S’y perdre n’est pas si difficile d’ailleurs puisque côté signalisation, on semble avoir consacré plus d’attention à souligner l’apport inestimable des généreux et incontournables commanditaires qu’à orienter les visiteurs. Cette impression a peut-être été amplifiée par le facteur de la nouveauté et le fait que mon premier contact avec cette bibliothèque fraîchement inaugurée s’est déroulé incognito.
Je m’y suis rendu sans prévenir lundi après-midi, question de m’imprégner des lieux en tant que simple observateur maskoutain bien ordinaire. Il y avait d’ailleurs une bonne foule sur place pour un lundi, me suis-je dit. Des gens du troisième âge ainsi que de nombreux étudiants. C’est bon signe et on saluera au passage ces lieux qui invitent les générations à se côtoyer.
Bilan de cette petite visite impromptue? C’est vraiment superbe et il faut être de mauvaise foi pour prétendre le contraire. On a réussi à faire du neuf avec du vieux en rénovant et en agrandissant l’ancien siège social de la Fédération des caisses Desjardins Richelieu-Yamaska plutôt que de partir d’une feuille vierge.
À la lumière du résultat, et la luminosité est une grande force des lieux, il faut admettre qu’on a fait le bon choix en nichant cette bibliothèque au carrefour des rues Bourdages et Girouard. La vue sur la rivière Yamaska est exceptionnelle et la terrasse vaut à elle seule le déplacement, tout comme le coup d’œil à partir des postes de travail des deuxièmes et troisièmes étages à l’arrière.
Cette bibliothèque 2.0 invite à la détente, à la découverte, à la contemplation et au travail solitaire ou en équipe. Les laboratoires numériques et informatiques offrent aussi de belles possibilités d’apprentissages pour tous les âges. Et les livres? Ils sont là et en grand nombre un peu partout, sur des étalages et des rayons invitants. Ils ne sont pas envahissants comme ils donnaient l’impression de l’être à l’ancienne bibliothèque. Nous sommes ailleurs, les deux pieds dans la modernité et l’espace épuré. Mais en avons-nous pour notre argent compte tenu de l’investissement? Les comparables ne sont pas légion en semblable matière, mais je n’ai certainement pas honte de savoir que la Ville a dépensé plus de 30 M$ dans cette infrastructure culturelle de grande qualité. La valeur ajoutée saute aux yeux.
Malgré tout, je continue de penser que cette bibliothèque aurait été encore plus belle si on avait pu compter, comme d’autres municipalités avant et sûrement après nous, sur une juteuse subvention de gouvernement provincial, mais on ne peut pas refaire le passé. Juste essayer d’en tirer des leçons pour les projets à venir. Des subventions, il semble d’ailleurs que la Ville sera désormais plus encline à en demander. Elle n’aura pas le choix vu l’état de ses finances.
Une autre question plus pratique et philosophique s’invite aussi dans cette analyse. Avions-nous réellement besoin d’une telle bibliothèque à l’heure de la révolution numérique? Ayant un penchant favorable et un amour indéniable pour le papier, l’histoire et les histoires, je réponds par l’affirmative. Il ne faut surtout pas voir cette bibliothèque comme un endroit où s’entassent des livres.
Si je me fie à ce que j’y ai vu, elle a tout pour devenir un endroit animé, vivant et vibrant. Un lieu d’échanges et de créations. Un haut lieu culturel, une belle porte d’entrée sur le centre-ville et notre pôle culturel en devenir. La suite apparaît somme toute bien nébuleuse cependant. Les projets de transformation de l’église Notre-Dame-du-Rosaire et du couvent du Précieux-Sang nécessiteront des investissements estimés à 53,5 M$. Il faudra donc être patient ou faire des choix difficiles, dans la mesure où chaque projet d’envergure semble nécessiter des dépenses d’au moins 30 M$ à Saint-Hyacinthe ces dernières années. Pensons au Centre de congrès (40,7 M$), au prolongement du boulevard Casavant (39,5 M$), à la nouvelle bibliothèque (30,5 M$) ou à la promenade Gérard-Côté (33 M$).
Pour paraphraser le jeune Ricardo dans le film 1981, on dirait que la Ville de Saint-Hyacinthe commence à vivre au-dessus de nos moyens. Avez-vous, vous aussi, cette impression? On jase…