Si, dès le départ, l’organisme maskoutain ne roulait pas sur l’or, la situation s’est vraisemblablement détériorée dans la seconde moitié de 2017 et encore plus en 2018, alors que les chèques sans provision se multipliaient. « Mme Grimard venait me voir souvent pour refaire un chèque de paie en me donnant des excuses du genre qu’un employé l’avait passé dans la laveuse, par exemple », se souvient Yancy Bissonnette, dernière présidente du CA de l’organisme. Quelques semaines seulement après avoir reçu une importante subvention de l’Appui Montérégie, les chèques sans fonds rebondissaient encore. « Il n’y avait déjà plus rien dans les coffres. »
Selon Sylvie Grimard, elle a « levé les flags » après les six premiers mois de l’organisme pour dire qu’il allait droit vers le mur à cause du manque d’argent. « Je disais “si on continue de même, on va fermer”. Mais tout le monde disait “on va continuer à mettre l’effort” », assure-t-elle. Une affirmation démentie par plus d’une demi-douzaine d’anciens membres du CA. Un employé, témoignant sous le couvert de l’anonymat, va plus loin. « Encore quelques jours avant de fermer, Mme Grimard parlait d’agrandissement et de fusion avec la Société Alzheimer et le Centre de Bénévolat », a-t-il raconté. Même après l’annonce de fermeture en mai, une autre employée a soutenu que Mme Grimard tenait toujours le discours que la situation allait s’arranger grâce à une fusion et des subventions qui devaient arriver.
LOTO-VOYAGES
Un autre sujet où les points de vue divergent est celui de la Loto-voyages, la première campagne de financement lancée par le CSSAA. Elle n’aurait permis que d’amasser 2 000 $ pour l’organisme, selon la directrice générale. Mme Grimard renvoie la balle à son conseil d’administration pour justifier la tenue de cette activité. « La Loto-voyages, ça ne vient pas de moi, ça vient d’un des membres du CA qui voyait grand. » Le « membre du CA » qu’elle vise est Josianne Jodoin, qui avait effectivement proposé l’idée, mais en tant qu’employée du CSSAA, plusieurs mois avant qu’elle fasse son entrée au conseil d’administration. Si Sylvie Grimard dit aujourd’hui qu’elle n’était pas d’accord avec une telle activité, les procès-verbaux des séances du CA de janvier et février 2017 démontrent que c’est bien elle qui a apporté l’idée au conseil d’administration et que, malgré les réserves de certains membres, notamment concernant le coût élevé des billets, elle a été de l’avant avec le projet. Plusieurs témoignent de son enthousiasme devant l’organisation de cette activité de financement. « Personne n’a jamais rien imposé », assurent en chœur d’anciens administrateurs.
En plus d’être une activité-bénéfice qui rapporte peu, la Loto-voyages a causé bien des tensions avec Mélanie Girard de Voyage Vasco, entreprise partenaire dans l’activité, qui a été jusqu’à porter plainte à la Régie des alcools, des courses et des jeux. « C’est Mme Grimard qui contrôlait tout et j’ai reçu mon paiement avec beaucoup de retard », a-t-elle déclaré. C’est finalement une membre du CA, Diane Bourgeois, qui aurait déboursé plus de 8 000 $ de sa poche pour payer les sommes dues à Vasco.
Cet épisode a éveillé les soupçons du dernier CA, qui se faisait dire par Mme Grimard depuis des mois que l’organisme n’avait pas reçu l’argent de la vente des billets, alors qu’il était entré dans les livres depuis novembre 2017, d’après Yancy Bissonnette, estimant à 10 000 $ le montant d’argent lié à la Loto-voyages dont on a perdu la trace. « C’est là qu’on s’est sérieusement demandé “qu’est-ce qui se passe?” au sein du CA. On a demandé des chiffres à Sylvie Grimard, et comme ça n’arrivait pas, on a démissionné en bloc en mai. »