2 mars 2023 - 07:00
Vérifications diligentes
L’aéroport était géré de façon « archaïque »
Par: Sarah-Eve Charland
La corporation Aéroport de Saint-Hyacinthe assure avoir remédié à la gestion déficiente de l’aéroport de Saint-Hyacinthe soulevé dans le rapport d’Octant Aviation commandé par la Ville de Saint-Hyacinthe en 2021. 
Photothèque | Le Courrier ©��

La corporation Aéroport de Saint-Hyacinthe assure avoir remédié à la gestion déficiente de l’aéroport de Saint-Hyacinthe soulevé dans le rapport d’Octant Aviation commandé par la Ville de Saint-Hyacinthe en 2021. Photothèque | Le Courrier ©

Après des démarches auprès de la Commission d’accès à l’information du Québec, LE COURRIER a enfin obtenu le rapport des vérifications diligentes que la Ville de Saint-Hyacinthe avait commandé dans l’optique d’acheter l’aéroport de Saint-Hyacinthe, il y a un an et demi. À la lecture du document, on comprend davantage pourquoi la Ville n’a pas acheté les installations.

Saint-Hyacinthe avait fait appel à la firme Octant Aviation pour effectuer la vérification diligente. Ce rapport venait compléter ceux rédigés par la même firme lorsque la MRC des Maskoutains avait envisagé d’acquérir les installations. La Ville avait finalement renoncé à l’achat en septembre 2021.

« On trouvait que les travaux et les frais récurrents coûtaient trop cher. En discutant avec les personnes qui voulaient créer un organisme à but non lucratif, ils nous ont dit qu’ils pourraient faire les choses autrement. C’est pour ça qu’on a appuyé l’organisme », se remémore le maire de Saint-Hyacinthe, André Beauregard.

Dans ce rapport, la firme s’est concentrée sur la gestion administrative, les ententes avec les propriétaires des hangars et les partenaires, sur l’achat de carburant et les eaux usées. On y constate, entre autres, un manque de collaboration de l’ancien propriétaire, Gabriel Chartier. L’ensemble des recommandations ont été caviardées. Il nous a donc été impossible d’en connaître la teneur.

« L’actuel propriétaire a une tenue de livres et une gestion archaïques. Il n’existait aucun répertoire ou liste des propriétaires de hangars tenu par le propriétaire de l’aérodrome, des locataires d’espaces de stationnement, des clients qui ravitaillent, ni aucun décompte des mouvements aériens. Aucun renseignement n’est gardé ni archivé, tout est fait à l’ancienne, au mieux sur des factures manuscrites et sans système de gestion comptable », peut-on lire dans le rapport.

Entre autres, le propriétaire de l’école de pilotage Académie de l’aviation de Saint-Hyacinthe affirmait l’existence d’une entente sur l’exclusivité à la firme Octant Aviation, mais M. Chartier niait cette entente. La majorité des ententes ont été conclues de façon verbale. Deux hangars étaient même utilisés comme résidences principales, contrairement à ce qui est permis par le zonage, soit commerces aéroportuaires.

« On n’a pas d’expertise pour gérer un aéroport. Il aurait fallu embaucher quelqu’un pour le faire. Avec le recul, je crois qu’on a pris la meilleure décision », ajoute M. Beauregard.

La Ville a toutefois acquis le restaurant de l’aéroport. Pour le moment, le conseil municipal n’a pas encore pris de décision quant à son avenir. De son côté, la corporation Aéroport de Saint-Hyacinthe, un organisme à but non lucratif, a acheté les installations en octobre 2022. Le président, François Marquis, assure avoir remédié aux problèmes de gestion.

« La gestion, c’était pas mal sur la bottine. D’un, on a mis des professionnels là-dedans, notamment pour la comptabilité et la tenue de livres. Ce n’est pas vrai qu’on va gérer avec des contrats verbaux. On fait les choses dans le bon ordre. On a un conseil d’administration avec des gens d’affaires chevronnés. On veut aussi travailler avec le plus de transparence possible parce qu’on est redevables envers nos membres », affirme-t-il.

L’organisme a pu consulter avant l’achat le rapport commandé par la Ville et a lui-même produit ses propres vérifications diligentes. M. Marquis rappelle que l’organisme a acheté le terrain ainsi que les équipements, et non l’entreprise.

« En étant partie prenante, on avait intérêt à avoir les meilleures informations possible. On ne voulait pas se lancer à l’aveuglette. Ce document-là nous a permis de comprendre les points chauds et de vérifier la faisabilité du projet », poursuit M. Marquis.

Une section du rapport concernant la gestion des eaux usées a été complètement caviardée. Le président de la corporation souligne être en négociation avec la Ville de Saint-Hyacinthe et l’ancien propriétaire à ce sujet. Il ne s’agit pas d’un problème actuellement, mais cela pourrait le devenir en développant l’aéroport et ses activités. « En mettant l’aéroport aux normes, on s’attend à avoir plus d’activités économiques. Il faut être capables de supporter ça. »

Des travaux à l’étape des plans et devis

L’organisme à but non lucratif compte investir 7,4 M$ pour mettre aux normes d’aujourd’hui les installations. La corporation a pu mettre la main sur une subvention de 3,6 M$ du Programme d’aide québécois pour les infrastructures aéroportuaires régionales (PAQIAR) du gouvernement du Québec. Afin de respecter l’entente liée à la subvention, elle a cinq ans pour réaliser les travaux.

Dans un premier temps, la corporation s’est penchée sur les problèmes de gestion soulevés par les vérifications diligentes. D’autres problèmes ont aussi été réglés comme la requalification des extincteurs et le déplacement du réservoir de carburant qui se retrouvait dans la trajectoire des hydravions.

L’aéroport de Saint-Hyacinthe possède depuis quelques semaines un poste de ravitaillement en carburant opérationnel 24 h sur 24 h, tous les jours. En respect des normes environnementales du Québec, le poste est autonome et sans surveillance. Un point de presse se tiendra prochainement sur la mise en place d’un projet pilote à ce sujet.

« Pour les autres travaux, ils sont en préparation sur le plan de l’ingénierie. On a vu qu’il y a eu un boom des prix de construction après la COVID-19. On veut attendre que les prix descendent. On veut être un peu patients. L’échéancier pour la subvention est de cinq ans. Ça nous permet de nous préparer et d’aller chercher toutes les autorisations nécessaires. […] Il y a de belles choses qui s’en viennent. On a réussi à revirer ça de bord avec des bénévoles. On va avoir de belles nouvelles à annoncer », conclut M. Marquis.

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