C’est le cas de Michaël Boulay, copropriétaire de Volailles aux grains dorés, une boutique à la ferme située à Saint- Dominique, ainsi que président des Éleveurs de volailles de la Montérégie.
« Chez nous, vous ne vous TRUMPEREZ pas, tous nos produits en boutique sont locaux », a-t-il écrit sur la page Facebook de son entreprise au début du mois de février, profitant du boycottage des produits américains.
M. Boulay s’attend à une hausse marquée des ventes dans ce contexte de tension avec les États-Unis. « Chaque jour, nous avons de nouveaux clients, le bouche-à-oreille est très fort », s’est-il réjoui.
Mais cet intérêt des consommateurs ne date pas d’hier alors que, depuis la pandémie, il a constaté une hausse de l’achalandage qui ne s’épuise pas. Il explique cette popularité par l’importance que son entreprise accorde au service à la clientèle, la qualité des produits, la variété des prix ainsi que la diversité qui ne se trouve pas en épicerie pour les produits de dindon. L’entreprise propose plus d’une centaine de produits de poulet et de dindon.
M. Boulay a souligné qu’il était un précurseur de la vente directement à la ferme lorsqu’il a débuté il y a 15 ans et que, depuis, plusieurs programmes des Éleveurs de volailles du Québec ont facilité ce lien direct avec les consommateurs. « Les gens sont sensibilisés à l’importance de consommer localement. Ça les rassure de voir que nos produits ne proviennent pas de méga-entreprises », a-t-il mentionné.
Bien qu’il ne craint pas que l’achalandage diminue une fois la crise passée, il appréhende néanmoins l’effet de boomerang avec une hausse probable des coûts de production. Par exemple, il achète son grain selon la devise américaine. « L’important est de ne pas remettre cette augmentation dans la cour du consommateur », a-t-il souligné.
Pour le moment, il ne panique pas avec la gestion de l’offre qui pourrait être mise en péril. Tout comme le président des Éleveurs de volailles du Québec, Benoît Fontaine, il croit que l’important est de continuer à sensibiliser les élus à l’importance de préserver ce système.
M. Fontaine a tout de même souligné la gravité de la situation. « Ce n’est pas le moment d’ouvrir l’entente de libre-échange. Il faut attendre que Donald Trump vienne à nous. En ce moment, je crois revivre le cauchemar de 2016 alors que le début de la négociation, c’était la fin de la gestion de l’offre et que ça a fini avec un plus grand accès au poulet pour les États-Unis. Il ne faut pas laisser des mains étrangères sur le garde-manger des Canadiens. C’est là l’importance du marché local et des circuits courts. C’est la clé », a-t-il conclu.
Maintenir l’intérêt
Pour sa part, la copropriétaire de la Ferme Brovin à Saint-Hyacinthe, Caroline Brodeur, voit plus l’aspect positif de la menace des tarifs douaniers alors que 80 % du veau de grain est consommé directement au Québec.
Elle sent bien l’intérêt des consommateurs, mais contrairement à Michaël Boulay, elle se demande s’il va perdurer. « C’est vraiment bénéfique pour nous [le boycottage des produits américains]. Ça revient un peu à ce qu’on a vécu pendant la pandémie où les gens réalisent l’importance de consommer chez les producteurs locaux. C’est un choix plus éclairé. »
« Pour l’instant, les autres consommateurs intéressés, ce sont des clients qui viennent une fois et qui me disent qu’ils vont revenir ou des gens que je croise en ville et qui ont de l’intérêt. Ce sont plus des paroles que du tangible. C’est quand je vais voir qu’ils vont venir que je vais le croire », a-t-elle lancé.
Sa stratégie pour l’instant est de miser sur la qualité de ses produits. « Nous avons tellement de beaux produits au Québec et au Canada. Les consommateurs leur font plus confiance qu’aux produits en épicerie dont ils ne connaissent pas la provenance », a-t-elle souligné.