La fondation du Parti québécois (PQ) par René Lévesque en 1968 offre aux souverainistes, de plus en plus nombreux, une plateforme sur le plan politique. Le PQ parvient à faire élire sept députés à l’Assemblée nationale. Le grand vainqueur de l’élection demeure toutefois le Parti libéral du Québec, ragaillardi par la popularité de son nouveau chef, Robert Bourassa, qui devient à 36 ans le plus jeune premier ministre de l’histoire de la province.
À Saint-Hyacinthe, après quelques tergiversations, le député de l’Union nationale, Denis Bousquet, décide de se représenter. Il fera face à Fernand Cornellier pour le Parti libéral, à André Pinsonneault pour le Parti québécois ainsi qu’à Jean-Jacques Dragon pour le Ralliement créditiste. Cornellier remporte la victoire avec une confortable majorité de 2074 voix sur Bousquet.
Fernand Cornellier est né à Joliette le 24 septembre 1920. Il est le fils d’Olivier Cornellier, serre-frein, et de Fébronie Ferland. Il étudie d’abord au Séminaire de Joliette, puis à l’École normale Jacques-Cartier à Montréal. En 1955, il commence sa carrière chez Bell Téléphone, d’abord à Chicoutimi, puis à Québec, à Sainte-Agathe-des-Monts, à Roberval et finalement à Saint-Hyacinthe à partir de 1964, comme gérant. Il s’implique dans sa nouvelle communauté et devient président de la chambre de commerce régionale de Saint-Hyacinthe, Bagot et Yamaska. En 1946, Fernand Cornellier a épousé Rita Blackburn à Chicoutimi. Le couple aura quatre enfants.
Le premier mandat de Robert Bourassa est marqué par la crise d’octobre 1970. Une cellule du Front de libération du Québec (FLQ) qui entend faire l’indépendance du Québec en utilisant la force et enlève le ministre du Travail et de la Main-d’œuvre Pierre Laporte et le diplomate britannique James Richard Cross. Le corps sans vie du ministre est retrouvé dans le coffre d’une voiture le 17 octobre, une semaine après son enlèvement.
Cornellier, collègue et ami de Pierre Laporte, est évidemment consterné. Dans l’édition du Clairon du 21 octobre 1970, il écrit un texte sur l’événement. Pour lui, il s’agit d’une tragédie nationale. Il écrit : « Ce meurtre ignoble me prive d’un ami personnel. L’histoire reconnaîtra Pierre Laporte comme un héros politique de la liberté et un martyr de la démocratie. »
Lors des élections de 1973, Fernand Cornellier hésite à se représenter pour des raisons personnelles, mais c’est finalement la crainte du séparatisme qui le pousse à briguer de nouveau les suffrages. Pour lui, il s’agit d’une aventure que le Québec ne peut se permettre. Ses adversaires dans le comté l’accusent de ne pas avoir fait tous les efforts nécessaires pour que Saint-Hyacinthe ait sa juste part des 100 000 emplois promis par Bourassa lors de la campagne électorale de 1970. Le taux de chômage est en effet encore très élevé dans la circonscription. Malgré tout, il l’emporte sur le candidat péquiste, Richard Bousquet, par une majorité de 5535 voix.
En 1976, Cornellier se présente pour une troisième fois. De nouveau, il fait campagne sur le dos des séparatistes et des syndicats, surtout dans le domaine public et parapublic. Cette fois-ci, cependant, il arrive troisième, loin derrière Fabien Cordeau de l’Union nationale et Charles Tremblay du Parti québécois. Après sa défaite, il retourne au service de Bell Canada. Il meurt à Saint-Lambert le 10 juin 2010 à l’âge de 90 ans.
Par Martin Ostiguy, membre du Centre d’histoire de Saint-Hyacinthe