À commencer par le communiqué de presse de l’ITAQ annonçant l’arrivée d’une directrice générale par intérim, alors que le départ de l’ancienne titulaire, Aisha Issa, était passé sous silence. J’écris départ, à défaut de pouvoir employer avec certitude les mots « démission », « renvoi » ou « départ négocié d’un commun accord ». Dans ce communiqué de presse publié par la direction de l’ITAQ, le nom de Mme Issa n’est pas évoqué. Pas un remerciement pour les quelque 30 mois qu’elle a consacrés à cette institution ni de formule convenue du style : merci et bonne chance pour la suite. Si on avait voulu alimenter la machine à rumeurs, on n’aurait pu trouver mieux que ce silence qui en dit long. Il traduit un malaise certain. Et ce dernier est alimenté par le silence de tous les principaux concernés. Le président du conseil d’administration de l’ITAQ, Alain Chalifoux, a décliné notre demande d’entrevue et Mme Issa n’avait pas encore donné suite à notre demande hier après-midi.
C’est finalement par l’envoi d’un second communiqué, en fin d’après-midi mercredi, que le CA a brisé le silence.
Cette curieuse histoire a pris une tournure encore plus bizarre après la publication d’un reportage dans un journal de la région de La Pocatière sur les dessous de ce changement de garde et un soi-disant climat tendu entre la directrice générale et le président du conseil d’administration.
Ce reportage reposait en partie sur une lettre anonyme envoyée à la direction du journal. Mais ce que cette lettre ne dit pas et ce que plusieurs personnes dans l’entourage de l’ITAQ m’ont confirmé ces derniers jours, c’est que les tensions étaient palpables depuis longtemps à l’interne. Pas seulement au CA. Il semble aussi que le départ de l’ancienne directrice générale ait été bien accueilli à l’interne, où plusieurs personnes avaient peu d’atomes crochus avec Mme Issa, une néophyte dans le milieu de l’éducation.
Cette inexpérience au niveau de la gestion d’un établissement de formation comme l’ITAQ et dans la gestion des ressources humaines qu’il commande pourrait-elle expliquer en partie de nombreux mouvements de personnel qui auraient été observés à l’ITAQ ces deux dernières années? La question semble pertinente.
Au moment d’annoncer sa nomination à l’été 2021, le ministre de l’Agriculture, André Lamontagne, avait pourtant pris soin de mettre en relief « la longue feuille de route » de Mme Issa dans le domaine.
Dans les notes biographiques du Secrétariat aux emplois supérieurs, cette longue feuille de route de Mme Issa saute aux yeux, mais dans des postes qui ont très peu à voir avec l’administration d’un collège, la formation agricole et le plancher des vaches. À tout prendre, ses expériences professionnelles passées cadrent davantage avec le poste qui l’attend de chercheure invitée à l’Institut de tourisme et d’hôtellerie du Québec (ITHQ). Un poste pour lequel elle renonce aux deux dernières années et demie de son mandat de cinq ans renouvelable à l’ITAQ. Ce poste à l’ITHQ représente-t-il une promotion alléchante, une porte de sortie ou une réorientation de carrière? Votre réponse est aussi bonne que la mienne. Cette bizarrerie révèle selon moi un problème de gouvernance qui découle de la création même de l’ITAQ en 2021.
On se souviendra que c’est le ministre de l’Agriculture qui avait annoncé le 23 juin 2021 la nomination de Mme Issa, ainsi que la composition du tout premier conseil d’administration de l’ITAQ, formé de huit membres indépendants. Tout ce beau monde est arrivé en même temps et a dû apprendre à se connaître et à travailler ensemble. Ce premier conseil n’avait donc pas eu son mot à dire dans la sélection de Mme Issa.
Dans ce contexte particulier, faut-il s’étonner que des tensions aient pu survenir entre la direction générale et le conseil d’administration? Qui était imputable de quoi et à qui au final?
Il reviendra maintenant au conseil d’administration de bien faire ses devoirs et de procéder à un exercice de sélection rigoureux. Fort de cette expérience, je pense que le CA a une meilleure idée du profil de DG à rechercher ou à éviter.