Un dimanche soir dans un bar du centre-ville. La foule discute de tout et de rien pendant que la musique dépose une petite brume de fun dans la place pleine à craquer. Tapis dans les loges, nous discutons de tout et de rien, mais surtout de rien. Nous faisons le vide dans nos têtes pendant que nous enfilons nos chemises-uniformes à manches courtes. Dans la salle, les projecteurs réchauffent la scène et la musique fait monter la clameur.
Dans quelques instants, sous une lumière aveuglante, nous serons bien vulnérables devant un public impatient de voir un spectacle d’une heure trente… pour lequel nous n’avons rien préparé. C’est une autre belle soirée des Enfants du feu (EDF) au chic Zaricot de la rue des Cascades. Si je vous en parle, c’est que les EDF ont acquis une solide réputation dans le monde de l’improvisation au fil de leurs 20 années d’existence en accueillant et en développant des artistes de cet art éphémère parmi les plus créatifs et audacieux de la profession.
Cette création maskoutaine pure laine, née sur les planches du Zaricot, incarne comme nulle autre le grand mystère de l’improvisation théâtrale : ne rien préparer afin que tout puisse arriver. Jamais prêts, mais prêts à tout! À l’affût!
En déséquilibre, avec une rigueur slaque et un plaisir jalousement conservé afin de mieux le partager, les EDF ont chaque soir honoré les sages paroles du comédien Claude Laroche : « Saute et le filet apparaîtra », acceptant le danger, embrassant l’échec et n’hésitant pas à plonger jusqu’au fond du bide afin d’en extraire des pépites de beauté. C’est la dernière année des Enfants du feu. Plus que quatre spectacles avant qu’ils ne rangent leurs chemises. Voilà l’occasion de saluer une ultime fois ces artistes de l’éphémère dont vous pouvez être fiers.