Les nouvelles qui émanent de notre réseau de santé local sont loin d’être roses. Il semble que la COVID-19 nous ait frappés à retardement. Mais elle nous frappe de plein fouet, n’en doutez pas une seule seconde. Au cours des derniers jours, pas une, mais deux éclosions ont éclaté dans nos établissements de santé.
Dans notre dernière édition, il était question d’une éclosion à l’Hôpital Honoré-Mercier. Pas moins de 13 patients et 16 employés y ont été déclarés positifs. Les premiers ont été transférés dans d’autres centres hospitaliers. Le personnel médical a pour sa part été retiré du terrain et placé en isolement. C’est le côté inquiétant de l’affaire.
La pandémie se répand parmi nos anges gardiens et est en train de décimer les troupes par en dedans. Pas juste chez nous, mais aussi dans le Grand Montréal où le personnel tombe comme des mouches, alors qu’on entrevoit à peine l’aplatissement de la fameuse courbe. Selon des chiffres du ministère de la Santé et des Services sociaux et de la Direction de santé publique (DSP) de Montréal, plus de 5050 employés du réseau de la santé étaient atteints de la COVID-19 au Québec (3743 à Montréal) et 6170 autres manquent à l’appel il y a une semaine à peine. Le Devoir titrait justement : « Hécatombe chez les travailleurs de la santé ». J’ignore si on saura un jour combien de ceux-là ont été exposés à la maladie en raison du manque d’équipement de protection ou du va-et-vient imposé entre les zones froides et chaudes et le mouvement de personnel entre les établissements d’une même ville ou région.
Une hécatombe se dessine également à l’Hôtel-Dieu de Saint-Hyacinthe. Nous n’en sommes pas encore là, mais le potentiel est bien là. Une bonne quinzaine de résidents permanents ont été déclarés positifs à la COVID-19 au cours de la dernière semaine, alors qu’on ne rapportait encore aucun cas chez les résidents permanents un mois après l’interdiction des visites. La grenade vient d’être lancée. Et on ne dit pas cela pour être alarmiste, mais plutôt réaliste.
Pour ceux qui l’ignorent encore, l’Hôtel-Dieu de Saint-Hyacinthe n’est pas n’importe quel centre d’hébergement de soins longue durée (CHSLD). On dit de lui que c’est l’un des plus imposants de la province avec ses quelque 421 lits d’hébergement permanent, ses 35 lits d’hébergement temporaires et ses 55 lits de santé physique. Nous avons tenté sans succès d’en trouver un plus volumineux au Québec. Cela nous incite à croire qu’il vient en tête de liste.
Dans les circonstances, il mériterait une attention particulière, voire toute l’attention. La décision d’y transférer en début de crise des cas positifs ou potentiellement positifs en provenance des résidences privées pour aînés et des ressources intermédiaires était-elle avisée dans les circonstances? La réponse semble évidente. Et quand on sait que, pénurie de personnel oblige, on a forcé les travailleurs de la santé à partager leur temps entre les zones chaude et froide à des quarts de travail différents, inutile de chercher midi à quatorze heures pour identifier les causes de cette éclosion. Celle-ci gagne aussi le personnel puisque moins d’une dizaine d’employés ont été détectés positifs la semaine dernière. De ce côté aussi, il faut retenir notre souffle.
Contenir le virus en CHSLD est un défi de tous les instants, réussir à la faire dans le plus vaste de tous les CHSLD du Québec s’annonce une tâche herculéenne. On ne comprend pas trop la décision de permettre le retour des aidants naturels dans le contexte actuel, car c’est peut-être l’armée qu’il faudra bientôt réclamer ici aussi. En tout cas, vivement un post-mortem ici aussi quand viendra l’heure du bilan et si possible avant la seconde vague.
L’aura-t-on échappé en cours de route? Et si oui, pourquoi? Il faudra répondre à ces deux questions.