Celle-ci n’était pas en train de présider une assemblée de conseil, de débattre avec un conseiller ou un citoyen, d’inaugurer un centre de la petite enfance ou de participer à un souper spaghetti au profit du Club de l’âge d’or ou des Chevaliers de Colomb de sa municipalité.
Mme Demers était plutôt grimaçante et assise par terre au centre d’un ring de lutte en train d’appliquer la prise du p’tit paquet au méchant Jason « The Raccoon » Petitclerc, bonne pour un compte de trois, au terme d’un affrontement imprévu et en apparence inégal disputé dans le cadre du gala de lutte Symmania X.
Une image et une nouvelle on ne peut plus rafraîchissantes qu’elle que soit votre opinion ou votre intérêt à propos de la lutte en général. De voir une mairesse, une élue du peuple, sortir de sa zone de confort et s’investir autant dans un spectacle du genre mérite toute notre admiration.
Elle n’a pas porté ombrage au travail des élus ni déshonoré celui des lutteurs professionnels ou amateurs, bien au contraire. Mme la mairesse a joué le jeu avec cœur et panache, s’entraînant et répétant le scénario avec sérieux.
Il suffit de voir la vidéo de sa performance, le terme n’est pas trop fort, pour s’en convaincre. Lutter n’est pas à la portée de tout le monde. Il faut être dans une sacrée forme pour donner et recevoir des coups avec justesse et ne pas se blesser. Il ne faut pas avoir peur du ridicule non plus. Ça prend du guts pas mal.
La bonne nouvelle, c’est que je n’ai pas vu ni entendu de commentaires désobligeants à la suite de sa prestation. Et j’ose espérer que Mme Demers non plus. À ceux et celles qui seraient tentés d’y voir un coup de pub ou une façon de s’attirer de la visibilité en vue des prochaines élections, j’aurais envie de répondre qu’il y a des façons beaucoup plus faciles d’arriver à ses fins.
De toute évidence, Marie-Hélène Demers n’a pas froid aux yeux, elle aime la lutte, elle connaît les rouages et les codes de ces spectacles et elle s’est fait drôlement plaisir. Et elle a fait plaisir à tous les jeunes et moins jeunes qui ont assisté à ce gala de lutte en plein air. Je salue surtout son audace.
Mettre ainsi en lumière une nouvelle positive concernant une élue a quelque chose de bénéfique. Tout n’est pas que triste et terne dans le monde municipal malgré les apparences ou l’actualité du moment, alors que les cas de harcèlement, d’intimidation et les démissions font grand bruit.
Je lisais récemment dans le Journal de Montréal que d’après les plus récentes données d’Élections Québec, il y a eu pas moins de 1082 élections partielles (13,43 % des sièges) pour remplacer des membres de conseils municipaux qui ont quitté la vie politique depuis les élections de 2021, soit bien davantage que les 727 départs précipités enregistrés entre 2017 et 2021.
Ces chiffres s’ajoutent au sondage publié au printemps 2024 dans le cadre des Assisses de l’Union des municipalités du Québec révélant que 62 % des mairesses et conseillères municipales ont déjà vécu de la violence verbale et 53 % d’entre elles ont été victimes d’intimidation et de menaces dans le cadre de leurs fonctions. Des données qui font certes réfléchir.
Tous les élus du Québec n’ont pas la capacité de régler leurs comptes sur un ring de lutte, du moins pas avec la grâce et l’aplomb de Marie-Hélène Demers. Peu importe le résultat de l’élection de novembre, son après-carrière semble toute trouvée.
Le Raccoon n’a qu’à bien se tenir!
