Ce qui a dû réjouir au plus haut point notre bon maire, c’est ce cadeau emballé avec un gros chou et des rubans qu’il a pu lire sous la rubrique Planète bleue, idées vertes de La Presse+, le 23 décembre. Il a dû se délecter comme pas un à la lecture du reportage intitulé : « Le sel de déglaçage, ennemi à Saint-Hyacinthe ».
Disons que c’est beaucoup plus positif pour l’image de sa ville que de lire dans le même média trois semaines auparavant que Saint-Hyacinthe est très discrète sur ses émissions polluantes à l’usine d’épuration ou que la biométhanisation est coûteuse à Saint-Hyacinthe, comme le rapportait La Presse à la mi-octobre.
M. Beauregard ne va certainement pas cracher sur un texte saluant les mérites écologiques de sa Ville, elle qui a remplacé l’épandage de sel de déglaçage par de petites pierres fracturées. Beaucoup de petites pierres fracturées.
Je vous invite à rattraper le reportage de la journaliste Sara Champagne si jamais il vous a échappé. Vous y verrez les visages souriants du maire Beauregard ainsi que du chef de la voirie, Alexandre Frappier. Il y a aussi des données qui démontrent nos progrès évidents. La quantité de sel utilisé dans les dernières années en tonnes métriques a chuté, passant de 7078 tonnes métriques en 2018 à 2000 en 2024.
Même que cette année, nous dit-on, notre Ville ambitionne d’occuper le haut du palmarès des villes écoresponsables en matière de déglaçage, en remplaçant le sel. À ce que je peux voir ces derniers jours en me promenant dans les rues de mon quartier, Saint-Joseph, nos ambitions sont bien réelles.
Il y a quand même des passages du reportage qui m’ont fait sourire comme quand le chef de la voirie rappelle qu’« il y a eu un peu de chialage au début, lors de la consultation publique, mais [que] les citoyens se sont vite adaptés. Nos cols bleus aussi ». Je crois utile de rappeler que cette fameuse soirée d’information publique sur le déneigement écologique tenue le 22 septembre 2022 n’avait attiré que… deux personnes qu’il faut donc mettre dans le camp des chialeux.
La consultation publique organisée sur le site Web de la Ville avait pour sa part intéressé près de 200 personnes, alors que 78 % de celles-ci s’étaient dites en faveur du déneigement écologique, sans toutefois l’avoir expérimenté. Ou si peu dans la mesure où l’expérience des quartiers blancs tentée en 2015 et 2016 avait forcé la Ville à battre en retraite avant de revenir avec son concept de quartiers écologiques sous forme de projet pilote en 2022-23.
Deux quartiers ont parti le bal, puis cinq l’an dernier, pour arriver à sept sur onze cet hiver. Cascades, Sacré-Cœur, Saint-Sacrement et Bois-Joli font sels à part. L’ennemi a encore ses alliés ici, donc.
Le récent reportage de La Presse nous apprend aussi, ou surtout, que « s’il y a eu certaines réticences de la part de la population au départ, le statut “sans sel” fait maintenant la fierté de toute la ville », selon le maire Beauregard.
Durant le dernier hiver, à peine 143 résidants se sont plaints du déneigement, selon les données de la direction générale. Je vis peut-être sur une autre planète que bleue, mais vu la complexité relative de formuler une plainte, je trouve ce chiffre de 143 plutôt préoccupant, considérant aussi le fait qu’on a lancé cette initiative avec autant d’appuis!
Attention, je ne suis pas contre l’idée de couper sur le sel, mais il y a quand même des limites à vouloir être à tout prix les champions du pas de sel au Québec.
Comme je l’écrivais en décembre 2014, il y a des dépenses qu’il faut voir comme des investissements. Épandre du sel sur des rues glacées en est un. Tout est dans le dosage. Passer de l’épandage massif à l’épandage zéro en quelques années est un pari aussi risqué qu’insensé. Je n’ai pas changé d’idée. Je reste de glace.