Après l’avoir soulevé à deux reprises dans sa carrière comme joueur, en 2009 et en 2010, le Maskoutain a pu renouer avec le trophée, cette fois en tant qu’entraîneur de la ligne à l’attaque. Et la fierté dans sa voix témoigne de l’importance que ce titre a pour lui et pour l’organisation des Alouettes.
« [Cette Coupe Grey], elle a nécessité beaucoup plus de travail, de patience et de persévérance [que les deux premières que j’ai soulevées comme joueur], souligne-t-il en entrevue téléphonique avec LE COURRIER. J’ai 40 ans, ça fait 15 ans que je suis avec les Alouettes et ça faisait 13 ans qu’on n’avait pas eu de championnat. Ça représente le tiers de ma vie, comme joueur et nouvellement comme entraîneur, pour pouvoir vivre cette opportunité-là et cette réussite-là. Aller à la Coupe Grey, ça ne s’était pas présenté à nous depuis 2010, donc c’est énorme. »
Contre toute attente, les Alouettes ont battu les Blue Bombers de Winnipeg 28 à 24 grâce à une poussée offensive incroyable – et audacieuse – dans la dernière minute de jeu du match. Après avoir réussi un 3e essai et 5 verges sur un jeu aérien dans les zones profondes, le quart-arrière Cody Fajardo a enchaîné avec une passe précise à Tyson Philpot dans la zone des buts, sur le jeu suivant, pour inscrire le touché victorieux avec seulement 13 secondes à écouler.
« L’appel de jeu a été impeccable en fin de match pour parvenir à ce résultat-là », affirme Brodeur-Jourdain.
« [Lors du 3e essai et 5 verges], c’est un jeu risqué que Jason Maas a appelé et que je n’aurais pas eu – excusez-moi l’expression hispanophone – les cojones d’appeler », a même reconnu l’ancien joueur de centre.
Stoïque jusqu’à la fin
Malgré les hauts et les bas vécus par les joueurs des Alouettes durant cette finale, Luc Brodeur-Jourdain ne s’est pas laissé prendre par les émotions au cours du match.
« J’étais extrêmement stoïque, indique-t-il. En tant qu’entraîneur, tu es toujours en train de penser au prochain jeu. Cette année, j’étais appelé à faire le design et le choix de jeux au sol. Étant donné que j’avais cette tâche-là, je voulais toujours avoir la solution immédiate si Jason Maas se tournait vers moi. J’étais toujours en train de penser à la suite. Si on a un premier essai, qu’est-ce qu’on appelle comme jeu s’il me demande ce que je veux? On dirait que tu ne te permets pas de vivre autant les hauts et les bas durant la rencontre. »
Même lorsque le match s’est terminé, il a mis un moment à laisser l’euphorie et la frénésie s’emparer de lui.
« Quand on a gagné, je me suis retourné et j’ai serré la main à un collègue. […] Mais à la seconde où j’ai mis le pied sur le terrain, c’est comme si j’étais redevenu un joueur et c’est là que les émotions sont embarquées et que j’ai vraiment célébré. »
Quelques instants plus tard, le Maskoutain a pu vivre un moment privilégié en soulevant la Coupe Grey avec Thomas (photo à la Une du journal), le fils de sa conjointe. L’adolescent, qui est atteint d’un trouble du spectre de l’autisme, avait été intégré à l’entourage de l’équipe à la fin de la saison et il a pu vivre cette conquête aux premières loges.
« Thomas a été un assistant coach avec nous dans les quatre derniers matchs de la saison. Même à la veille de la Coupe Grey, il était là pour faire le walk through, il agissait à titre de joueur de ligne défensive comme je le faisais. Il faisait partie de tous les meetings et il faisait même des commentaires sur comment on pourrait rendre nos jeux meilleurs. Ça fait partie de la dynamique avec Jason d’intégrer la famille parce que ce sont nos proches qui vivent le plus de sacrifices par rapport à nos absences durant la saison. »
Bref, une belle preuve d’humanité dans le vestiaire des Alouettes malgré l’ampleur du moment.