9 janvier 2025 - 03:00
Entrevue éditoriale en compagnie du maire de la Ville de Saint-Hyacinthe
« La politique et la mairie ne m’ont pas changé »– André Beauregard
Par: Martin Bourassa
Le maire André Beauregard a répondu aux questions de notre éditorialiste. Survol d’une année chargée au niveau municipal et des défis et projets qui pointent à l’horizon pour 2025, une année électorale. Photo François Larivière | Le Courrier ©
Le maire André Beauregard a répondu aux questions de notre éditorialiste. Survol d’une année chargée au niveau municipal et des défis et projets qui pointent à l’horizon pour 2025, une année électorale. Photo François Larivière | Le Courrier ©
Maintenant que les restants de dinde et de tourtière sont terminés, LE COURRIER vous invite à déguster le compte rendu de l’entretien annuel qu’a accordé le maire de Saint-Hyacinthe, André Beauregard, à notre éditorialiste Martin Bourassa. La rencontre s’est déroulée à la mi-décembre au Centre de congrès de Saint-Hyacinthe, un endroit tout désigné pour ce quatrième rendez-vous entre les deux hommes. Il s’agit du dernier avant les élections de novembre 2025.

Bourassa : Comment se porte la santé mentale et physique de notre maire?

Beauregard : Ma santé mentale va super bien, du moins, je pense. Je n’ai pas trop de soucis par les temps qui courent; les médias et les gens me traitent plutôt bien (rires). Au niveau physique, je n’ai pas trop à me plaindre non plus, même si je suis en attente d’une opération à la hanche depuis cinq mois. Il n’y a pas de voie rapide pour les maires dans le secteur de la santé, je peux le confirmer.

Bourassa : Je t’ai demandé de me rejoindre cette année au Centre de congrès, là où tout a commencé pour toi un certain soir de novembre 2021. Quels souvenirs conserves-tu de cette fameuse soirée électorale?

Beauregard : D’excellents souvenirs, mais elle n’avait pas été de tout repos. Il y avait eu bien des rebondissements à la mairie. J’étais en avance, en retard, puis en avance. J’étais stressé, mais c’était un bon stress. Je savais aussi que le résultat du vote par anticipation de Douville n’avait pas été comptabilisé et qu’il risquait de faire la différence. Après un détour par La Cage, je suis rentré chez moi brûlé et heureux, mais trop sur l’adrénaline pour me coucher. Je me suis finalement endormi devant la télévision après avoir regardé le résumé de ce qui s’était passé dans les autres municipalités au Québec. Dès mon réveil, je me suis mis à l’ouvrage et je me suis rendu à l’hôtel de ville.

Bourassa : Quatre ans plus tard, que dirais-tu au nouveau maire de 2021?

Beauregard : Tu as de l’expérience, alors fait toi confiance, ça va bien aller. Et effectivement, ça s’est bien passé. Je suis resté moi-même et j’ai conservé mes mêmes amis. La politique et la mairie ne m’ont pas changé. Je suis encore un monsieur et madame Tout-le-Monde. Je ne me prends pas pour un autre.

Bourassa : Quand tu regardes le chemin parcouru depuis 2021, es-tu satisfait de ton propre chemin en tant que maire? En quoi as-tu progressé?

Beauregard : Je suis peut-être plus réaliste. On aimerait toujours en faire plus et augmenter les taxes un peu moins quand on devient maire. Puis, la réalité nous rattrape. Bien des projets étaient déjà engagés et la dette était élevée. J’ai fait face à la réalité et appris à naviguer à travers cela de façon responsable.

Bourassa : Es-tu aussi satisfait du chemin parcouru par la Ville de Saint-Hyacinthe?

Beauregard : Je suis très satisfait même. On a fait des progrès considérables au niveau de nos politiques environnementales et en gestion de l’eau. Nous avons négocié le virage du développement durable. Je pense qu’on a fait plus de bons coups que de mauvais. Le conseil a encore plein d’idées à réaliser, même si l’année 2024 a été plus compliquée au niveau financier. Il a fallu entretenir nos infrastructures davantage, donc développer un peu moins.

Bourassa : Tu as déjà confirmé ton intention d’être sur les rangs l’an prochain pour un second mandat à la mairie. As-tu hésité un peu?

Beauregard : Pantoute! Ça fait au moins un an que je dis à qui veut l’entendre que je vais me représenter. Je suis en santé et j’ai du plaisir, alors je continue! Je savais quoi répondre quand vous m’avez posé la question le mois passé.

