27 janvier 2022 - 07:00
Aéroport de Saint-Hyacinthe
Changement de pilote
Par: Le Courrier

C’est dans la discrétion absolue et au plus fort de la campagne électorale municipale, à la fin du mois d’octobre dernier, que s’est conclue la vente de l’aéroport de Saint-Hyacinthe, mettant fin à une saga interminable au sujet de sa possible municipalisation.

Au final, l’aéroport de Saint-Hyacinthe, qui est en fait un aérodrome, n’a pas été vendu à la MRC des Maskoutains ni à la Ville de Saint-Hyacinthe, mais à un petit groupe d’hommes d’affaires et de passionnés d’aviation, regroupés au sein d’un nouvel organisme à but non lucratif. Que d’excellentes nouvelles, donc.

La première, c’est que cet aéroport vétuste aura droit à un nouveau départ. Une nouvelle ère s’ouvre, marquant la fin d’un chapitre pour Gabriel Chartier, l’ancien propriétaire. Tant mieux si ce dernier est heureux de cette conclusion et des 835 000 $ qui viennent avec. Pendant des années, c’est lui seul qui a tenu cet équipement à bout de bras et qui a assuré son développement et sa survie à la mesure de ses moyens. Contre vents et marées, et souvent sans l’appui de la Ville de Saint-Hyacinthe ou du CLD des Maskoutains à la belle époque.

Bien des gens haut placés auraient espéré qu’il s’écrase avec son aéroport pour pouvoir le récupérer pour une bouchée de pain. Mais notre homme n’a jamais lâché. Il faut dire qu’il aura toujours été le plus grand défenseur de l’aéroport et aussi son pire ennemi. Parmi les grandes qualités du personnage, le sens de la diplomatie n’apparaît pas en tête de liste. On se souviendra de passages remarqués au conseil municipal au temps du maire Claude Bernier.

On l’excusera facilement avec le recul puisqu’il y avait souvent matière à être exaspéré en voyant à quel point des administrations municipales tout autour supportaient leur aéroport régional de façon énergique, contrairement à ce qui se vivait chez nous. On s’étonnera plutôt de son profond silence des derniers mois, alors que la vente de l’aéroport était débattue et son état général mis a mal par une série d’expertises. Il faut croire que quelqu’un quelque part a dû lui conseiller de se faire discret le temps que les négociations aboutissent. Si celles avec la MRC et la Ville ont échoué, celles avec l’OBNL ont abouti sur quelque chose d’assez intéressant à première vue.

La seconde bonne nouvelle, c’est que parmi les administrateurs de l’organisme, on trouve des gens d’affaires expérimentés et crédibles, dont René Rouillard, ancien vice-président d’une compagnie de transport de Saint-Hyacinthe, et Robert Robin, du Groupe Robin, un entrepreneur maskoutain qui n’a plus besoin de présentation. Et qui n’est pas trop le genre à s’associer à des causes perdues et à entretenir des canards boiteux. Ces gens devront y mettre beaucoup d’amour et beaucoup d’argent aussi. On devine que ce ne sera pas forcément le leur, vu la nature de leur regroupement. Ils tenteront évidemment d’obtenir des subventions provinciales et fédérales, alors que nos députés se tiennent prêts.

Mais l’argent ne réglera pas tout. Est-il possible d’allonger la piste de façon substantielle pour en faire autre chose qu’un aéroport récréatif? Est-il possible, voire souhaitable, d’accroître son potentiel, donc d’augmenter son affluence? Tout cela demande réflexion.

La troisième bonne nouvelle, c’est que la Ville de Saint-Hyacinthe a eu la sagesse de laisser au secteur privé le soin de s’impliquer avant elle dans ce projet de sauvetage, du moins si l’on se fie aux experts. Bravo pour cette prudence élémentaire dans les circonstances puisque, dans son état actuel, cet aéroport était vu davantage comme un puits sans fond qu’un investissement pour les contribuables maskoutains qui attendent encore après les retombées de l’usine de biométhanisation. Il ne faudrait pas que la Ville de Saint-Hyacinthe en arrive à faire indirectement ce qu’elle n’a pas osé faire directement en y injectant massivement des fonds publics.

Les nouveaux propriétaires de l’aéroport vont sans doute réclamer un soutien financier récurrent de la Ville, du moins un engagement ferme et sonnant. Si une aide municipale va de soi compte tenu des retombées potentielles d’un équipement remis à neuf, il y a des balises à établir clairement. Quand, comment et combien? En échange de quoi et sur la base de quels documents officiels (des états financiers?) remis en toute transparence? Une bonne jase s’impose pour reprendre une expression chère à l’ancien maire Claude Corbeil.

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