14 décembre 2023 - 03:00
Construction de logements au centre-ville
« Abordables »
Par: Martin Bourassa
Martin Bourrassa

Martin Bourrassa

En ces temps de pénurie de logements au Québec comme à Saint-Hyacinthe, avec des taux d’inoccupation au plus bas, tout projet visant à en ajouter mérite considération. Encore davantage ceux qui proposent de construire du logement abordable.

C’est pour cela que la nouvelle mouture du projet Biophilia, qui vise à bâtir un immeuble de 178 logements dans le stationnement Plaza, voisin du Centre des arts Juliette-Lassonde, mérite toute notre attention. Nouvelle mouture, disais-je?

La version présentée par les promoteurs Interloge, Vincent Lainesse et Dominic Rodier marque une évolution considérable par rapport à ce qu’ils nous avaient présenté en mars 2022 quand les grandes lignes de Biophilia avaient été évoquées publiquement pour la première fois. Les changements sont importants.

La présentation initiale faisait état d’un investissement de 80 M$ pour construire un immeuble de 200 à 250 logements, dont 30 % portant la caractéristique abordable, à un prix de location de 20 % sous le prix du loyer médian de la région. En 2022, pour le marché maskoutain, on calculait abordable un 4 et demie à 650 $ par mois et un 5 et demie à 735 $ par mois.

Le montage financier prévoyait une implication majeure de la Société canadienne d’hypothèques et de logement par l’entremise d’un Fonds national pour le logement. La version revue et corrigée du projet a évolué sur presque tous les fronts près de deux ans plus tard.

Ce qui ne change pas, c’est l’emplacement. On a cependant revu de fond en comble le projet de départ ramené à 69 M$ pour la construction de 178 unités.

Nuance importante, celles-ci seront 100 % abordables, même si l’abordabilité de ces logements sera bien relative lors de leur arrivée sur le marché dans trois ans.

Selon l’indice d’abordabilité anticipée pour 2026 dans le marché maskoutain, les 4 ½ et les 5 ½ seraient proposés à des loyers mensuels de 1089 $ et 1236 $. Pour un studio, on parle de 778 $ par mois.

Est-ce que ces prix correspondent à votre propre définition du mot« abordable »?

Ces montants illustrent bien la flambée des prix des loyers ces dernières années, flambée qui met à mal les finances d’un peu tout le monde, il va sans dire. La part de revenu qui doit être consacrée au logement devient de plus en plus problématique et la rareté des logements ne fait que pousser les loyers vers le haut.

D’où l’urgence locale et nationale d’accroître le parc immobilier. Nos décideurs l’ont bien compris et les promoteurs du projet Biophilia ont modifié leur montage financier en conséquence. Ils ont largué la SCHL au profit d’un fonds spécial alimenté par Québec, la FTQ et Desjardins pour permettre la construction accélérée de logements sociaux et abordables, deux catégories distinctes.

La Ville de Saint-Hyacinthe est partie prenante du montage financier et l’ampleur de sa participation étonne, dans la mesure où elle n’avait jamais été détaillée auparavant. Ainsi, en plus de donner le terrain, elle financera en partie la construction de logements et du stationnement public souterrain qui verra le jour dans les fondations de l’immeuble. On estime la contribution municipale à environ 15 M$.

Si la Ville a l’habitude de s’engager financièrement dans la construction de logements sociaux, il s’agit à mon avis d’une première, du moins de cette envergure, pour la création de logements abordables. C’est un précédent qu’elle devra peut-être répéter pour inciter d’autres promoteurs à s’engager sur cette voie. Il faudra cependant que cette contribution municipale passe le test du règlement d’emprunt. À ce stade-ci, il est difficile d’être contre l’octroi d’une subvention municipale à la création de logements abordables, surtout qu’ils le resteront plusieurs années.

La participation de l’organisme à but non lucratif Interloge représente une police d’assurance à cet égard. Si Biophilia se rend jusqu’à la première pelletée de terre, il restera cependant à régler la délicate question du stationnement pendant la construction puisque l’immeuble s’élèvera sur le stationnement public le plus achalandé au centre-ville. Déjà, lors des balbutiements du projet, le maire André Beauregard en parlait comme d’un défi à surmonter. Celui-ci n’en sera pas moins grand avec la version mise à jour. Il faudra envisager ces irritants temporaires comme un mal pour un bien.

Et chercher à les atténuer autant que faire se peut.

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