Bourassa : Qu’est-ce qui te motive?

Beauregard : Il reste beaucoup de travail à faire et j’adore ça. Je veux m’attaquer avec encore plus de vigueur à nos infrastructures pour remettre tout ça sur la coche pour les générations futures. Il y a des choix à faire et il faut être raisonnables. Si on disait oui à toutes les demandes, on serait dans le trouble.

Bourassa : Si ton mandat s’arrêtait au bout de quatre ans, à quoi voudrais-tu être associé, quel serait le legs, la réalisation dont tu es le plus fier, sachant qu’on associe les années Bernier à l’effacement de la dette et les années Corbeil au Centre de congrès où nous sommes.

Beauregard : Ce dont je serais le plus fier, j’y travaille actuellement. Ce sera le nouveau terrain de baseball, un rêve que je caresse depuis longtemps. De façon plus générale, je suis fier de ce que nous avons réalisé en matière d’économie d’eau potable et de consultation publique. Nous consultons les gens comme jamais, même s’il y a toujours la possibilité de le faire davantage. Le conseil ne prend pas des décisions avec l’idée de se faire réélire ou de passer à l’histoire, mais avec la préoccupation d’offrir de meilleurs services aux citoyens.

Bourassa : Parlant de nos deux anciens maires, te vois-tu davantage à la mairie pour 20 ans comme M. Bernier ou pour deux mandats comme M. Corbeil?

Beauregard : Je pense davantage à deux mandats, mais on ne sait jamais. Je préfère y aller un mandat à la fois. Je ne voudrais pas faire un mandat de trop. Une chose est certaine, je n’ai pas l’intention d’être maire pendant 20 ans.

Bourassa : Penses-tu que tu auras de l’opposition?

Beauregard : Sans doute, car le parti Saint-Hyacinthe unie existe et existera encore. Est-ce qu’il y aura d’autres candidats, je ne le sais pas. Je n’ai rien entendu. Mais par expérience, trois candidats à la mairie, c’est bon pour le maire sortant [pour sa réélection].

Bourassa : Le parti Saint-Hyacinthe unie, il vous fatigue, tes collègues et toi?

Beauregard : Ce parti existe de plein droit, mais il ne m’empêche pas de dormir et il n’oriente pas du tout nos décisions, même si ses membres peuvent prétendre le contraire. Nous faisons ce qui doit être fait, c’est tout. J’ai de très bonnes relations avec tous les membres de Saint-Hyacinthe unie en passant.

Bourassa : Le bruit court que la Ville de Saint-Hyacinthe est dirigée par les deux Chantal, que ce sont elles qui décident de tout. Je parle de Chantal Frigon et de Chantal… Cournoyer, ta conjointe. As-tu entendu ça?

Beauregard : Hein, ma Chantal? Voyons, c’est trop drôle! Je n’ai jamais entendu ça! Ça sort d’où, c’est une blague? Ma Chantal n’est pas trop politique, je te rassure, mais elle m’épaule parfaitement. J’ai hâte de lui raconter ça…

Bourassa : Plus sérieusement, tu n’es pas un peu tanné d’être toujours dans la position de celui qui quête de l’argent aux autres paliers de gouvernement?

Beauregard : On a toujours demandé de l’argent aux paliers supérieurs et nous n’en avons pas toujours obtenu. Mais nous ne pouvons plus nous en passer au niveau de nos infrastructures. Nous sommes une vieille ville et nos besoins sont immenses. Ce n’est pas toujours reconnu ni pris en considération.

Bourassa : Des compressions à la Ville, on sent que c’est rarement une option. On embauche, on réorganise, on augmente les salaires, mais on ne sent pas que l’austérité est présente à l’hôtel de ville.

Beauregard : Je ne suis vraiment pas d’accord avec toi. Nous en faisons toujours plus pour répondre aux besoins des citoyens, donc il nous faut davantage de ressources. Nous aimerions même nous doter d’une équipe de soir aux travaux publics, question d’être mieux organisés et de limiter les heures supplémentaires. Et nous cherchons toujours à recruter les meilleurs talents possible, donc nous sommes un peu coincés.

Bourassa : Parce que vous recrutez toujours dans des municipalités où les gens sont grassement payés, vous ne pensez pas souvent en dehors de la boîte.

Beauregard : Oui, mais en même temps, ce sont des employés municipaux que l’on engage. Il est normal de chercher à recruter des gens d’expérience là où ils sont, dans les autres municipalités. Tout le monde s’épie et se vole des employés, ce n’est pas évident.

