Peut-être cela vous a-t-il échappé en raison des vacances estivales, mais sachez que la Ville de Saint-Hyacinthe a concrétisé l’un de ses grands rêves en faisant l’acquisition des terres de la Métairie, un lopin de 108 hectares qui appartenait aux bonnes Sœurs de la Charité. « C’est un rêve qui deviendra réalité pour tous les membres du conseil municipal. La bonne nouvelle, c’est qu’on protège des terres », s’était exclamé et félicité le maire de Saint-Hyacinthe, André Beauregard en confirmant la transaction au début du mois.
Saint-Hyacinthe compte protéger (!) des terres, mais elle envisage aussi et surtout de permettre aux Maskoutains de se réapproprier ces espaces en y aménageant un parc-nature, incluant divers jardins d’innovation et d’interprétation. C’est le type de projet vert et porteur qu’il faut saluer et dont Saint-Hyacinthe a besoin pour soulager quelque peu le parc Les Salines.
Même si l’idée est dans les cartons de la Ville depuis une bonne dizaine d’années, elle s’est véritablement invitée sur la place publique lors de la campagne électorale de 2021. Certains y voyaient l’accélération d’un fantasme, d’autres une façon de contrer l’élan du parti Saint- Hyacinthe unie qui promettait dans sa plateforme électorale de s’engager à reboiser la Métairie.
Curieusement, les développements se sont fait attendre. La Ville a même brandi le spectre d’une expropriation pour parvenir à ses fins. On croit comprendre qu’une option d’achat concédée par la congrégation au Groupe Robin a pu compliquer les choses en cours de route. Ça et l’état des finances de la Ville de Saint- Hyacinthe peut-être.
Pas plus tard qu’au mois de mai, j’avais eu l’occasion de discuter de l’état d’avancement du dossier avec la supérieure des Sœurs de la Charité, Sr Diane Beaudoin. Elle avait été catégorique : la reconversion des terres de la Métairie est un « beau projet » qu’elles (les sœurs) endossent pleinement. Oubliez l’idée d’une expropriation, elles ne souhaitaient pas jouer les trouble-fêtes. « Il n’y a aucune résistance de notre part, nous attendons que la Ville se décide. »
Que la Ville se décide à payer, voulait-elle sans doute dire. Et la Ville paiera. Elle allongera la coquette somme de 6,9 M$ pour concrétiser son vieux rêve, soit quelque 2,4 M$ de plus qu’elle espérait. Et cela ne comprend sans doute pas l’ensemble des frais d’aménagement.
Les religieuses ont toutefois eu la sagesse de penser à l’entretien à long terme de leur joyau, ce qui laisse supposer qu’elles sont bien au fait que ce n’est pas la grande force de la Ville de Saint-Hyacinthe. Suffit d’aller se balader du côté de la promenade Gérard-Côté pour s’en convaincre. Ainsi, la moitié du coût d’acquisition sera versée à la Fondation du Grand Montréal. Cet organisme de bienfaisance aura la charge de faire fructifier ce don. La Ville de Saint-Hyacinthe aura accès aux revenus de placement sur une base annuelle pour financer une partie de l’aménagement et de l’entretien à long terme. Cela ressemble à une transaction gagnant-gagnant. Autant pour les Sœurs que pour les Maskoutains.
Hâte de voir la suite et quand le rêve d’un nouveau parc-nature accessible deviendra réalité, car la transaction n’est que la première étape. Il faudra maintenant en faire un parc-nature digne de ce nom à un coût réaliste.
C’est que les élus maskoutains sont passés maîtres dans l’art de rêver, souvent en couleurs. Ils sont moins bons pour rêver en fonction de nos moyens. Ces dernières années, ils nous ont fait rêver à un centre de congrès, à un viaduc, à une promenade Gérard-Côté, à une bibliothèque, à un parc Casimir-Dessaulles, à un musée régional, à un centre d’archives, à un parc-nature, etc.
Tous ces rêves réalisés ont déjà plombé la dette à long terme. Elle s’élevait à 72,6 M$ au 31 décembre dernier et on a rehaussé son plafond symbolique à 92 M$. En regardant la vue d’ensemble, je me dis que nos dirigeants devraient rêver moins ou mieux, être moins éparpillés et livrer davantage de projets complets. Voilà mon grand rêve.