6 juillet 2023 - 10:11
Crise du logement à Saint-Hyacinthe : des solutions à portée de volonté politique et de législation municipale
Par: Le Courrier
La ville de Saint-Hyacinthe fait face à une crise du logement aiguë, qui s’est installée durablement. Pas moins de 40 % des Québécois sont des locataires et leur revenu médian s’établit à 48 400 $. Seulement entre 2021 et 2022, la hausse des loyers s’est établie à 12 % en sol maskoutain et ce n’était pas la première hausse notable.

L’abordabilité du logement frappe de plein fouet, en d’autres mots, la capacité de se loger décemment selon ses moyens. Et la crise affecte plusieurs catégories de ménages : travailleurs, étudiants, aînés, familles, personnes plus démunies. À cela s’ajoute un historique local : avec les années, une série d’évictions et de démolitions dans le parc des logements plus abordables au centre-ville, conjuguée à de nombreux incendies qui rasent d’autres logements et jettent à la rue leurs occupants. Certes, le taux d’inoccupation est passé de 0,4 % à 2 %, mais ne nous y trompons pas; il y a plus de logements disponibles, mais dans la catégorie haut de gamme, hors de la portée de la plupart des bourses.

Un bouquet de solutions proposées par Saint-Hyacinthe unie

Il n’y a pas de baguette magique pour régler la crise du logement, mais Saint-Hyacinthe unie, inspirée entre autres par sa plateforme des élections de 2021 et par les expériences concluantes d’autres municipalités, propose les solutions suivantes, qui sont à portée de volonté politique et de législation municipale. Nous sommes conscients que le palier municipal seul ne peut régler cette crise, mais il peut tout de même agir, dès maintenant. Nous n’avons pas le luxe de nous passer, comme ville, de toute unité locative propre à l’habitation. Saint-Hyacinthe unie enjoint les élus municipaux à mettre en place ces solutions suggérées, sans partisanerie. Nous serons ravis de voir le conseil actuel mettre en branle ces huit actions:

Doter la ville d’une Politique globale de l’habitation déterminée par le conseil et les acteurs du milieu et selon les besoins réels dans le parc locatif de la ville et plus largement de la région. À titre d’exemple, il n’y a à peu près aucun 5 1/2 abordable sur le marché local et les familles locataires peinent à se loger.

Protéger le parc des unités de logements abordables déjà existantes en soustrayant ces immeubles à la spéculation et à la financiarisation par le biais d’acquisitions immobilières qui deviennent propriétés d’organismes à but non lucratif. La Société locative d’investissement et de développement social (SOLIDES) en est un bon exemple et continue d’augmenter son parc immobilier abordable.

Joindre le mouvement municipal qui réclame le déploiement d’un registre des loyers public, universel et obligatoire.

Adopter une réglementation protégeant le patrimoine modeste et rendant sa démolition plus ardue, à l’instar de la Ville de Longueuil. Le maire Beauregard m’a répondu lundi en séance que le conseil n’avait pas encore discuté de ce type d’avenue. J’invite les élus municipaux à prendre connaissance de ce qui a été adopté par la mairesse Fournier et son équipe et à s’en inspirer.

Instaurer un moratoire sur les démolitions au centre-ville lorsque les immeubles sont jugés propres à l’habitation dans le double contexte de crise du logement et de l’historique d’évictions et de démolitions vécues. Le cri du cœur des résidents de l’avenue Robert et du milieu communautaire à la mi-juin, lors de la séance spéciale du comité de démolition, était unanime.

Insérer un seuil minimal de logements sociaux et/ou abordables dans les projets majeurs de densification dans la phase de planification des projets majeurs.

Affecter une personne-ressource à la recension des appartements propres à l’habitation sur le territoire, mais non loués par les propriétaires et cadenassés pour de longues périodes. C’est une réalité visible dans certains districts de la ville et on pourrait amener, via des incitatifs, certains propriétaires à remettre leur logement sur le marché.

Légiférer pour encadrer et restreindre les locations à court terme, du type Airbnb, qui soustraient invariablement des logements au parc immobilier locatif.

Pour une vision globale de l’habitation dans une ville où il fait bon se loger

Durant la période des questions de la séance du conseil du 3 juillet, le maire Beauregard m’a répondu que contrairement aux 14 maires et mairesses qui représentent 4,7 millions d’habitants au Québec, il n’avait pas signé une importante lettre collective émanant du monde municipal (en passant des mairies de Rimouski à Laval), réclamant la création d’un registre des loyers qui soit public, universel, obligatoire. La raison? Le maire n’a pas été « interpellé » pour le faire.

J’ai été stupéfaite de l’apprendre, car entre le grand sommet sur l’habitation, les dix engagements des plus grandes villes au Québec en matière d’habitation et la grand-messe annuelle des assises de l’UMQ qui s’est récemment déroulée, la question du logement est sur toutes les lèvres au municipal et le réseau des élus – a fortiori celui des maires et mairesses – se concerte sans relâche dans ses stratégies face à un problème qui affecte toutes les municipalités au Québec.

J’attends d’un maire du leadership, de la vision et une propension à faire des représentations politiques, à nouer des alliances et à faire front commun avec ses homologues, sur une question aussi cruciale que celle du logement. Comme je l’ai fait lundi soir lors de la séance du conseil, je réitère ma demande; signez, vous aussi, cette lettre collective.

Vous m’avez répondu être personnellement en faveur de cette initiative, mais avez avoué, du même souffle, n’en avoir jamais discuté au sein du conseil. Il n’est pas trop tard pour agir et pour joindre la voix d’une des vingt villes les plus populeuses de notre province à cette initiative qui contribuera à freiner l’inflation immobilière.

Marijo Demers, cheffe de
Saint-Hyacinthe unie

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