1 août 2024 - 03:00
Histoire d’ici
Souvenir de 1921 : le curé Napoléon Bélanger attaqué par un paroissien
Par: Le Courrier
L’abbé Napoléon-Paul Bélanger vers 1900. Photo Centre d’histoire de Saint-Hyacinthe, Fonds CH001, Séminaire de Saint-Hyacinthe

L’abbé Napoléon-Paul Bélanger vers 1900. Photo Centre d’histoire de Saint-Hyacinthe, Fonds CH001, Séminaire de Saint-Hyacinthe

Ce qui s’est produit au presbytère de Saint-Dominique, le 15 décembre 1921, est certainement un cas rarissime, ce qui explique que cette affaire a fait beaucoup de bruit à l’époque.

Le curé Napoléon Bélanger est attaqué violemment par un ancien citoyen de Saint-Dominique qui habite depuis peu à Sainte-Cécile-de-Milton, mais qui possède toujours une terre dans son ancien patelin. Le dimanche précédent, Arthur Courtemanche envoie sa femme payer le banc, la dîme et les frais du bedeau à Saint-Dominique.

Par étourderie, le curé accepte l’argent, mais se rend compte, après coup, que la famille, ne tenant plus feu et lieu à Saint-Dominique, ne peut plus avoir de banc dans l’église. Il retourne donc la somme correspondant au prix du banc à Courtemanche. En recevant la lettre, Courtemanche, furieux, se rend immédiatement à Saint-Dominique. Chemin faisant, il rencontre le pauvre Toussaint Gatien, qui avouera, plus tard, qu’il se serait bien passé de cette affaire…

Courtemanche annonce à Gatien qu’il doit parler au curé et qu’il a besoin d’un témoin. Il lui promet que la rencontre se passera tranquillement. Un peu à contrecœur, Gatien accepte de l’accompagner. Le curé Bélanger les invite à passer dans son bureau. Il s’aperçoit rapidement qu’il a commis une erreur en ne retournant pas l’argent servant aux frais du bedeau. Il remet donc sans rechigner la somme de 35 cents à Courtemanche. Ce dernier lui demande également de lui remettre l’argent de la dîme. Le curé refuse, expliquant à son visiteur qu’ayant toujours une terre à Saint-Dominique, le règlement exige qu’il s’acquitte de la dîme.

C’est alors que Courtemanche quitte précipitamment son siège et se met à enguirlander le curé Bélanger en termes peu flatteurs : « Si vous ne me remettez pas ma dîme, vous n’êtes qu’un skin, un voyou, un guenillou, un clocheton! » Le vicaire, entendant ces cris, se précipite dans le bureau, dont il est immédiatement expulsé par Courtemanche.

Puis, les choses s’enveniment. Courtemanche, voyant que le curé Bélanger n’a toujours pas l’intention de lui remettre son argent, commence par lui donner de petites tapes sur le bout du nez, puis il lui assène un violent coup au visage. En tombant, le curé se cogne la tête sur le bord de la bibliothèque et se met à saigner abondamment. Courtemanche, décidément enragé, se met alors à lui donner des coups de pied dans les côtes, puis le prend par la gorge et commence à l’étrangler.

Le pauvre Toussaint Gatien sort finalement de sa torpeur et il parvient, non sans efforts, à mettre fin à la violente attaque. Aidé de la servante, il relève le pauvre curé. Avant de quitter, Courtemanche donne 10 $ à l’abbé Bélanger pour le dommage qu’il venait de lui causer. Ce dernier refuse en lui disant qu’il n’a pas besoin de son argent. « Alors, vous allez vous en passer! » déclare Courtemanche avant de quitter la scène.

Horrifiés par ce qui venait d’arriver à leur pasteur, les citoyens de Saint-Dominique portent plainte contre Courtemanche qui subit son procès à Saint-Hyacinthe au mois de mars 1922. Il est reconnu coupable et le juge Émile Marin le condamne à payer une amende de 200 $. Il lui épargne la prison pour ne pas jeter dans la misère sa femme et ses neuf enfants. Voilà comment se termine cette sombre affaire qui a fait parler longtemps dans le village!

Par Martin Ostiguy, membre du Centre d’histoire de Saint-Hyacinthe

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