Rappelons qu’à la base, ces citoyens en avaient contre la densité résidentielle que la Ville allait permettre dans ce secteur développé par le Groupe Robin, le long de l’avenue des Grandes-Orgues. Comme la procédure le permet en pareilles circonstances, ils avaient donc demandé et obtenu la tenue d’un registre grâce à des signatures recueillies et se dirigeaient ensuite vers la prochaine étape : un référendum de secteur portant spécifiquement sur cette modification de zonage. Nous étions alors en plein cœur de l’été 2020.
Entretemps, le promoteur a toutefois réussi à rassembler suffisamment de signatures de son côté pour faire aboutir une procédure de renonciation à un scrutin référendaire, une manœuvre rare dans le milieu municipal, mais tout à fait légale afin d’éviter la tenue d’un référendum, ce qui s’est effectivement produit.
Quel rôle pour la Ville?
Quelques mois plus tard, les citoyens restent avec un « goût amer » devant la tournure des choses. Mme Breton juge que la Ville a clairement pris parti en faveur du projet immobilier, et ce, depuis le tout début. « La Ville n’a pas joué son rôle de médiateur. Elle a fait le travail du promoteur », a-t-elle soutenu en entrevue au COURRIER.
Au départ, elle croyait simplement pouvoir réussir à trouver un terrain d’entente par le dialogue. « On n’a jamais voulu annuler le projet. On voulait juste qu’il ne se fasse pas au détriment du quartier », a-t-elle expliqué. Les inquiétudes des citoyens étaient en bonne partie concentrées sur la circulation qu’engendrera la création d’un quartier de plusieurs centaines d’unités résidentielles au bout de leur rue. Ils auraient aussi souhaité des bâtiments plus modestes, autant en envergure qu’en nombre d’étages.
Les personnes mobilisées ont aussi insisté pour dire « qu’il ne s’agit pas d’une protestation de type “pas dans ma cour”, […] mais qu’ils s’inquiètent plutôt du fait que le projet risque d’avoir des conséquences importantes sur la sécurité routière et la qualité de vie de leur quartier », est-il d’ailleurs mentionné dans la lettre ouverte de Mme Breton. « La Ville avait alors plusieurs solutions pour éviter de devoir faire un référendum, dont celui de modifier le projet pour le rendre acceptable », écrit-elle aussi.
Un référendum « volé »
Or, au final, ce référendum leur a carrément été « volé », accuse-t-elle aujourd’hui. Elle déplore en effet la façon dont le groupe de citoyens mobilisés a été traité par l’administration municipale. « Je croyais que ma Ville se devait de porter la voix des citoyens, mais j’ai plutôt senti qu’on voulait effacer ma voix », a-t-elle déploré, décrivant des procédures marquées par un manque de transparence. « C’était peut-être légal, mais pas nécessairement moral », lance-t-elle, tout en déplorant dans son texte une « attitude plus que questionnable » de la part de la Ville.
Lorsque la renonciation au scrutin a été confirmée par l’hôtel de ville, les citoyens avaient d’ailleurs soulevé que le calcul du nombre de signatures requises ne correspondait pas au nombre réel de résidents du quartier. Jamie Breton croit que le « gros bon sens » aurait pu guider la Ville pour arriver à des résultats différents, mais encore là, les citoyens ont eu le sentiment que tout était joué d’avance, en leur défaveur.
Depuis, une plainte a été déposée au Commissaire à l’intégrité municipale et aux enquêtes, et les citoyens songent même à intenter une poursuite contre la Ville. Même si Mme Breton se dit convaincue de pouvoir obtenir gain de cause devant un juge, le groupe n’a pas encore pris de décision à ce sujet.
Après toutes ces péripéties, Mme Breton dit tout de même garder espoir que des accommodements puissent être trouvés si chacun se rassoit à la table de bonne foi.