5 septembre 2024 - 03:00
Paramédical depuis 40 ans
André Bienvenue range son uniforme
Par: Adaée Beaulieu
André Bienvenue prendra sa retraite le 5 septembre après 40 ans comme paramédical à Saint-Hyacinthe. Photo Robert Gosselin | Le Courrier ©

André Bienvenue prendra sa retraite le 5 septembre après 40 ans comme paramédical à Saint-Hyacinthe. Photo Robert Gosselin | Le Courrier ©

Après avoir répondu, comme paramédical, à plus de 33 000 appels souvent tragiques parfois cocasses ou touchants, le Maskoutain André Bienvenue tirera sa révérence le 5 septembre, laissant derrière lui un métier qu’il a adoré et qu’il a trouvé extrêmement valorisant.

Ce qui lui manquera le plus sera le sentiment d’être utile et l’obligation de trouver des solutions dans le feu de l’action. À l’adolescence, il n’aurait pourtant jamais cru se passionner autant pour ce métier. Son rêve était d’abord de devenir policier, mais lorsqu’il a terminé le secondaire en 1983, il n’a pas été accepté en raison du fait qu’il lui manquait un pouce pour avoir la grandeur requise. « J’ai été vraiment très déçu, mais avec le recul, je réalise que j’étais plus fait pour être paramédical. Comme policier, il faut parfois être dur avec les gens, alors que moi, je suis rempli de compassion », a-t-il mentionné.

C’est grâce à son emploi étudiant de pompiste qu’il a eu son premier contact avec des paramédicaux et l’envie de tenter sa chance dans ce métier. Après un cours de soir de 160 heures au Cégep au Saint-Hyacinthe et des fins de semaine comme troisième paramédical à faire de l’observation, il a été reconnu comme paramédical en 1984.

Quarante ans plus tard, son palmarès est impressionnant. Il a notamment procédé à sept accouchements, dont un au Couche-Tard sur l’avenue Saint-Louis à Saint-Hyacinthe en pleine crise de verglas. Il a aussi à son effectif une dizaine de réanimations sans la moindre séquelle.

Toutefois, certains moments ont été plus tragiques. Puisqu’il a toujours travaillé dans le secteur de Saint-Hyacinthe, il lui est arrivé de se présenter sur les lieux de suicides impliquant des personnes qu’il connaissait. « Quand j’arrivais sur place, je ne pouvais plus reculer, mais j’ai une facilité à dédramatiser et je n’ai jamais fait de cauchemars », a-t-il confié. Il a aussi su créer de bons liens avec la communauté. « Maintenant, sur presque tous les appels, les personnes me connaissent. On me salue aussi sur la route. C’est vraiment une richesse de me sentir apprécié par autant de personnes », a-t-il déclaré.

Un métier qui a énormément évolué

Au fil des années, André Bienvenue a vu évoluer le métier à la vitesse grand V. À l’époque où il a commencé, les nouveaux paramédicaux devaient attendre six mois avant de prendre le volant, ce qui n’est plus le cas aujourd’hui. Il n’y avait pas non plus de GPS. « Il fallait connaître le territoire par cœur en se donnant des points de repère. Nous écrivions l’adresse sur un papier et le mettions dans notre poche et nous partions comme ça », s’est-il remémoré.

Il a aussi ajouté qu’à l’époque, un paramédical gardait l’ambulance chez lui pendant ses heures de travail et devait aller chercher son collègue même si cela impliquait de passer devant la résidence de la personne en détresse.

Il n’y avait pas non plus de limite de vitesse à respecter en situation d’urgence jusqu’aux années 2000. « Quand un enfant devait être transféré à l’hôpital Sainte-Justine d’urgence, je l’embarquais avec mon collègue, l’infirmière et le médecin et nous partions tous vers Montréal et le but était ne pas lâcher la pédale tout en pensant que j’avais la vie de toutes ces personnes entre mes mains », a raconté M. Bienvenue.

Il y a avait aussi beaucoup moins de matériel médical disponible et les pompiers n’arrivaient pas sur les lieux des accidents avec des pinces de désincarcération. « À l’époque, les gens ne perdaient pas leur permis pour avoir conduit avec les facultés affaiblies, alors ils sortaient des bars à 3 h du matin complètement saouls, prenaient les rangs de campagne et faisaient des face-à-face. Les voitures étaient faites de deux longs bancs, en avant et en arrière, alors il pouvait y avoir six personnes non attachées. Les collisions impliquaient donc parfois 12 personnes, dont certaines éjectées, et nous n’étions souvent que deux ambulances sur place. Il fallait vraiment être débrouillards et faire preuve de sang froid. J’ai encore maintenant le réflexe de prendre la situation en main quand la vie d’une personne est à risque et que cela peut être long la sortir de la voiture avec les pinces. J’ai toujours eu beaucoup d’intuition », a-t-il expliqué.

C’est cette adrénaline qui l’a toujours motivé. André Bienvenue faisait d’ailleurs ce métier essentiellement par passion dans les débuts puisqu’il était payé 8 $ de l’appel. Il devait donc avoir un autre emploi de jour. Ensuite, les paramédicaux sont devenus syndiqués en 1986, ce qui a changé bien des choses, dont l’instauration des échelons salariaux. Les postes à temps plein sont arrivés à la fin des années 1980.

Depuis une quinzaine d’années, la paperasse fait de plus en plus partie du travail des paramédicaux. Notre homme a appris à composer avec cette réalité, mais elle ne lui manquera pas. Du moins, pas autant que ses collègues qui continueront de sauver des vies sans lui.

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