Les signes de cette pénurie sont partout et la solution semble passer de plus en plus par la venue de travailleurs étrangers qui ne sont plus cantonnés dans les champs des producteurs agricoles. S’il y en a encore à la ferme, mais pas assez au goût des agriculteurs, la main-d’œuvre immigrante est maintenant requise partout. Même l’atelier de mécanique qui a installé mes pneus d’hiver envisage sérieusement de faire venir des mécaniciens de l’étranger.
Si les besoins du secteur de la transformation alimentaire sont déjà bien documentés, notamment chez Olymel qui dit attendre pas moins de 1200 travailleurs étrangers temporaires en 2023, d’autres employeurs de secteurs variés sont maintenant contraints d’explorer cette avenue pour remplir leurs obligations.
Dans notre dernière édition, nous avions deux exemples éloquents. D’abord au Groupe Lacasse à Saint-Pie où l’on vient d’accueillir une première cohorte de 12 travailleurs colombiens pour colmater les brèches sur la ligne de production.
Si tout va bien, près d’une cinquantaine d’autres s’ajouteront au premier trimestre de 2023 en provenance de Colombie, du Mexique et de l’île Maurice. Autant de personnes qu’il faudra former et intégrer bien entendu, mais dans un premier temps accueillir et loger.
Avant toute chose, et même avant de songer à leur enseigner la langue et les grandes valeurs canadiennes qui leur donneront la chance d’aspirer à la citoyenneté, il faut s’assurer de pouvoir répondre à leurs besoins de base. Mais fournir à tout ce beau monde un toit convenable n’est pas une sinécure avec la rareté actuelle et la frénésie immobilière qui nous forcent à revoir notre définition personnelle de logements abordables.
Chanceux, le Groupe Lacasse a réussi à dénicher quelques logements à Saint-Hyacinthe, où les services sont aussi plus adaptés aux besoins des immigrants, ce qui entraîne toutefois des enjeux de logistique et de transport.
Dans notre journal du 1er décembre, mon attention, et la vôtre sans doute, a aussi été attirée par cette pleine page de publicité du Centre intégré de santé et de services sociaux de la Montérégie-Est sous forme d’appel à l’aide un peu désespéré. On y annonçait deux choses. Premièrement, la venue imminente de futures infirmières et infirmiers de l’international qui débarqueront dans notre région pour étudier et travailler.
D’abord comme préposés aux bénéficiaires, puis en soins infirmiers.
Le CISSS de la Montérégie-Est et la Maison de la famille des Maskoutains cherchent activement 30 endroits près du Cégep de Saint-Hyacinthe et de l’Hôpital Honoré-Mercier pour les loger, que ce soit un appartement ou une chambre.
Encore là, et pour reprendre une réplique mémorable du film Taken, j’ai envie de dire : bonne chance.
Il faudra être imaginatif pas mal et peut-être s’inspirer de ce qui se fait ailleurs. Dans la région d’Acton, on a annoncé en octobre que la Maison Saint-Amour, une résidence où logeait jusqu’en septembre 2021 une quarantaine de personnes âgées, changerait de vocation. Le nouveau propriétaire destine ce vaste immeuble aux travailleurs étrangers appelés en renfort dans les entreprises manufacturières et agroalimentaires de la région. C’est à la fois innovant et inquiétant.
En sommes-nous vraiment réduits à vider des RPA pour loger des travailleurs temporaires, et ce, peu importe qu’ils viennent de Colombie, du Mexique, d’Abitibi ou de Matane? On dirait bien.
Selon les plus récentes statistiques de la Société canadienne d’hypothèques et de logement, le taux d’inoccupation des logements dans la région de Saint- Hyacinthe est de 1,1 %, loin du taux d’équilibre du marché estimé à 3 %.
Autant que de bras, sinon plus, la région de Saint-Hyacinthe a besoin de toits. L’un ne viendra pas sans l’autre et cela ne sera pas sans conséquence non plus. C’est l’évidence même.