Ce sont des questions délicates, mais qu’il faut se poser à l’ère de la désaffection des églises et du fardeau financier qu’elles représentent dorénavant pour nombre de paroisses aux finances précaires. Et plus l’on creuse ces questions sensibles et plus l’on trouve des points de vue divergents selon les intérêts de chacun.
Les lecteurs du COURRIER ont pu le constater en parcourant notre édition du 4 janvier. L’évêché et la Ville de Saint- Hyacinthe, par l’entremise du vicaire général Serge Pelletier et du maire André Beauregard, présentent des positions opposées, du moins pas forcément complémentaires.
En entrevue éditoriale, questionné par l’auteur de ces lignes, M. Beauregard n’a pas caché sa préoccupation quant au sort qui attend les églises de sa ville. Cette dernière confirmait d’ailleurs il y a quelques semaines s’être entendue avec la Paroisse Saint-Joseph pour acquérir l’église du même nom afin de la démolir et de la remplacer par une nouvelle école primaire. Aucun prix n’a été évoqué publiquement jusqu’ici, mais il est facile de comprendre que la Ville souhaite qu’il soit le plus petit possible.
D’autant plus qu’il y a quelques mois, et c’était aussi l’objet d’un reportage dans notre première édition de l’année, la Municipalité de Saint-Barnabé-Sud s’est fait offrir sur un plateau d’argent, lire sans frais, l’église du village afin de consolider sa nouvelle vocation de centre communautaire. Le maire Beauregard étant un lecteur avisé du COURRIER, gageons qu’il aura pris en note de cette transaction tout ce qu’il y a de catholique.
« Puisque c’est la population qui a contribué à financer leur construction, je considère qu’elles [les églises] appartiennent à la communauté. Il n’y a pas de raison de les acheter à fort prix », a mentionné le maire dans son entrevue de fin d’année.
Vous aurez compris qu’il prêche pour sa paroisse, davantage que pour les paroisses et les fabriques du diocèse. Le vicaire général a un tout autre son de cloche.
« On entend des gens dire que l’église appartient aux citoyens, mais ce n’est pas tout à fait vrai. Les citoyens, en général, ne défraient pas ou n’investissent pas dans les bâtiments religieux. C’est sûr que le bâtiment fait partie du décor, mais tant qu’il n’y a pas de vente, l’église n’appartient pas aux citoyens. Ce n’est pas un bien municipal à moins que l’ensemble des citoyens soit d’accord à investir […]. » Il n’a pas tort.
Question d’ajouter une couche de réflexion, dans le même reportage, la directrice générale adjointe de la Ville de Saint-Hyacinthe, Brigitte Massé, faisait valoir que « les églises ont été construites avec la dîme, avec l’argent des citoyens ».
Des citoyens qui étaient, il faut bien le rappeler au moment des dites constructions, des citoyens et des paroissiens pratiquants. Qui a tort et qui a raison? Un peu tout le monde, si vous voulez notre avis. C’est d’ailleurs vers une recherche de dialogue et de compréhension mutuelle qu’il faudra tendre pour réinventer nos églises et leur assurer des lendemains retentissants et utiles pour la collectivité. On ne devrait pas laisser à cinq ou six paroissiens regroupés au sein du conseil de fabrique, ni même à un seul évêque, le soin de décider quelle église doit être sauvée ou sacrifiée, en fonction des finances des paroisses respectives.
Pas plus qu’il ne serait souhaitable de faire trancher la question du sort à réserver aux bâtiments religieux, églises ou couvents par une douzaine d’élus municipaux. Plus il y aura de gens intéressés à la table, non pas du Seigneur, mais de concertation, et plus on s’assurera que les choix auront du sens, collectivement parlant. À savoir si les administrations municipales ont leur mot à dire au sujet de l’avenir des églises, les lecteurs qui ont pris la peine de répondre à notre question Internet de la semaine dernière se sont montrés divisés, mais majoritairement favorables. Sur quelque 200 répondants, 56 % ont répondu par l’affirmative.
Encore faut-il que ces administrations aient quelque chose de pertinent à dire et à proposer et surtout un interlocuteur intéressé à dialoguer. En tout respect, et pour l’amour de Dieu, c’est à souhaiter.