Depuis ce printemps, des religieuses des Sœurs de la Charité et des Sœurs de Sainte-Marthe ont élu domicile à la résidence Les Jardins d’Aurélie, une résidence privée du Groupe Santé Valeo, aux côtés des Sœurs de Saint-Joseph et des Sœurs adoratrices du Précieux-Sang qui s’y trouvaient déjà.
C’est à l’initiative des bonnes Sœurs de Saint-Joseph que cette ressource dédiée, installée dans la cour arrière de l’ancien monastère des Adoratrices, entre les rues Girouard et Dessaulles, a été construite il y a 10 ans à la suite de la vente de la maison-mère trop grande et désuète des Sœurs de Saint-Joseph.
Après que les congrégations religieuses de Saint-Hyacinthe se sont concertées, les Adoratrices s’étaient ralliées au projet de relocalisation de leurs consœurs en offrant généreusement une partie de leur propriété pour permettre la construction des Jardins d’Aurélie, nom donné en l’honneur de leur fondatrice.
Les Sœurs de Saint-Joseph ont donc été les premières à s’y installer, suivies des Adoratrices, à la fermeture de leur monastère à l’été 2018. Avec l’arrivée récente des Sœurs de la Charité et de Sainte-Marthe, l’endroit affiche presque complet.
En tout et partout, elles sont aujourd’hui près de 130 religieuses à se partager des studios confortables ou, selon leur état de santé, l’une des chambres individuelles à l’infirmerie. Sur place, ce sont les Sœurs de Saint-Joseph qui sont les plus nombreuses avec 92 représentantes. Suivent dans l’ordre les Adoratrices, au nombre de 15, les 8 dernières Sœurs de Sainte-Marthe et 7 Sœurs de la Charité. Les chambres sont à des années-lumière des petites cellules exiguës occupées jadis par les Adoratrices à leur ancien monastère.
« L’adaptation aux autres et à la vie communautaire se vit sereinement et dans le respect de nos spécificités », assure Sr Jocelyne Mainville, supérieure des Sœurs adoratrices du Précieux-Sang, une congrégation reconnue comme étant la première communauté contemplative au Canada.
Il est prévu qu’une douzaine d’autres sœurs de la Charité rejoignent ce grand groupe d’ici 2026, au rythme des places disponibles. Ces dernières ont signé une promesse d’achat avec le Groupe Robin pour la vente de leur maison-mère de l’avenue Bourdages Sud en 2016 et doivent casser maison d’ici deux ans.
Pour l’instant, elles accueillent toujours dans leur maison-mère une douzaine de Sœurs bénédictines qui prendront elles aussi la direction des Jardins d’Aurélie le moment venu. Mais déjà, les Sœurs de la Charité se préparent en conséquence. Le 5 avril, elles ont annoncé le licenciement collectif d’un groupe de 25 employés rattachés à leur maison-mère, des mises à pied qui seront effectives le 30 juin.
Puisque le transfert qu’elles projetaient avec les Sœurs de La Présentation de Marie de Saint-Hyacinthe est tombé à l’eau en même temps que le projet de construction d’une nouvelle résidence, les Sœurs de la Charité et de Sainte-Marthe, avec qui elles cohabitent depuis 20 ans sur l’avenue Bourdages Sud, ont trouvé un joli plan B aux Jardins d’Aurélie. C’est de là que les Sœurs de la Charité assisteront à la transformation de leur maison-mère et à la nouvelle vocation qu’entend donner la Ville de Saint-Hyacinthe à leurs précieuses terres de la Métairie.
Rappelons qu’à l’automne 2021, les élus maskoutains ont annoncé leur intention d’y aménager un nouvel espace vert au bénéfice de la population. Mais rien n’a véritablement bougé depuis, à part les religieuses. À écouter la supérieure des Sœurs de la Charité, Sr Diane Beaudoin, la reconversion des terres de la Métairie est un « beau projet » qu’elles endossent pleinement. Oubliez l’idée d’une expropriation, elles ne vont pas jouer les trouble-fêtes. « Il n’y a aucune résistance de notre part, nous attendons que la Ville se décide. »
Une famille unie et élargie
Pour l’ensemble des religieuses encore très actives de ces quatre communautés regroupées, cet atterrissage en douceur aux Jardins d’Aurélie se veut une ultime escale. Des soins de fins de vie y sont offerts par du personnel dédié en nombre suffisant, plus ou moins 70 employés, et prêt à les accompagner jusqu’à la fin, témoigne Marie-Josée Cyr, directrice des opérations de la résidence.
Même si elles savent qu’elles sont aujourd’hui des objets de curiosité pour la jeune génération, les religieuses ne sont pas déprimées ou malheureuses ni coupées du monde extérieur pour autant, assurent les supérieures des quatre congrégations-amies qui ont accepté de s’entretenir avec LE COURRIER afin de partager leur vécu et témoigner d’une seule voix. « Les œuvres de chaque congrégation vont nous survivre et sont entre bonnes mains, ont-elles partagé au cours de cet entretien solennel. Il y a un temps pour chaque chose, vous savez, et la vie religieuse est appelée à se transformer, à évoluer à l’image de la société. Mais nous avons chacune accompli notre mission et nous pourrons partir en paix le moment venu. »
L’esprit de communauté, l’entraide et la bonne humeur sont omniprésents à l’intérieur de la résidence où les sœurs cohabitent dans l’allégresse, et ce, peu importe leur origine, leur congrégation ou leur uniforme. « Nous sommes devenues par la force des choses une grande famille élargie, des femmes pour qui la vie en communauté est primordiale. Nous sommes faites pour nous entendre. Nous avons toutes le même Bon Dieu et nos valeurs sont communes. »
Sont-elles amères de devoir gérer la décroissance et même l’extinction de leur communauté comme dans le cas des Sœurs de Sainte-Marthe? « Il n’y a pas d’amertume ici, répondent-elles en chœur. Nos sœurs sont sereines et épanouies. »
Comme nous avons été à même de le constater en faisant la tournée des lieux et en partageant un repas avec elles, une belle camaraderie saute aux yeux et suinte sur tous les étages alors que nous avons même eu la chance de pousser la note avec Madeleine et Gabrielle, des Sœurs de la Charité, les deux sœurs religieuses de Charles-Auguste Gauvin, qui fut conseiller et maire de l’ex-municipalité de La Providence pendant plus de 25 ans. Que de la joie de vivre et de la communion dans les deux chapelles de l’établissement et dans la grande salle à manger où elles se retrouvent toutes ensemble trois fois par jour.
« Se rassembler dans un même lieu, sous un même toit, à cette étape de nos vies, c’est plein de sens, de bon sens. Pour veiller à l’accomplissement de nos communautés, s’entraider était la chose à faire. Il n’aurait servi à rien de s’isoler et de dépérir chacune de notre côté. Aussi bien vivre en communauté et dans un environnement religieux qui nous ressemble et nous rassemble afin de marcher toutes ensemble vers le Seigneur », conclut Sr Maryse Gauvin, supérieure des Sœurs de Saint-Joseph dans un dernier élan de sagesse.