L’appétit pour ce débat ne semble pas très grand autour de la table du conseil, aucun élu n’ayant soulevé la question jusqu’ici. L’un d’eux ignorait même la présence du Christ en croix dans la salle. Interpellé sur la question, le maire s’est spontanément prononcé pour son maintien. « Il est bien là », a-t-il simplement réagi, présentant l’objet comme un « signe patrimonial ». C’était aussi l’argument de François Legault jusqu’à tout récemment. Notons que, contrairement à la disposition du Salon bleu, le crucifix maskoutain ne trône pas au-dessus du fauteuil du maire. Il est plutôt accroché au mur de l’autre côté de la salle, derrière les chaises réservées aux citoyens.
Ces derniers temps, ce sont surtout les questions d’urbanisme et d’environnement qui ont suscité l’intérêt du public pendant les séances du conseil. Aucun citoyen n’a évoqué le crucifix dernièrement. Bref, sa présence ne semble pas beaucoup déranger à l’hôtel de ville. « On va laisser ce débat à d’autres, on en a déjà assez comme ça », a lancé avec une pointe d’humour le maire Corbeil.
Tant qu’à parler de laïcité, soulignons également que le premier magistrat invite l’assistance à « un moment de silence » avant chaque début de séance publique. On ne parle donc pas d’une prière ou de toute autre référence religieuse.
Accroché en 1943
Rappelons tout de même l’origine du crucifix dans la salle du conseil, qui remonte à peu près à la même période qu’à l’Assemblée nationale, où il a été installé en 1938 sous le gouvernement de Maurice Duplessis. Chez nous, c’est en 1943 que des conseillers avancent cette idée, prétextant que « c’est la coutume dans notre province », selon ce qui est rapporté dans les archives du COURRIER. Cet épisode a d’ailleurs été retracé par Guy Desruisseaux dans une rubrique parue dans nos pages en novembre dernier.
Fait particulier, le maire de l’époque, T.-D. Bouchard, réputé anticlérical [opposé à l’influence du clergé dans les affaires publiques, selon le Larousse], affichait alors un avis divergent de ses collègues sur cette question. « Le bon Dieu, nous l’avons d’abord dans le cœur », avait-il tenté de faire valoir, ne voyant pas le besoin d’afficher l’objet au mur. Malgré la dissidence du maire, l’installation du crucifix a visiblement passé au vote puisqu’il est encore aujourd’hui présent à l’hôtel de ville de Saint-Hyacinthe.