Andréanne Dubois signe son tout premier roman avec Brisée, publié aux Éditions La Semaine. L’auteure enseigne le français au secondaire depuis dix ans. Toutes ces années, de nombreuses adolescentes se sont confiées à cette enseignante qui a découvert une réalité atroce : plusieurs d’entre elles avaient été violées ou connaissaient une amie qui avait subi un viol. Par peur, la plupart d’entre elles n’avaient jamais porté plainte. Les récits de ces adolescentes l’ont donc inspirée, en plus de la troubler et de l’attrister.
Pour réussir à rédiger ce récit, l’auteure s’est entretenue avec des intervenants des centres d’aide et de lutte contre les agressions à caractère sexuel (CALACS) ainsi qu’avec des agents de la Sûreté du Québec. Elle est aussi allée chercher des informations dans un CLSC et dans un centre d’aide aux victimes d’actes criminels (CAVAC) à Montréal. Son but : conscientiser ses lecteurs au fait qu’il y a encore trop d’agressions sexuelles et donner le courage aux adolescentes abusées de parler et de porter plainte contre leurs agresseurs. Pour les aider, Andréanne Dubois a créé un personnage féminin animé d’une volonté de fer : celle de traîner en justice ses violeurs et de refaire sa vie malgré le fait qu’elle souffre d’un grave traumatisme psychologique.
L’aspect le plus important du roman, selon moi, réside dans le fait que l’auteure démontre que les jeunes femmes qui portent plainte pour viol sont stigmatisées. Dans le cas de Julie, l’adolescente découvre que son amoureux et certaines de ses amies ne la croient pas. Ils l’accusent de mentir pour cacher le fait qu’elle aime le sexe brutal. Dans le roman, l’héroïne affronte donc les regards de ses pairs tout en maintenant sa version de l’histoire.
Les campagnes de dénigrement visant à accuser de mensonge les victimes de viol sont malheureusement d’actualité. À New York, à l’Université de Columbia, Emma Sulkowicz, une étudiante en arts visuels, est en ce moment victime de ce que l’on appelle le « slut-shaming » (stigmatisation des traînées). Le but est de faire en sorte que la victime culpabilise en sous-entendant que ses vêtements, son attitude ou son taux d’ébriété sont des facteurs légitimant son agression. En 2015, les femmes qui ont été violées peuvent subir de l’intimidation. Des propos haineux sur Facebook ou Twitter, des affiches ou photos dénigrantes collées un peu partout, des agressions verbales et physiques…
Andréanne Dubois est convaincue qu’il est primordial de sensibiliser la population pour combattre ce fléau qu’est le viol. Rappelons-nous qu’en 2009, au Québec, selon le site AgressionsSexuelles.gouv.qc.ca, 5 293 infractions sexuelles ont été enregistrées par les corps policiers. La plupart de ces infractions sont des agressions sexuelles commises par des hommes adultes (79 %) sur des victimes de sexe féminin (83 %). En raison de la honte et de la peur, bon nombre de femmes ou d’adolescentes ne dénoncent pas leur(s) agresseur(s). La lecture d’oeuvres fictives, telles que Brisée, est un bon moyen d’entamer une discussion sur le sujet. L’éducation est vitale pour prévenir la violence faite aux femmes. Et nous avons tous la capacité de tendre la main aux victimes de viol.
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