Lui-même touché par cette nouvelle réalité, le président de la Société de développement commercial du centre-ville (SDC), François Grisé, sonne l’alarme : le resserrement radical des normes en protection incendie fait mal dans un quartier qui a pris forme à une autre époque.
« Nous, on a à gérer un patrimoine immobilier qui date du 19e siècle. S’il faut tout mettre aux normes des années 2000, aussi bien tout raser et recommencer à zéro », argumente M. Grisé. Propriétaire de la microbrasserie le Bilboquet et de l’édifice voisin où loge le restaurant l’Espiègle, rue des Cascades, il n’avait jamais eu à se plaindre des inspections routinières de sécurité avant celle qui a eu lieu l’automne dernier dans la bâtisse du restaurant. Après les pompiers, ce sont les inspecteurs de la RBQ qui sont débarqués chez lui pour lui mettre sous le nez toutes sortes de nouvelles exigences.
Il donne l’exemple de la porte coupe-feu qu’il a dû faire installer pour remplacer celle qui donnait accès à la buanderie depuis son aménagement, en 1968 et qui, avant aujourd’hui, n’avait jamais été perçue comme un élément pouvant poser un problème de sécurité. « On nous fait faire des correctifs sur des choses qui existent depuis 50 ans, et l’on nous répond qu’il n’y a pas de droit acquis là-dessus. Pour l’Espiègle, la dépense devrait tourner autour de 5000 $, mais au Bilboquet, je m’attends à ce que ça grimpe à 15 000 $. Ailleurs au centre-ville, j’en connais qui en auront pour 50 000 $ et plus. »
La RBQ, explique-t-il, vise particulièrement les édifices commerciaux abritant un lieu public d’au moins 150 places assises et huit logements et plus aux étages. C’est précisément le cas du Bilboquet (200 places, huit logements aux étages), où il s’attend au pire lorsque les inspecteurs cogneront à sa porte. « L’assureur fait sa propre inspection des lieux, et lui me dit que tout est parfait. Il y a des gicleurs partout, il y a des extincteurs, il y a un système d’alarme relié à une centrale, des détecteurs de fumée, des détecteurs de chaleur, et même des caméras de surveillance. Mais on va quand même me demander d’installer un panneau électronique d’incendie, et c’est quelque chose qui coûte entre 15 000 $ et 20 000 $. »
François Grisé estime que les autorités devraient considérer l’âge des lieux visés par la réglementation et les sommes importantes consacrées à leur entretien. Il prône un assouplissement des règles pour les bâtiments anciens, ou de l’aide financière. « L’an passé, j’ai mis 50 000 $ dans la façade de l’Espiègle et cette année, je m’apprête à ajouter 100 000 $ au Bilboquet, avec une part de 50 000 $ de la Ville. Mais là, on m’annonce une dépense supplémentaire de 15 000 $ pour un panneau de contrôle. Quel signal envoie-t-on aux gens qui veulent rénover leur bâtiment? On leur dit : ne touchez pas à ça. Je suis d’accord avec la prévention, mais à un moment donné, il faut tirer une ligne. »
À la Ville de Saint-Hyacinthe, on reconnaît qu’après l’entrée en vigueur du schéma de couverture de risque de la MRC des Maskoutains, en 2012, les règles du jeu ont changé en matière de sécurité-incendie. « Avant, les inspections se faisaient sur demande, et maintenant, c’est systématique. Les normes pour les lieux publics ont toujours été là, mais elles n’étaient pas nécessairement appliquées », a indiqué la directrice du Service des communications, Brigitte Massé.
La conseillère municipale du district Cascades, Sylvie Adam, a reçu des appels de propriétaires mécontents des inspections, mais elle se range du côté de la Ville et de la RBQ dans ce dossier. « Il y a des exigences à respecter et pour moi, la sécurité des gens, ça passe avant tout », a-t-elle commenté.