Du côté de la Maison La Passerelle, un centre d’hébergement en dépendance exclusivement adressé aux femmes situé à Saint-Simon, on souligne que les disparités de financement entre les différentes ressources ne datent pas d’hier, mais que la pandémie a exacerbé la situation pour plusieurs ressources. « C’est déjà difficile de garder une équipe stable alors que plusieurs intervenants quittent après un ou deux ans pour des raisons de salaire », note Amélie Lemieux, directrice de l’organisme.
Sans tomber dans un discours alarmiste, elle soutient tout de même que le gouvernement provincial devra agir rapidement s’il veut éviter que plusieurs ressources ferment effectivement leurs portes dans les prochains mois. « On survit grâce à la Subvention salariale d’urgence du Canada, mais elle finit bientôt. Il faudra que le ministre délégué à la Santé et aux Services sociaux, Lionel Carmant, fasse quelque chose rapidement, mais les canaux de communication avec le ministre sont bons, alors j’y crois », commente Mme Lemieux. Elle espère notamment un financement plus adéquat pour tous les organismes en traitement des dépendances pour assurer leur pérennité.
Elle milite également pour que les employés des ressources en traitement des dépendances soient vaccinés rapidement pour assurer leur sécurité. « En ce moment, on est au 9e rang des priorités… Mais si on montait dans la liste, ça sécuriserait l’équipe qui est au front depuis maintenant un an », soutient-elle, précisant que La Passerelle n’a fait face à aucun cas de COVID-19.
Service toujours essentiel
Lorsque la pandémie de COVID a frappé le Québec il y a un an, les maisons d’hébergement n’ont pas eu à fermer leurs portes, mais elles ont dû modifier plusieurs de leurs services, mal adaptés à cette nouvelle réalité. « À cause des enjeux de distanciation, on a diminué notre offre de 24 lits à 17. C’est beaucoup pour une petite ressource comme la nôtre », ajoute Mme Lemieux.
Du côté de la Maison L’Alcôve, la directrice générale Manon Desrosiers précise que la ressource a dû fermer pendant un mois au début de la pandémie pour arriver à adapter et à « individualiser » ses services. « Avant la pandémie, on avait par exemple un pot de beurre d’arachide partagé entre les personnes hébergées. Ça a nécessité beaucoup d’achats pour que tout le monde ait droit à son propre bac de nourriture en respect avec les nouvelles règles. »
De ses 16 lits, 12 peuvent encore être occupés et tous les services normalement offerts par L’Alcôve ont été adaptés pour respecter les directives sanitaires : plusieurs rencontres en personne ont dû être remplacées par des entretiens Zoom au cours de la dernière année.
Même si l’avenir de la Maison L’Alcôve ne semble pas menacé à moyen terme, Mme Desrosiers reconnaît que certains mois ont été plus difficiles dans la dernière année. « On a perdu des gens au tout début avec l’implantation de la Prestation canadienne d’urgence et l’offre de formation de préposé aux bénéficiaires, et les fêtes ont été un enfer parce que deux de nos employés ont contracté la COVID-19. Heureusement, il n’y a jamais eu d’éclosion chez nous. On s’en sort plutôt bien dans le contexte, mais ça a pris beaucoup de jus de bras pour y arriver! », soutient-elle.
Liste d’attente
Les deux ressources en traitement des dépendances ont en commun de faire face à une demande plus forte que jamais. « Ça n’a pas dérougi avec la pandémie, au contraire! On reçoit en moyenne de trois à cinq nouveaux appels par jour, mais comme nous sommes une ressource d’hébergement à long terme, nos 17 lits restent occupés longtemps avant de pouvoir accueillir une nouvelle personne », remarque Amélie Lemieux de La Passerelle.
En temps normal, L’Alcôve a une liste d’une dizaine de personnes en attente d’y être hébergées, mais celle-ci a explosé dans les derniers mois, atteignant les 40 noms. « La cause principale de cette hausse s’explique par le confinement qui a accentué les problèmes de consommation. Beaucoup de gens ont dit qu’ils ne faisaient plus que consommer à la maison », remarque Manon Desrosiers.
Si les cas de consommation d’alcool et de drogues étaient associés à la plupart des demandes faites dans la dernière année à L’Alcôve, une tendance semble se dessiner pour des cas de cyberdépendance après une année où beaucoup de gens sont passés en mode virtuel autant pour le travail que pour leurs interactions sociales.
« Même si les listes d’attente pour de l’hébergement sont longues, on invite les gens qui en ont besoin de continuer de nous appeler. On reste présents pour les écouter et les référer à d’autres ressources », conclut la directrice générale de L’Alcôve.