On s’en doutait, mais c’est maintenant confirmé : faire respecter la limitation de charge du pont Bouchard au centre-ville de Saint-Hyacinthe coûte les yeux de la tête. C’était à la Une de notre dernière édition.
Notre manchette a fait jaser. Et pour cause. Les chiffres donnés par le ministère des Transports du Québec sont hallucinants. Ainsi, la présence constante, sept jours par semaine et 24 heures sur 24, des contrôleurs routiers coûte la bagatelle de 5000 $ par jour, donc de 35 000 $ par semaine. Aussi bien dire une fortune.
On parle de trois contrôleurs le jour et de quatre la nuit. Ça fait quand même beaucoup de monde pour surveiller un pont.
On devine cependant que plusieurs personnes ont dû avoir envie de changer d’emploi avec ces vaillants contrôleurs en apprenant à combien s’élève la facture. Il serait étonnant que ces contrôleurs soient payés au salaire minimum.
Depuis avril dernier, moment où la limitation de charge à moins de 5 tonnes a été imposée sur le pont Bouchard, pas moins de 385 000 $ ont déjà été dépensés seulement pour empêcher les poids lourds de s’y aventurer.
Cette situation pourrait d’ailleurs perdurer une année encore, à moins que les inspections réalisées ces derniers jours sur cette infrastructure n’offrent une piste de solution qui permettrait la réalisation de travaux temporaires pour renforcer la structure en attendant sa reconstruction complète en 2016. Sinon, tout indique que la surveillance à prix d’or devra se poursuivre. À ce tarif de 5000 $ par jour, la facture annuelle pourrait donc s’élever à 1 825 000 $. C’est complètement fou.
Si certains ont poussé un soupir de soulagement en se disant que cette facture n’est heureusement pas assumée par la Ville de Saint-Hyacinthe, il faut savoir qu’elle est supportée par l’ensemble des contribuables québécois, ce qui inclut les contribuables maskoutains. Vous et moi. On repassera donc pour le soupir de soulagement.
Quand on constate avec quelle assiduité les contrôleurs surveillent la circulation sur le pont, on devrait plutôt s’inquiéter de deux choses. La première concerne évidemment l’état du pont Bouchard. Disons que ça n’inspire pas trop confiance quand on regarde le zèle des contrôleurs et le train de mesures déployées. Le pont est-il à quelques passages de poids lourds de s’écrouler? La question se pose. Et de toute évidence, on ne veut pas courir le risque. Il ne faut pas en prendre non plus.
Deuxième source d’inquiétude : il y a certes lieu de se poser des questions sur l’entretien de nos ponts et viaducs. A-t-on assuré un suivi adéquat de l’état du pont Bouchard? Si oui, comment expliquer dans ce cas que du jour au lendemain, on en soit réduit à hisser le drapeau rouge et à restreindre ainsi la circulation?
La dégradation du pont ne doit quand même pas être apparue comme par magie.
C’est à se demander si le pont a été construit selon les règles de l’art et si la surveillance de son état a été assurée avec toute la rigueur nécessaire.
Des questions élémentaires se posent, mais malheureusement on ne peut pas compter sur le ministère des Transports pour nous fournir toutes les réponses.
Dans notre volonté de lancer des pistes de solution plus économiques que celle d’investir à grands frais dans la surveillance des ponts ou des viaducs en piteux état, nous pensons qu’il y aurait peut-être lieu de revoir les peines imposées aux entreprises de camionnage qui ne respecteraient pas les limitations de charges.
Si les contrevenants étaient sévèrement sanctionnés, il y a de bonnes chances que la présence des contrôleurs serait futile. Pensons à une peine qui prendrait la forme d’une suspension de permis d’un an pour le chauffeur d’un poids lourd surpris à traverser un pont ayant une limitation de charge et à une amende de 250 000 $ pour l’exploitant. Ce serait peut-être draconien comme mesures, mais gageons que le message passerait assez rapidement merci. Actuellement, dans le pire des cas, il est question d’une amende variant de 600 $ à 10 000 $ pour l’exploitant et de 175 $ plus les frais pour le chauffeur, sans perte de points. Pas trop dissuasif tout ça.