Les défis sont nombreux pour l’équipe de Sébastien Villeneuve, chercheur et coleader de ce projet visant, entre autres, à réduire le gaspillage alimentaire lors de la distribution de différents produits vers les épiceries. Par des procédés à la fois simples et complexes, ces scientifiques tentent d’identifier les faiblesses de la réfrigération dans les transports afin d’améliorer les systèmes de gestion alimentaire à travers le pays.
Afin de mieux illustrer la problématique, le scientifique donne l’exemple d’un légume qui peine à conserver sa pleine fraîcheur une fois arrivée à la caisse d’un supermarché. « Chaque heure où le légume n’a pas été réfrigéré adéquatement représente une journée de perdue en matière de consommation. Par exemple, un brocoli, qui a une espérance de conservation évaluée à 30 jours, peut se retrouver dans les mains du consommateur après 10 jours de route, réduisant considérablement sa fraîcheur. Lorsqu’on améliore les chaînes de distribution, on contribue à rajouter du temps au consommateur à manger le produit. C’est souvent ce dernier qui est faussement accusé en matière de gaspillage puisqu’il n’aura pas eu assez de temps pour consommer le tout à temps », explique M. Villeneuve.
Bien que le chercheur étudie le dossier depuis plus de 25 ans, une équipe d’une dizaine de spécialistes travaille depuis 2019 au Centre de recherche afin d’améliorer les procédés de réfrigération, et ce, autant par voie aérienne que terrestre. Plusieurs composantes sont alors évaluées, notamment les bris de chaînes du froid, les effets de la vibration du transport ainsi que la dépressurisation en altitude. Mentionnons que près de 500 millions de conteneurs d’aliments circulent quotidiennement à travers le monde.
Une usine pilote a d’ailleurs été aménagée afin de simuler le transport pour mieux évaluer l’état des produits une fois arrivés à destination. « On s’est doté d’équipement capable de reproduire de façon assez précise toutes les conditions de transport pour toutes les routes qui traversent le Canada vers les supermarchés. On a accumulé des bases de données de ces conditions qui nous ont permis de nous concentrer sur ces simulations nous dictant le chemin à prendre », renchérit M. Villeneuve.
Ce projet de recherche, financé entre autres par le gouvernement fédéral, fait partie d’une collaboration pour contrer le gaspillage alimentaire à l’échelle mondiale. Les résultats de ces travaux, prenant fin au printemps 2023, seront partagés à l’international dans le cadre de rencontres du G20.
Et manger local dans tout ça?
De plus en plus conscientisés au phénomène de gaspillage alimentaire, plusieurs consommateurs se sont davantage tournés vers l’achat local sur le plan de l’alimentation. Saluée par le chercheur, cette solution ne viendra toutefois pas à bout du problème de gaspillage dans son ensemble, croit-il.
« La consommation locale est une bonne chose, mais le Canada n’est pas indépendant au niveau alimentaire. Si on adoptait tous cette avenue, on n’aurait pas assez de terre pour nourrir la planète. Une multitude de petites décisions et de concepts, dont l’achat local, permettront de diminuer les pertes et le gaspillage alimentaire », conclut Sébastien Villeneuve.