Le clou de l’événement est la présentation au public maskoutain de trois fusains d’Ozias Leduc, de Mont-Saint-Hilaire. Âgé de 89 ans, Leduc est toujours actif en 1954. Les trois œuvres présentées appartiennent à Thérèse Saint-Jacques, de Saint-Hyacinthe, une amie du peintre hilairemontais. Il s’agit d’un fusain intitulé Claude Paysan, ayant servi à illustrer le roman du même nom écrit en 1899 par le docteur Ernest Choquette de Saint-Hilaire, le portrait d’une fillette et une représentation de la sainte Famille à Nazareth.
Outre Leduc, plusieurs autres artistes montrent leurs œuvres lors de cette exposition régionale. L’exposition a ceci de particulier que plusieurs formes d’art y sont présentées. Parmi les exposants, notons le sculpteur Jean-Pierre Boivin. Natif de Saint-Hyacinthe, il étudie à l’École des beaux-arts de Montréal où il reçoit, en 1951, le premier prix de sculpture. Il est bien connu pour sa statue en pierre, Famille, qui trônait jusqu’à tout récemment devant le palais de justice de Saint-Hyacinthe. Le célèbre sculpteur de fer forgé Marcel Juneau, originaire de Saint-Césaire, fait également partie des exposants.
Lors de cette exposition, il faut aussi mentionner la présence d’Anne-Marie Matte-Desrosiers, déjà très connue à l’époque. Elle est née le 13 mars 1907 à Saint-Basile-de-Portneuf. Elle fréquente le couvent Saint-Roch à Québec où elle acquiert les techniques du dessin et de la peinture à l’huile.
Passionnée par la broderie, elle se met à peindre à l’aiguille, comme elle aimait elle-même le dire. Elle reproduit des portraits, des paysages et des scènes folkloriques à l’aide de fils de soie ou de lin de différentes couleurs. En 1939, elle expose à New York. En août 1942, Anne-Marie Matte, qui a déjà acquis une belle renommée, épouse Joseph-Doria Desrosiers, marchand de Saint-Hyacinthe et propriétaire de la mercerie J.-D. Desrosiers. Elle continue à peindre dans sa grande maison de la rue Saint-Pierre à La Providence. En plus de la princesse Élizabeth, l’héritière du trône britannique, la plupart des visiteurs de marque à Saint-Hyacinthe, entre 1942 et 1977, se sont vu remettre un de ses tableaux.
Notons finalement la présence de deux photographes maskoutains qui connaîtront une fort belle carrière : Marcel Arel et Raymond Bélanger. Né à Trois-Rivières, le 27 octobre 1924, Marcel Arel s’installe à Saint-Hyacinthe avec sa famille en 1930. À l’âge de 17 ans, il ouvre son studio sur la rue des Cascades. Il s’agit du Studio Lumière qui poursuit ses activités jusqu’en 1987. Arel reçoit de nombreux prix et distinctions au Canada et à travers le monde. En 1964, il est nommé photographe de l’année au Québec.
Raymond Bélanger, pour sa part, est né à Ottawa le 24 janvier 1920. Il s’installe à Saint-Hyacinthe en 1943. En 1946, avec son beau-frère, Jean-Guy Watters, il ouvre le studio Bel-Watt. Ce studio est d’abord localisé dans l’ancienne résidence de Georges-Casimir Dessaulles sur l’avenue de l’Hôtel-Dieu avant de déménager dans les années 1960 sur l’avenue Saint-Clément à La Providence. Raymond Bélanger sera également photographe de presse pour Le Courrier de Saint-Hyacinthe.
Aujourd’hui, on ne peut qu’envier les quelques Maskoutains qui, en 1954, purent visiter cette exposition régionale d’art qui mit en valeur quelques-unes des œuvres des artistes les mieux cotés de la région.
Par Martin Ostiguy, membre du Centre d’histoire de Saint-Hyacinthe