée de sa poche.
Parmi les achats de billets d’avion effectués par le CLD à destination du Brésil, on retrouve en juin 2008 la trace d’un billet au nom d’André Barnabé, qui était à ce moment premier vice-président de la Cité de la biotechnologie. « Mon employeur [Boviteq] a payé et remboursé la Cité, s’est souvenu M. Barnabé. Semex a une filiale là-bas et au niveau agroalimentaire le Brésil n’a pas besoin de présentation. »
En plus de ce voyage au Brésil, M. Barnabé aurait aussi participé à un autre voyage du CLD, dans le cadre d’une mission économique en Italie.
Outre les voyages à l’étranger, on retrouve également sur les cartes de crédit du CLD la trace de certaines dépenses directement liées au fonctionnement de la Cité de la biotechnologie, un organisme privé apparenté au CLD Les Maskoutains.
C’est le cas des dépenses d’adhésion annuelle de la Cité à l’Association of University Research Parks (AURP). C’est cet organisme qui a décerné à la Cité de la biotechnologie le prix du meilleur parc technologique en émergence au monde en 2011. Même les frais d’hébergement de la délégation maskoutaine qui s’était rendue en Nouvelle-Orléans pour cueillir ce prix ont été assumés par le CLD et non la Cité.