4 janvier 2024 - 03:00
Églises : leurs jours pourraient être comptés
Par: Sarah-Eve Charland
Le vicaire général, Serge Pelletier, analysera lucidement l’avenir de chacune des églises du Diocèse de Saint-Hyacinthe. Photothèque | Le Courrier ©

Le vicaire général, Serge Pelletier, analysera lucidement l’avenir de chacune des églises du Diocèse de Saint-Hyacinthe. Photothèque | Le Courrier ©

L’avenir de l’église Saint-Thomas-d’Aquin semble incertain, mais elle pourrait bien ne pas être la seule dans cette situation. Le Diocèse de Saint-Hyacinthe dresse présentement le portrait financier de chacune de ses quelque 80 églises. Celles qui se retrouveront en mauvaise posture pourraient être mises en vente.

Toutes les paroisses du Diocèse, de Saint-Hyacinthe à Granby en passant par Sorel-Tracy, ont reçu le mandat de réaliser un bilan de santé des bâtiments dans l’objectif de prévoir l’ampleur des travaux à réaliser au cours des prochaines années.

« Selon le bilan de santé, les revenus et la vitalité de la paroisse, les décisions ne seront pas les mêmes. Je ne peux pas dire combien il y aura d’églises dans 10 ans, mais je peux dire que, présentement, on en a trop pour les sous qu’on a. […] On ne diminue pas le parc immobilier de gaieté de cœur, mais les chiffres parlent d’eux-mêmes », affirme le vicaire général, Serge Pelletier.

Les marguilliers des différentes paroisses ont reçu les rapports sur l’état de santé des bâtiments religieux. Ils sont à réfléchir sur les revenus et les dépenses de leur organisation. S’ils arrivent à la conclusion que les revenus ne sont pas en mesure de suffire aux dépenses, des églises fermeront.

« La consigne est de regarder lucidement les dépenses et les revenus. C’est le même message pour tout le Diocèse. Les églises sont de plus en plus difficiles à soutenir au niveau financier. Les coûts d’opération, de chauffage et de réparation ont explosé dans les dernières années et les revenus ont diminué », continue M. Pelletier.

Déjà, au fil des dernières années, plusieurs églises ont été achetées, parfois par des municipalités, parfois par le milieu communautaire. Sur le territoire de Saint-Hyacinthe, on compte encore sept églises appartenant au Diocèse, mais deux églises pourraient bien changer de main prochainement. Entre autres, la Ville de Saint-Hyacinthe a manifesté dernièrement son intérêt à acquérir l’église Saint-Joseph pour la démolir et construire sur le même site une école primaire.

Ces derniers temps, l’église Saint- Thomas-d’Aquin a aussi fait l’objet d’inquiétudes sur les réseaux sociaux. Une offre d’achat d’un promoteur aurait même été soumise au conseil de fabrique. Le vicaire général préfère demeurer discret à ce sujet. « Il y a des processus. Je ne peux rien dire. Il n’y a rien d’officiel. Je ne peux pas m’étendre sur le sujet pour le moment », dit-il.

LE COURRIER a tenté de joindre à plusieurs reprises la Paroisse Notre-Dame-du-Rosaire qui s’occupe de l’église Saint-Thomas-d’Aquin, mais en vain. Il a donc été impossible de se faire confirmer l’information.

La vente d’églises ne se fera pas à n’importe quel prix, précise M. Pelletier, mais la réflexion s’impose. Certaines églises, situées en campagne, ne sont utilisées qu’une fois toutes les deux semaines pendant environ une heure et demie.

« On est en droit de se poser des questions. […] Notre première mission n’est pas de maintenir des bâtisses, mais d’aider les gens. J’avais un collègue qui disait : quand est-ce qu’on va arrêter de soutenir des lieux pour être en mesure de soutenir des gens? On n’est pas des gardiens de musée. Notre mission est d’aider les plus démunis. Si on a des boulets attachés au pied, c’est plus difficile d’accomplir notre mission. »

Moratoire sur le zonage

La Ville de Saint-Hyacinthe a annoncé qu’aucune demande de changement de zonage touchant des bâtiments religieux ne serait analysée par le conseil municipal. Les églises garderont donc le zonage institutionnel, excluant tout projet privé de construction résidentielle. L’objectif avoué est de garder ces terrains pour y construire, notamment, des parcs, des écoles ou encore des bâtiments à vocation communautaire.

« On peut comprendre les promoteurs qui cherchent à densifier, mentionne la directrice générale de la Ville de Saint-Hyacinthe, Chantal Frigon. Des terrains vacants prêts à construire, il n’y en a plus beaucoup. Racheter les églises peut être une solution facile. Ce n’était pas envisagé il y a deux ou trois ans, ce n’était pas dans le portrait. »

Le vicaire général n’a pas d’opinion sur cette prise de position de la Ville. Selon lui, le zonage ne regarde que les futurs acquéreurs. Ce seront ces derniers qui devront s’entendre avec l’organisation municipale, estime-t-il.

Un bien communautaire?

« Il y a aussi une notion communautaire, poursuit la directrice générale adjointe de la Ville de Saint-Hyacinthe, Brigitte Massé. Les églises ont été construites avec la dîme, avec l’argent des citoyens. De donner une deuxième vie à ces milieux-là en gardant l’esprit communautaire, c’est important pour le conseil. »

Bien qu’il comprenne que l’enjeu des églises suscite beaucoup d’émotions, le vicaire général ne partage toutefois pas ce discours.

« On entend des gens dire que l’église appartient aux citoyens, mais ce n’est pas tout à fait vrai. Les citoyens, en général, ne défraient pas ou n’investissent pas dans les bâtiments religieux. C’est sûr que le bâtiment fait partie du décor, mais tant qu’il n’y a pas une vente, l’église n’appartient pas aux citoyens. Ce n’est pas un bien municipal à moins que l’ensemble des citoyens soit d’accord à investir, comme cela a été le cas avec l’église Notre-Dame-du-Rosaire. Comme évêché, on n’est pas responsable de gérer un décor, ce n’est pas notre tâche », affirme M. Pelletier.

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