28 décembre 2023 - 03:00
Budget 2024 de la Ville de Saint-Hyacinthe
Avez-vous dit rattrapage?
Par: Martin Bourassa
Martin Bourrassa

Martin Bourrassa

Ce n’est pas dans mes habitudes d’écrire deux éditoriaux consécutifs sur le même sujet. Mais pour ce dernier texte d’opinion de l’année, permettez que je m’offre le plaisir (!) de revenir sur le budget 2024 que vient de nous concocter la Ville de Saint-Hyacinthe.

Après m’être attardé à la notion de courage la semaine dernière, il me semble opportun de renchérir sur la notion de « rattrapage », un mot qui a été décidément à la mode au cours des derniers mois à la Ville de Saint-Hyacinthe. Un peu trop peut-être.

Ce mot s’est d’abord invité quand il fut question des longues et pénibles négociations entourant le renouvellement de la convention collective des pompiers du Service de sécurité incendie de la Ville de Saint-Hyacinthe. À la signature de leur nouvelle convention en mars, les pompiers ont profité d’un rattrapage de 12,5 %, en plus des indexations salariales annuelles totalisant 14,5 % entre le 1er janvier 2020 et le 1er janvier 2026.

Comme vous le savez, la notion de rattrapage est aussi revenue dans l’actualité cet automne quand l’administration générale a convaincu les élus qu’il fallait impérativement revoir la grille salariale des cadres pour réussir à dénicher les perles rares pouvant pourvoir les nombreux postes disponibles et retenir nos bons employés sollicités à tour de bras par des employeurs plus généreux.

La réponse du conseil a été de consentir à tous les cadres un rattrapage de 14 % qui s’appliquera dès le début de l’année 2024 et auquel s’ajoutera une indexation déjà prévue de 2,25 %, pour un grand total de 16,25 %. Je pensais à ce moment qu’on en avait terminé avec le mot « rattrapage » pour un bon bout de temps, soit jusqu’au renouvellement du contrat de travail des cols blancs en 2027.

Erreur. Quelle ne fut pas ma surprise en voyant qu’il était question d’un certain rattrapage dans le communiqué de presse de la Ville de Saint-Hyacinthe énumérant les grandes lignes de son plus récent budget. L’extrait va comme suit : « À la lumière de l’écart grandissant entre les revenus de la Ville et ses responsabilités, et considérant l’IPC actuel [qu’elle ne précise pas, mais qui était de 3,1 % en novembre], l’augmentation du compte de taxes est de 5,76 %, incluant un rattrapage de 1 % convenu par le conseil […]. » On se rattrape – et on vous attrape par la même occasion – pour avoir été trop généreux l’an dernier avec les contribuables maskoutains. La Ville précise en effet que l’augmentation du compte de taxes pour une maison moyenne sans piscine a été de 4,19 % en 2023, alors que l’IPC moyen de référence de l’année 2022 s’élevait à 6,8 %. Grosso modo, elle calcule donc qu’elle a laissé 2,4 % sur la table en 2023 et elle se croit dans son droit d’imposer un rattrapage de 1 % pour 2024. Il s’agit là d’une excuse facile pour cacher son incapacité à contenir ses dépenses et à respecter la capacité de payer de ses citoyens qui vont certainement s’appauvrir et en souffrir au passage.

Si la Ville estime qu’elle s’appauvrit chaque fois que son budget annuel ne surpasse pas l’IPC comme en 2023, on peut en dire autant des citoyens qui n’ont pas vu leur salaire ou leurs revenus augmenter de 9,95 % depuis deux ans, soit l’augmentation combinée moyenne de l’effort fiscal imposé aux propriétaires de résidence unifamiliale sur le territoire de la municipalité. C’est sans doute le cas d’une majorité de gens qui n’ont pas la chance d’être pompiers ou cadres à la Ville de Saint-Hyacinthe.

Ce qui est fâchant également, c’est de voir que la Ville est plus prompte à faire du rattrapage quand c’est à son avantage qu’à redonner aux contribuables. Bon an, mal an, quand elle reçoit ses états financiers de l’année précédente à l’été, elle se retrouve avec des surplus attribuables à des revenus qui ont surpassé ses dépenses.

Ce fut le cas au terme de l’exercice 2022 avec un excédent de 2,7 M$ qu’elle s’est empressée d’affecter en partie pour augmenter ses surplus, pour payer ses dépenses courantes et concevoir un prochain budget de moindre impact.

Au pire, elle sait qu’elle pourra toujours se rattraper si son budget n’attache pas trop, car à Saint-Hyacinthe, on trouve toujours une bonne raison d’augmenter les taxes, toujours.

Sur ce, bonne année quand même!

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