Au risque de passer une fois de plus pour le Nostradamus maskoutain, je lui avais chaudement recommandé au début de l’été d’étirer son échéancier jusqu’au printemps 2018, au lieu d’un simple report de quelques semaines.
Simple question de logique et de prudence élémentaire. C’était écrit dans le ciel qu’elle frapperait un mur et courrait à sa perte en voulant démarrer le tout cet automne, en pleine campagne électorale municipale. En annonçant le 29 août sa décision de se donner quelques mois supplémentaires pour bien mettre la table à ce chantier, la Ville de Saint-Hyacinthe a identifié ce qu’elle désigne comme des « solutions structurantes, notamment pour améliorer l’accès gratuit au stationnement au centre-ville ».
On le sait tous, l’obstacle de taille à surmonter est celui du stationnement. Pour remplacer les quelque 180 places qui disparaîtront avec la construction du complexe pour personnes âgées Réseau Sélection, la Ville devait en dénicher tout autant. Elle a fait de grands pas dans cette direction. D’abord en achetant l’immeuble de la Fédération des caisses Desjardins, ce qui lui donne automatiquement 140 cases bien situées. Elle n’a qu’à s’entendre avec le locataire pour accélérer son départ et à retarder le déménagement de la bibliothèque de deux ans, le temps de faire les travaux nécessaires et de permettre à Réseau Sélection de faire les siens. Le feu n’est pas pris à la bibliothèque, même si elle s’enfonce lentement, mais sûrement.
La Ville a aussi acquis les propriétés du Groupe Léveillée, à la place des immeubles locatifs de la rue Saint-François. Voilà une décision, disons plus sensée. Une fois détruit, on pourrait théoriquement y aménager 87 cases de stationnement, qui s’ajouteront, une fois de plus en théorie, aux 52 cases projetées derrière le Jean-Coutu.
Sauf qu’en pratique, ces achats et ces démolitions ne se traduiront pas forcément en cases de stationnement. Si Jésus avait la capacité de transformer l’eau en vin, personne à l’hôtel de ville ne peut changer des espaces vacants en cases de stationnement. Il faut encore respecter les règles et procéder à des changements de zonage. La Ville a déjà mordu la poussière avec le changement de zonage derrière le Jean-Coutu et rien n’indique qu’une telle situation ne pourrait pas se reproduire ailleurs. Et on le sait pertinemment à l’hôtel de ville. Il n’est pas dit que tous les changements à venir avec l’entrée en vigueur de la loi 122 vont faire disparaître comme par magie tous les obstacles réglementaires. Au rythme où vont les choses à Québec, on pourrait n’être guère plus avancé au printemps prochain, alors que les élections provinciales de l’automne 2018 seront bien en vue. Rien pour accélérer les choses donc.
Dans ce contexte, il est quand même étonnant de voir la Ville multiplier les acquisitions sans avoir la garantie de pouvoir modifier le zonage des terrains. On raconte même qu’elle a encore une ou deux propriétés dans sa mire tout près des bureaux du COURRIER. Encore une fois, nous l’invitons à se calmer le gros nerf avant de tout vouloir acheter et démolir. Il est assez étonnant de voir avec quelle facilité elle sort son chéquier pour de l’immobilier, alors qu’il y a quelques années à peine elle refusait d’envisager de dépenser seulement 300 000 $ pour acquérir le terrain vacant situé en face du Marché public. Quel manque de vision.
Pour en revenir au projet Réseau Sélection, le problème n’en était pas tant un de vision que de précipitation et de manque de cohésion. Plus on regarde les dépenses dans ce dossier et plus on en vient à se demander si toutes ces dépenses et ces chambardements en valent la peine considérant les recettes foncières à espérer de Réseau Sélection. On nous répondra qu’il faut regarder au-delà des recettes foncières et s’attarder aux retombées économiques pour le centre-ville, mais ne perdons pas de vue non plus toutes les pirouettes de la Ville pour satisfaire un promoteur qui ne fait pas grand-chose, lui, pour atténuer les inconvénients qu’il provoque. Qui plus est, Réseau Sélection continue de se mêler dans la valeur de son investissement au centre-ville, qu’il évalue parfois à 50 M$ et tantôt à 40 M$, selon la nature de ses communications. Hâte de voir ce que nous réserve le promoteur pour redorer son blason. Il en a besoin.