Bourassa : Ta relation avec la députée Chantal Soucy est-elle bonne? On sent que tu n’as pas beaucoup d’atomes crochus avec la CAQ.

Beauregard : Je n’ai pas d’atomes crochus avec aucun parti politique, je dirais. Je me considère comme apolitique. Il faut travailler avec les gens en place, qui sont élus, peu importe leur couleur. C’est ce que je fais et je n’ai rien à reprocher à Mme Soucy. J’ai déjà contribué à la caisse du PQ, mais je ne suis membre d’aucun parti. Je me souviens avoir assisté à une investiture d’Émilien Pelletier que je considère comme un ami, mais je n’étais pas en politique à ce moment.

Bourassa : Es-tu d’accord pour dire que c’est assez facile d’être maire de Saint-Hyacinthe par les temps qui courent?

Beauregard : Ce n’est pas toujours facile d’être maire, mais oui, c’est peut-être plus simple et agréable ici qu’ailleurs. Il y a quand même de la pression, mais peut-être que le fait d’avoir moins de médias rend le tout plus vivable pour les élus. Je ne peux pas trop l’expliquer. Mais si c’était l’enfer au conseil, je démissionnerais sans doute moi aussi, comme certains de mes collègues.

Bourassa : L’année 2024, tu en retiens quoi au niveau des faits saillants municipaux?

Beauregard : On a peut-être moins investi qu’on aurait voulu, car il y a eu beaucoup d’incertitude autour de certaines subventions qui se sont fait attendre, mais l’année a été positive. Je retiens tout particulièrement l’acquisition des terres de la Métairie grâce à la collaboration des Sœurs de la Charité et toutes nos interventions dans le logement social avec Mission Unitaînés, le 1400, Saint-Antoine et tous les autres projets à venir.

Bourassa : Parmi les dossiers que je retiens, il y a celui des odeurs à l’usine d’épuration, un dossier qui est un peu sorti de nulle part alors que le problème ne date pas d’hier.

Beauregard : Le problème était connu, on savait pour les odeurs, mais nous ne dépassions pas les limites. Même nos employés nous disaient que tout allait bien. On aurait pu faire quoi de plus? C’est quand les limites ont été dépassées et que nos avocats nous ont dit que nous pourrions être blâmés qu’on a réagi. On cherchait juste le bon moment. On ne voulait pas alarmer les gens, car il n’y a rien d’alarmant, sinon de l’inconfort à l’occasion.

Bourassa : Vous avez stoppé la construction pour au moins trois ans dans le district Bois-Joli et soulevé l’ire du Groupe Robin qui vous poursuit en justice. Considères-tu que Robin est un bon partenaire pour la Ville?

Beauregard : On est certainement déçus que le Groupe Robin ait décidé de poursuivre la Ville et si on peut lever les restrictions avant 2027, on va le faire. En ce qui concerne Robin, c’est toujours compliqué. Il y a un temps où il était à peu près le seul promoteur et nous avions tendance à l’accommoder. On négociait et, à la dernière minute, on pliait et ce n’était pas toujours à notre avantage. On ne veut plus faire ça. Pour l’expropriation d’un terrain à Douville cette année, nous avons négocié pendant trois mois et le prix ne posait même pas problème. Ce sont toutes les autres conditions exigées par Robin qui accrochaient afin de régler d’autres dossiers. On a donc exproprié [au lieu de plier].

Bourassa : L’usine d’épuration, à quel point est-ce un dossier qui vient compliquer tous les autres au niveau de la planification budgétaire?

Beauregard : Ça va coûter une fortune. Un chantier d’une telle ampleur chez nous, c’est du jamais vu et nous solliciterons à nouveau notre députée. Il va nous manquer entre 80 et 100 millions de dollars qu’il faudra financer. On va annoncer nos intentions en 2025 et il faut s’attendre à générer du mécontentement.

Bourassa : Parmi les dossiers qui sont sortis de nulle part en cours d’année, je pense également à votre décision d’éliminer un poste de conseiller municipal. N’est-ce pas une économie de bouts de chandelles?

Beauregard : C’est un dossier qui était dans nos cartons depuis 2009, si ma mémoire est bonne, et sur lequel le conseil se prononçait une fois tous les quatre ans. J’ai réussi à le faire passer pour montrer l’exemple. Finalement, cela ne changera pas grand-chose que l’on soit un de moins au conseil.

