« Nous avons agi en bons pères de famille. Nous avons mis notre tête sur le billot et sommes sortis de notre philosophie d’entreprise, car nous savions que c’était la chose à faire », a déclaré le coprésident d’Aliments Putters, Daniel Jurkovic, en entrevue au COURRIER.
Alors que Les Aliments Whyte’s peinaient à sortir la tête de l’eau, noyés dans les difficultés financières, M. Jurkovic et ses partenaires d’affaires ont pris les choses en main pour éviter que le bateau ne coule, créant une catastrophe pour l’industrie québécoise. La plus grande crainte d’Aliments Putters était que les Américains se mettent le nez dans les affaires des Aliments Whyte’s et viennent chambouler le fragile équilibre de cette industrie au Québec.
Forte de sa gestion serrée et de sa présence sur le terrain ainsi que de sa petite taille, lui permettant de se réajuster rapidement, Aliments Putters a entrepris des négociations avec Les Aliments Whyte’s dès l’hiver dernier. Son premier objectif était de s’assurer que les travailleurs étrangers seraient à pied d’œuvre dans les champs pour la courte saison des récoltes de la mi-juillet à la fin août. Pour ce faire, toutes les démarches devaient être complétées sans délai avant février. Puis, alors que les chauds rayons du soleil sortaient le bout de leur nez et que les concombres poussaient à vitesse grand V, Aliments Putters a acheté 100 % de la production québécoise. Auparavant, elle en utilisait 70 % et Les Aliments Whyte’s, 30 %. La production québécoise devrait permettre de combler 80 % des besoins d’Aliments Putters et l’autre 20 % sera obtenu grâce aux récoltes ontariennes. Aliments Putters ne dispose pas de ses propres terres en culture et s’alimente auprès de producteurs indépendants.
Tout était aussi prêt pour transformer les concombres en de délicieux cornichons à l’automne puisqu’Aliments Putters s’était aussi évidemment assurée d’acheter tous les équipements de l’usine des Aliments Whyte’s à Laval, fermée depuis le 30 décembre 2022. Il ne restait plus qu’à mettre la main sur l’usine de Saint-Louis et ses équipements et à y transférer ceux de Laval, ce qui a été fait sans perdre une seconde au cours des derniers jours.
Maintenant, Aliments Putters doit accorder ses flûtes pour redémarrer la machine dans les prochaines semaines. Malgré les démarches administratives considérables, déjà cinq employés comptant 30 ans et plus d’expérience chez Les Aliments Whyte’s s’affairent à orchestrer chaque petit détail. Une trentaine d’employés devraient rejoindre les rangs d’ici quelques semaines et retrouver leur poste dans la fameuse « shop à concombres » de Saint-Louis.
Mais ce n’est pas la fin de l’histoire. Aliments Putters voit encore plus grand et investira de 1,5 M$ à 2 M$ en équipements et lignes de production à l’usine de Saint-Louis d’ici 12 à 18 mois pour la mettre à la fine pointe de la technologie. Une quinzaine de nouveaux employés pourraient alors être accueillis.
De l’ombre à la lumière
Mais quelqu’un ici avait-il déjà entendu parler d’Aliments Putters et vu ses pots de cornichons sur les tablettes des épiceries? Il semblerait que non, à moins d’être un fin observateur et d’avoir ciblé les quelques propriétaires d’épiceries amateurs des produits Putter’s qui profitent de leur libre arbitre pour en commander. En fait, les produits Putter’s ne sont disponibles dans aucune grande surface ou aucun grand détaillant au Canada. Par l’entremise de grands clients et sous d’autres noms, ils se retrouvent toutefois dans les épiceries sous d’autres marques et ils se rendent même jusqu’en Europe et en Australie.
Mais ce n’est pas le secret le mieux gardé. Saviez-vous que déjà en 1955, avant la création d’Aliments Putters, la famille derrière l’entreprise fournissait le célèbre restaurant Schwartz’s de Montréal?
Mais l’entreprise pourrait d’ici un mois revoir la commercialisation de ses produits. Alarmés de la faillite des Aliments Whyte’s et voyant qu’Aliments Putters n’achetait pas la marque Coronation, des distributeurs et épiciers ont supplié Aliments Putters de mettre ses propres produits sur les tablettes, ce qu’elle a accepté, mais en continuant de prioriser ses gros clients. À suivre…