À tout seigneur tout honneur, concentrons-nous d’abord sur la décision de la cheffe de quitter son poste, le conseil d’administration du parti et même la vie politique tout court dès qu’un successeur sera trouvé.
Elle ne quitte pas par dépit, mais pour des raisons de santé. On peut certes comprendre que la joute politique éprouvante l’ait usée prématurément. Après tout, elle était le visage, la cheffe, l’âme et la locomotive du parti. N’ayons pas peur des mots, ce parti ne se résumait pas à elle seule, mais pas loin, même si elle prétendra bien sûr le contraire.
Ce visage, elle l’était encore davantage depuis les résultats décevants de la première et seule campagne du parti. Faut-il rappeler qu’il n’a pas réussi à faire élire un seul de ses 11 candidats dans les quartiers, malgré la performance inspirée de Mme Demers à l’automne 2021? Celle-ci s’était inclinée par à peine 235 votes face au maire André Beauregard. On peut penser qu’elle aurait maximisé ses chances si elle avait pu concentrer toute son attention sur sa propre campagne. Car Mme Demers n’avait pas pris le chemin le plus facile vers la mairie en se donnant le mandat (et le trouble) de former un parti, d’élaborer une plateforme, puis de rallier et de materner 11 candidats tout le long de la campagne.
L’idée d’appuyer un parti politique municipal n’est pas dans les mœurs des Maskoutains. L’inconnu rebute, d’autant plus que les élus se font toujours un plaisir de dire haut et fort qu’ils sont indépendants et qu’il n’y a que des avantages à ne pas avoir à suivre une ligne de parti.
Le fait d’être sorti de la campagne bredouille annonçait pour Saint-Hyacinthe unie une longue traversée du désert jusqu’aux élections de 2025.
Et voilà que sa cheffe abdique à mi- chemin. La suite ne sera pas évidente, compte tenu de l’intérêt limité pour ce parti et ses idées, comme en témoigne le peu d’engouement suscité par sa plus récente assemblée générale, qui n’a attiré qu’une trentaine de membres et de sympathisants.
Pour reprendre l’image de la traversée du désert, aussi bien dire que la cheffe y prêchait également. Les candidats intéressés à prendre la relève seront peu nombreux, à mon avis.
Les bibittes à la Marijo Demers, qui mangent de la politique, qui sont articulées, capables de défendre leurs idées, de débattre et de s’investir à fond pour la cause ne courent pas les rues. Alors étant donné que les élections n’ont lieu que dans deux ans, peut-être faudrait-il confier les rênes à un chef intérimaire et repousser l’investiture et le couronnement à l’automne 2024, question d’essayer de créer un certain momentum pour 2025. Et ça, c’est si Saint-Hyacinthe unie est encore uni et d’actualité à ce moment. On ne peut plus jurer de rien.
Dommage, car même si Marijo Demers et son parti n’ont pas transformé la politique municipale en profondeur, ils ont eu un certain impact et apporté un peu de fraîcheur. Certaines idées de leur plateforme ont été récupérées par l’administration actuelle, comme la mise sur pied d’un budget participatif, et à force de réclamer plus de transparence et d’écoute de la part des élus, Mme Demers peut s’attribuer quelques changements à la période de questions. Sa présence régulière au conseil ou dans LE COURRIER dérangeait alors qu’elle était perçue comme l’opposition officielle à la Ville de Saint-Hyacinthe, un titre qu’elle n’a pourtant jamais revendiqué. Bien au contraire, elle n’a jamais hésité à saluer les bons coups du maire ou de l’administration municipale, et ce, même si elle ne laissait rien passer et rebondissait habilement sur chaque dossier lorsque nécessaire. En habile contrepoids politique.
On devine que le maire André Beauregard ne sera pas trop triste à l’idée de ne plus avoir à en découdre avec elle. Souvenez-vous du dérapage malaisant survenu en avril dernier à la période de questions de l’assemblée publique de la Ville. Bizz, Bizz, Bizz. Que ce soit en paroles ou par écrit, Marijo Demers avait un don certain pour agacer le maire. Mais le don de l’inquiéter pour 2025, peut-être pas. Encore moins maintenant.