Bourassa : Parmi les gros dossiers sur la table du conseil, lequel te tient le plus à cœur : la promenade Gérard-Côté, le pôle culturel ou le parc de la Métairie?

Beauregard : Les trois! Mais celui que l’on doit travailler en priorité est certainement celui de la promenade. Il faut qu’il se passe quelque chose de significatif à court terme. J’aimerais que le conseil modifie ses plans pour qu’on s’attaque à la section près de la bibliothèque avant de faire la place des spectacles à l’arrière du Centre des arts. Ce serait plus logique vu les chantiers à venir dans le secteur. La poursuite du pôle culturel pourrait coûter quelque chose comme 60 M$, alors il nous faudra là encore des subventions.

Bourassa : Dans les dossiers plus mineurs, mais qui résonnent peut-être davantage pour toi vu ton passé aux Loisirs Douville, j’entends parler de l’aménagement d’un terrain de baseball sur un terrain de Jefo près de l’autoroute. C’est un fantasme ou un projet qui va se faire?

Beauregard : Je t’en parlais un peu plus tôt, il est dans le plan quinquennal d’investissements et nous sommes en discussions avec Jefo. On veut faire plus qu’un terrain de balle. On veut un parc, un accès à la rivière, une école, un quartier. Ce ne sera pas un stade de baseball puisque ça ne passerait pas au conseil, mais un terrain avec un peu plus d’estrades que les autres. Mais il n’est pas dit qu’on ne pourrait pas couler des fondations en prévision d’un futur stade.

Bourassa : Parlons un peu de l’année 2025 puisqu’on recevra bientôt notre compte de taxes. Va-t-il faire mal?

Beauregard : Ça dépend. Au résidentiel, la hausse du compte de taxes est de 3,6 %, alors qu’on aurait voulu la limiter à 3 %. Nos postes budgétaires sont à la hausse et il faut être capables de faire face à nos obligations. Il n’y a pas de nouvelles taxes écoresponsables cette année.

Bourassa : Est-ce que boucler le budget 2025 a été laborieux, voire plus laborieux que les années passées?

Beauregard : Ce n’est jamais un exercice facile, mais le budget 2024 a été encore plus difficile à mon avis. Il y avait plus d’incertitude à gérer l’an dernier. Il y a aussi de belles victoires cette année. Notre dette à l’ensemble est à la baisse et nous avons réussi à éliminer complètement notre dette à court terme.

Bourassa : On a beaucoup parlé d’éoliennes à la MRC en 2024, mais je n’ai pas souvenir d’avoir entendu le maire de Saint-Hyacinthe se prononcer à ce sujet. Tu souhaites en voir dans la région ou pas?

Beauregard : Il y a eu du bon travail de fait avec la mise en place d’un cadre réglementaire par la MRC, mais il n’y a pas encore de projet sur la table. Je ne sens pas que la majorité de la population est contre les éoliennes. Je crois qu’il y aura de plus petits projets ici et là et que ce pourrait même être plus payant que la biométhanisation pour nous. Cela dit, la biométhanisation nous permet d’économiser de l’argent en traitement de boues d’épuration tout en permettant un débouché pour certains déchets. C’est une belle réalisation et on le referait.

Bourassa : Au niveau des projets qui vont retenir l’attention au cours de l’année qui s’en vient, il y aura la reprise du chantier Sélection et le début du chantier Biophilia. Penses-tu que le centre-ville va souffrir de tous ces travaux?

Beauregard : Ce sera un petit mal pour un grand bien. Il y aura une période plus difficile où il faudra compter sur la compréhension et la collaboration de tout le monde. On mettra en place la signalisation nécessaire et on sera à l’écoute du Centre des arts pour limiter les inconvénients.

Bourassa : Que souhaites-tu aux Maskoutains pour la prochaine année?

Beauregard : Je leur souhaite tout naturellement la santé. Je leur souhaite aussi d’être fiers de leur ville et fiers d’y habiter.

Bourassa : Et que peut-on te souhaiter?

Beauregard : La santé et de pouvoir continuer à m’accomplir dans mon travail.

Bourassa : As-tu confiance qu’on se retrouvera quelque part l’an prochain pour le même exercice, un mois après ta réélection?

Beauregard : Si les astres sont alignés, je l’espère et je ne demande pas mieux. On aura sans doute franchi le cap des 60 000 citoyens d’ici là. Sache que c’est toujours avec plaisir que je me livre à cet exercice annuel avec toi.

Bourassa : Plaisir partagé, merci et bonne année 2025!

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