Je sens d’ici que les puristes se sont étouffés en lisant leur publication préférée. Après tout, baptiser un véhicule électrique de ce titre relève du sacrilège. Mais pas vraiment, pour être franc, et si les sensations ne sont pas exactement les mêmes entre le puissant moteur à essence et la version électrique, il ne faut pas négliger le plaisir que cette dernière nous procure.
Car, il faut bien l’avouer, on n’a pas fait les choses à moitié chez Dodge. La version Scat Pack, la plus puissante, dispose d’un moteur de 670 chevaux et de 627 livres-pied de couple, de quoi vous clouer solidement dans votre siège.
Ce qui est particulièrement vrai lorsqu’on appuie sur le petit bouton Power Boost logé sur le volant. Pour la dizaine de secondes qui suivent, ce petit geste multiplie la puissance et crée une véritable accélération. Tenez bien le volant, malgré la présence du rouage intégral, car la puissance transmise aux roues est telle qu’on ne peut que sursauter. Soyons cependant francs : le journaliste que je suis a utilisé cette fonction deux ou trois fois pour en valider l’existence, mais elle ne ferait jamais partie d’une routine quotidienne.
Parler de muscle car sans évoquer le rugissement du moteur, c’est comme parler de rock sans guitare. Et pourtant, avec l’électrification, Dodge a dû faire une croix sur le bon vieux V8 ronronnant. Qu’à cela ne tienne, les ingénieurs ont concocté le Fratzonic Chambered Exhaust, une sorte de boîte à sons amplifiée qui recrée artificiellement le grondement tant aimé.
J’avoue, j’étais sceptique. Un bruit fabriqué, c’est souvent comme du café instantané : ça fait le travail, mais il manque un peu d’authenticité. Et pourtant… surprise! Le résultat est étonnamment convaincant. En fait, le son est tellement convaincant que j’ai dû convaincre un passant qu’il s’agissait d’une version électrique.
Même Chérie, toujours prompte à juger, m’a devancé dans son appréciation. Pour elle, ce son fait partie du spectacle. Et elle n’a pas tort : ce n’est pas exactement la sonorité mécanique d’un V8, mais ça évite le silence parfois ennuyeux de la conduite électrique.
Un muscle car… presque
Sur la route, le Scat Pack EV reprend les éléments esthétiques du muscle car : long capot, silhouette massive, assise basse, direction un peu lourde. Bref, on est loin de la finesse européenne, et c’est tant mieux. Dodge n’a jamais cherché à faire dans la dentelle.
Mais l’ajout de la batterie change la donne. L’autonomie annoncée frôle les 388 km, mais dans la vraie vie, où l’on conduit parfois avec un peu trop d’enthousiasme, on tourne plutôt autour de 300 km. Et encore, en gardant le pied léger, ce qui, avouons-le, n’est pas dans l’ADN d’un muscle car.
Et puis, il y a le prix. Avec les options et les taxes, on flirte dangereusement avec les six chiffres. Ce n’est plus la voiture du peuple, mais celle d’un passionné bien nanti.
Certes, les matériaux sont plus raffinés, la technologie embarquée est à jour, et la garantie de la batterie enlève un grand nombre d’inquiétudes. Mais le muscle car, historiquement, c’était la promesse d’une performance brute à prix accessible. Ici, on paie autant pour la nostalgie que pour l’innovation.
Alors, est-ce une digne héritière des bolides qui ont marqué l’histoire? Oui, si l’on accepte que l’évolution passe par des compromis. Non, si l’on s’accroche à l’idée qu’un muscle car doit être brutal, bruyant et abordable.
Pour ma part, j’ai terminé l’essai avec un sourire franc. Et Chérie aussi. Et peut-être que c’est ça, l’essentiel : malgré l’électrification, la Charger réussit encore à faire battre nos cœurs. Électriquement, certes. Mais avec passion.


