C’est pourtant arrivé à la fin du mois de décembre dans le dossier de la biométhanisation, à la suite d’une plainte sans doute logée par un soumissionnaire un peu fru, dont on ignore l’identité. Onsait cependant que Construction Deric avait été le plus bas soumissionnaire (27,2 M$) au terme d’un premier appel d’offres. Jugeant cette offre trop dispendieuse par rapport au budget anticipé, la Ville avait décidé de reprendre l’exercice. Si bien qu’au terme du second processus, Filtrum Construction avait devancé Deric avec une proposition de 26,2 M$. On a cependant appris qu’entre les deux appels d’offres, la Ville aurait négocié elle-même l’achat d’équipement d’une valeur de 11,1 M$ auprès d’une entreprise québécoise agissant comme fournisseur exclusif de la technologie déployée à l’usine de biométhanisation.
On croit comprendre que cet engagement a été signé par le directeur général de la Ville, sans passer par une résolution formelle du conseil municipal. Le commissaire des Affaires municipales ne s’est pas attardé sur cet aspect précis du dossier et c’est bien dommage vu le caractère inusité de cette initiative administrative.La Ville de Saint-Hyacinthe aurait ensuite inclus cette proposition de 11,1 M$ à l’intérieur de la seconde version de l’appel d’offres. C’est cette façon de faire qui a été remise en question par le plaignant et qui a trouvé écho auprès du commissaire.
Pour faire une histoire courte, ce dernier estime que la Ville de Saint-Hyacinthe avait deux moyens pour arriver à ses fins en respectant les règles de l’art. Elle aurait dû mentionner la liste des équipements dont elle avait besoin et laisser le soin aux soumissionnaires de négocier les prix directement avec le fournisseur exclusif ou bien conclure un contrat de gré à gré avec ce fournisseur « après avoir mené des recherches sérieuses et documentées démontrant l’unicité de ce fournisseur ». Une fois l’équipement acquis, la Ville de Saint-Hyacinthe n’aurait eu qu’à lancer un appel d’offres pour trouver l’entrepreneur général apte à installer ces équipements.
La Ville a plutôt opté pour une formule que nous qualifions d’hybride et que se garde bien de condamner le commissaire. « Toutefois, seul un tribunal pourrait statuer sur la validité des dispositions prévues au devis d’appel d’offres (…) et sur le caractère dirigé de cet appel d’offres en faveur du dépositaire de cette technologie. »
Certes, il ne s’agit pas du scandale du siècle, mais plutôt d’une mise en garde. Un rappel qu’il y a des règles strictes à suivre en matière d’appel d’offres, même si le directeur général a mentionné à un journaliste de La Presse que la municipalité n’a rien à se reprocher puisqu’elle a agi dans l’intérêt des citoyens maskoutains et de tout le Québec. La preuve? La manœuvre de la Ville aurait permis à la Ville d’épargner environ 2,1 M$ considérant toutes les variables des deux appels d’offres. Drôle d’argument de défense.
Cela revient à dire que dans la vie, tous les moyens sont bons pour épargner de l’argent. Il est quand même assez rare que la direction générale se fasse prendre en défaut. Et même si la Ville exigera que cette opinion soit révisée, il n’est pas dit que Québec acceptera de le faire. On nous assure que le conseil municipal demandera par résolution au ministère des Affaires municipales de se rétracter, alors qu’on n’a pas cru bon demander aux élus de confirmer l’engagement pris par la Ville auprès du fournisseur unique des équipements. C’est assez particulier.
L’avis posé et modéré du commissaire des Affaires municipales égratigne peut-être quelque peu l’égo de M. Bilodeau, mais sans plus. Et qui sait, une révision de la décision pourrait peut-être faire plus de mal que de bien si jamais un autre commissaire décidait de s’attarder à d’autres aspects de l’appel d’offres. Il y a toujours un risque.
Dans les circonstances, il serait peut-être préférable de tourner la page, de prendre acte de ce rappel sans conséquence, d’avaler cette pilule et de mettre nos énergies ailleurs compte tenu des défis qui restent à relever pour que l’aventure de la biométhanisation soit un succès technologique, et surtout financier, pour les contribuables maskoutains, québécois et canadiens.