Les conditions étaient telles que le Maskoutain n’a pas réussi à franchir le fil d’arrivée sous la barre des 3 h, une première dans son cas. Le détenteur du record Guinness du marathon le plus rapide en course partagée a dû se contenter d’un chrono de 3 h 4 m 16 s, lui qui visait plutôt un temps avoisinant les 2 h 45. Son record, réalisé en octobre, est de 2 h 49 m 26 s.
« Ça a été un beau défi physique », a-t-il confié en entrevue au COURRIER au lendemain de la course.
Onze duos ont participé au volet de course partagée du marathon de Boston et seulement neuf l’ont complété. Meneur à la mi-parcours, Julien Pinsonneault a finalement lutté pour la 2e place à l’arrivée. Le classement préliminaire place son duo avec May Lim au 3e rang pour le moment, même s’il a terminé avec un chrono identique à Ted Painter, à qui la 2e place a été octroyée. Le coureur de Saint-Hyacinthe est d’ailleurs convaincu d’avoir franchi le fil d’arrivée avant son rival, même si la fin de la course a été très serrée. Le classement fait présentement l’objet d’une révision.
Outre ce détail technique, Julien Pinsonneault a terminé la course avec détermination et fierté. « J’étais surtout content d’avoir donné un gros effort à la fin pour aller chercher le gars qui était devant moi. Je me disais aussi : c’est fait, mission accomplie! Ensuite, on cherchait juste de la chaleur pour nous réchauffer. »
Jusqu’à la mi-parcours, l’athlète maskoutain a conservé un rythme de course qu’il aimait malgré les conditions difficiles. Mais les choses se sont compliquées par la suite. « Tout allait bien jusqu’au 30e kilomètre. C’est devenu plus compliqué à partir de ce moment, avec mes jambes qui répondaient moins bien en raison du froid », a mentionné l’athlète de 30 ans, qui a souffert d’engelures après la course.
En conduisant le fauteuil KartUs, l’eau qui s’accumulait au sol l’éclaboussait. Le froid n’a pas aidé sa cause non plus. « À deux reprises, j’avais tellement froid que j’avais de la misère à retenir le fauteuil », a-t-il poursuivi.
Sous les encouragements constants de sa partenaire de course May Lim, Julien a fait preuve de ténacité et de persévérance pour aller jusqu’au bout et franchir le fil d’arrivée de cette course que son idole, le Maskoutain Gérard Côté, a remportée à quatre reprises dans les années 40.
« C’est un bel accomplissement pour nous. C’était aussi un rêve de pouvoir amener une personne à mobilité réduite à vivre une expérience comme celle-là. »
Le détenteur du record du monde au marathon chez les hommes, Eliud Kipchoge, est même venu saluer May Lim sur la ligne de départ.
« C’est un des six marathons majeurs dans le monde, a rappelé Julien. C’était impressionnant d’être là. Il y avait beaucoup de monde pour nous encourager sur le parcours. J’en avais mal à la tête au fil d’arrivée tellement l’ambiance était forte. »
Les participants de l’épreuve de course partagée ont pris le départ quelques minutes avant les coureurs d’élite, parmi lesquels se trouvaient plusieurs olympiens et champions du monde.
« Les meneurs chez les élites sont venus nous rattraper autour du 9e kilomètre. C’était spécial. Ce sont des gens qu’on voit à la télé. Quand on les a vu passer avec une cadence d’environ 2:53 / km, c’était juste magique. Ils n’avaient même pas l’air de forcer! »
Prochaine étape : en solo?
Au cours de la dernière année, la course partagée a amené Julien Pinsonneault à participer à ses tout premiers marathons, bien qu’il soit un coureur aguerri. Son expérience à Boston lui permet maintenant de rêver d’y retourner pour le compléter en solo cette fois, comme l’a fait Gérard Côté à une autre époque.
« C’est sûr que je voudrais le faire seul aussi. J’ai toujours voulu le faire en solo », mentionne celui qui n’a encore jamais réalisé un marathon seul, outre à l’entraînement.
Ce serait pour lui une occasion de suivre les traces de son idole et de se mesurer à ce coureur qui a marqué une génération. Quadruple champion du marathon de Boston, Gérard Côté avait réalisé son meilleur temps en 1943 avec un chrono de 2 h 28 m 28 s.
« Est-ce que je réussirais à battre son temps? Je ne le sais pas. Est-ce que je serais proche? Je l’espère », a lancé Julien au bout du fil, en réfléchissant à ce défi qui mijote dans son esprit.
Le coureur n’écarte pas non plus de tenter de retourner à Boston en duo, en espérant de meilleures conditions pour lui permettre d’offrir la performance qu’il se sait capable de livrer. « C’est comme si je n’étais pas rassasié », a-t-il dit. Il est vrai que, lorsqu’il est question de course à pied, Julien Pinsonneault a bon appétit. Et à l’entendre parler, il n’a pris qu’une première bouchée du marathon de Boston.