Je vais mettre de côté nos dossiers et débats locaux pour me permettre un rare regard sur ce qui se passe aux États-Unis. Petite mise en contexte. Sachez que j’ai l’habitude, avant mes vacances, de m’arrêter à la librairie du coin pour m’acheter ce que j’espère être un bon livre. Mon indispensable adjointe m’ayant fortement conseillé la lecture de La version qui n’intéresse personne de l’auteure Emmanuelle Pierrot, aux éditions Le Quartanier, une fois rendu devant les nouveautés, j’ai plutôt failli me laisser tenter par Les Disgracieuses, chez Québec Amérique, de la journaliste Claudia Larochelle et ses récits qu’on dit liés par le doute, la persévérance et le désir d’émancipation. Voilà des idées qui me rejoignent et j’ai toujours eu un faible pour les journalistes qui maîtrisent aussi bien l’enclume que la plume. Mais comme j’ai le privilège d’écrire, d’être publié et surtout d’être lu chaque semaine depuis 32 ans, contrairement à bien des auteurs de talent, que pourrais-je bien vous dire d’intéressant que vous ne savez déjà? Je suis un livre ouvert et mon métier consiste déjà à vous raconter des histoires vraies et souvent touchantes. Jamais ordinaires. Votre histoire.
Étonnement, je suis ressorti de la libraire les mains vides. Est-ce à dire que je ne lirai rien de divertissant ces prochains jours? Bien au contraire. Je compte même lire beaucoup, mais je vais mettre de côté la politique locale, les arbres mal placés, les caisses pas populaires, les éoliennes et même le racisme (!) qui se propagerait à Saint-Barnabé-Sud pour élargir mes horizons. Au lieu d’ouvrir un livre de fiction, je compte m’abreuver de lectures où la réalité la rattrape et la dépasse.
Je vais donc lire des articles de journaux qui traitent de politique américaine et des rebondissements de la course à la présidence. Je regrette seulement de ne pas être plus habile avec la langue de Bruce Springsteen pour pouvoir dévorer les textes du New York Times ou du Washington Post. Je dois prendre le blâme pour cette lacune plutôt que de jeter la pierre à Lionel Manseau ou Michel Gauthier, mes anciens profs d’anglais à la polyvalente Robert-Ouimet. Je vais donc me rabattre sur l’ami Yves Boisvert de La Presse et quelques autres collègues de talent dans les médias nationaux.
Sans contredit, la campagne électorale américaine est inédite et marque déjà les esprits. On a l’impression que l’histoire s’écrit sous nos yeux tellement elle est spectaculaire, voire imprévisible. Il n’y a pas une série sur Netflix ou un polar pour accoter ce qui se déroule aux États-Unis. La campagne qui se joue sous nos yeux entre démocrates et républicains est le thriller de l’été. Et tous les ingrédients sont réunis pour nous tenir en haleine. Selon nos préférences, il y a des bons et des moins bons, de l’action en masse, des complots, des accusations, des procès, des trahisons, des mensonges, des alliances, du sang qui coule et un long suspense qui nous mènera jusqu’en novembre.
Ce suspense haletant a été rehaussé par le désistement de Joe Biden, président sortant en perte d’autonomie qui a vu son sacrifice comme le moyen ultime de sauver la démocratie. Rien de moins. Après une performance pitoyable au débat télévisé du 27 juin et l’attentat raté contre Donald Trump, il fallait ce coup d’éclat présidentiel pour espérer renverser la vapeur. Le défi est de taille pour la vice-présidente Kamala Harris. Si sa candidature se confirme comme prévu, la suite et la bataille s’annoncent corsées dans ce pays assis sur un véritable baril de poudre et à la mèche plutôt courte. Dieu seul sait maintenant ce que nous réserve la suite. C’est palpitant et oh! combien épeurant, quel que soit le résultat à venir. À la dernière défaite républicaine, on a frôlé l’insurrection et l’anarchie. On en arrive même à se demander ce qui est le plus à craindre entre une victoire de Trump ou sa défaite. Quoi qu’il en soit, le danger semble à nos portes.
Ne vous avais-je pas promis un éditorial plus léger, mais pas tant que ça?