Décoré de l’Ordre du Canada en 1991, Guy St-Germain a été un dirigeant d’entreprise influent et visionnaire ainsi qu’un philanthrope reconnu pour son rôle dans plusieurs projets sur les plans social, artistique et communautaire. Localement, il avait entre autres contribué à la campagne de financement du Centre des arts Juliette-Lassonde au début des années 2000.
« Mon père a toujours été reconnu pour sa grande gentillesse et le souci qu’il portait au bien-être de ses employés. Il savait bien s’entourer et il a su miser sur des gens compétents. Il est toujours demeuré près et fier de ses racines maskoutaines. Saint-Hyacinthe a toujours eu une place importante pour lui et pour la direction de l’entreprise. Vous savez, le Groupe Commerce, c’est une belle histoire de famille à la base », a témoigné son fils aîné, Charles, un diplômé du Séminaire de Saint-Hyacinthe, en entrevue au COURRIER.
Dans la vignette soulignant son intronisation à l’Ordre du Canada, on rappelle que Guy St-Germain a été membre du Comité canadien de la Maison des étudiants canadiens à Paris pendant plusieurs années, en plus d’y avoir contribué de façon importante par le biais de la Fondation St-Germain. M. St-Germain est aussi associé à la Bourse Famille Denise-et-Guy-St-Germain, une bourse d’excellence créée en 2022 par le Collège Brébeuf à Montréal, où il a été diplômé en 1951.
Le parcours académique de Guy St-Germain est assez impressionnant. Après avoir complété son droit et son barreau à l’Université de Montréal, il a mérité la bourse Rhodes de l’Université d’Oxford à Londres. Il en ressortira avec une maîtrise en Économie, Philosophie et Politique, avant de poursuivre des études en Sciences politiques à Paris.
Dans une étude de cas produite pour le compte de HEC Montréal par le professeur Jean-Paul Dupré et Luc Bélanger-Martin, on mentionne que M. St-Germain a été l’un des compagnons de collège de l’ancien premier ministre du Québec Robert Bourassa et que les deux hommes ont poursuivi ensemble leurs études à Londres, puis conservé des liens d’amitié étroits par la suite.
De retour à la maison
Guy St-Germain a joué un rôle crucial dans l’évolution et la transformation de l’assureur maskoutain à partir des années 1970, alors qu’il avait intégré le groupe familial quelques années plus tôt pour connaître les rouages de l’entreprise et s’imprégner de sa culture, rappellent Dupré et Bélanger-Martin.
Pour les deux hommes, c’est sa capacité à prendre les choses en main et à les mener à terme qui caractérise le règne de Guy St-Germain à la tête de l’entreprise. Ce règne a véritablement débuté en 1970 quand il a été nommé directeur général, à l’âge de 37 ans. « Progressivement, il structure et organise l’entreprise et la modèle en fonction de sa vision du futur et de la connaissance des gens et des dossiers qu’il a accumulée depuis son entrée dans le groupe. »
C’est en 1976 que Guy St-Germain sera nommé président et chef de la direction. « C’est à partir de cette époque, relate l’étude de cas des HEC, qu’il marque le plus profondément Groupe Commerce de son empreinte. Il renforce sa vision de l’entreprise et n’hésite pas à faire entrer, au niveau de la direction, un certain nombre de cadres extérieurs aux familles actionnaires. Après avoir engagé en 1974 le premier actuaire de la compagnie, Yves Brouillette, il confie en 1978 la fonction de vice-président, Ressources humaines à André Lord, puis en 1985, Claude Dussault [qui accédera au poste de président en 2001] se joint à l’organisation en tant que vice-président, Marketing. »
Joint par LE COURRIER, Yves Brouillette a dit encaisser le choc de la perte d’un ami et d’un mentor pour lequel il avait beaucoup d’estime et d’admiration.
« Je n’ai que de très bons souvenirs, a confié celui qui revoyait encore chaque année son prédécesseur et qui avait eu l’occasion de le visiter à son domicile de Montréal en début d’année. Nous avons travaillé ensemble de 1974 à 1989 et j’ai ensuite eu le privilège de lui succéder. Le défi était pour le moins intéressant. Je retiens l’énorme respect et la considération qu’il portait à ses collègues et à tous les employés. Pour espérer avoir du succès en affaires et pour assurer la croissance de l’entreprise, il avait compris que tout partait de la contribution des employés. Cette philosophie est toujours demeurée. »
Des bons coups
C’est aussi sous l’impulsion de Guy St-Germain, et dans le but d’étendre les racines du Groupe Commerce à Saint- Hyacinthe tout en contribuant à la revitalisation de son centre-ville, que la Fondation Groupe Commerce fera l’acquisition en 1983, et pour la somme de 750 000 $, du terrain de 185 000 pieds carrés et des deux édifices désaffectés de l’usine Penman’s. L’un sera rasé, où s’élève aujourd’hui la bibliothèque T.-A.-St-Germain, et l’autre sera partiellement réaménagé en espace à bureaux.
L’histoire retiendra tout particulièrement que M. St-Germain a été à la barre du navire pendant les années de grandes turbulences à la fin des années 1970 dans l’industrie de l’assurance. M. St-Germain sera remplacé à la présidence du Groupe Commerce à la fin de l’année 1989 par M. Brouillette, au terme d’un règne marqué par quelques acquisitions stratégiques (Belair, Western Union) et surtout une dernière transaction d’envergure, soit la vente de 100 % des actions du Groupe Commerce à Nationale-Nederlanden en 1988, qui deviendra ING Group, avant d’autres transactions qui mèneront à Intact Assurance.
Intact Corporation financière est aujourd’hui le plus important fournisseur d’assurance de dommages au Canada et l’un des principaux fournisseurs d’assurance spécialisée dans le monde. Ses primes directes annuelles totalisent près de 24 milliards de dollars.
À Saint-Hyacinthe, selon le plus récent décompte effectué par LE COURRIER l’automne dernier, l’assureur employait tout près de 1300 employés rattachés à ses bureaux de Saint-Hyacinthe sur la rue Girouard.